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Oxfam et Development Finance International publient un classement mondial sur l’engagement des États à réduire les inégalités. Ce classement repose sur un indice qui évalue les politiques publiques dans trois domaines considérés comme essentiels pour réduire les inégalités : le niveau de dépenses sociales pour l’accès aux services publics, la progressivité de l’impôt, et les droits du travail.

Oxfam et Development Finance International ont passé au crible 157 pays et révèlent les bons et les mauvais élèves[1]. Leur rapport montre ainsi une nette divergence entre les États tels que la Corée du Sud, l’Indonésie et la Géorgie, qui prennent des mesures positives pour combler le fossé entre les riches et les pauvres, et ceux qui aggravent la situation, comme Singapour, la Hongrie, La Croatie ou l’Egypte.

Parmi les bons élèves, la Corée du Sud s’illustre particulièrement en ayant augmenté les impôts sur les plus hauts revenus et les entreprises, renforcé les dépenses destinées aux populations pauvres et revalorisé le salaire minimum de 16,4 %.

Dans l’ensemble, tous les pays, y compris les bons élèves, peuvent nettement mieux faire. C’est le cas de la France qui est 8ème au classement global mais au 22ème rang sur l’indicateur fiscal, 3ème en matière de dépenses sociales et 16ème sur l’indicateur relatif au droit du travail.

Alors que l’on constate partout dans le monde un creusement alarmant des inégalités – en 2017, 82% de la richesse créée dans le monde a été accaparée par les 1% les plus riches [2] – ce rapport place les Etats au cœur de la lutte contre les inégalités et a pour ambition de mettre sur la table des gouvernements des propositions politiques fortes.

Pour Manon Aubry, porte-parole d’Oxfam : « Les inégalités freinent la croissance économique, sapent la lutte contre la pauvreté et exacerbent les tensions sociales. D’après la Banque mondiale, à moins que les États ne s’engagent pour de bon et concrètement dans la lutte contre les inégalités, l’objectif visant à éradiquer la pauvreté extrême d’ici 2030 ne sera pas atteint et près d’un demi-milliard de personnes continueront de vivre dans une pauvreté extrême.

Avec ce rapport, nous voulons rappeler aux Etats leurs responsabilités dans la lutte contre les inégalités qui ne sont pas une fatalité car des solutions existent. Nous leur lançons un cri l’alerte pour qu’ils prennent ce problème à bras le corps. Nos responsables politiques, à commencer par Emmanuel Macron, déclarent la guerre aux inégalités à la tribune des plus grands sommets mondiaux. Cet indice permet de savoir s’ils joignent les actes à la parole !

Le plus frappant, c’est la clarté avec laquelle l’indice nous démontre que la lutte contre les inégalités n’est pas liée au fait d’être le pays le plus prospère ou à l’économie la plus florissante. Il s’agit bien davantage de volonté politique pour voter et appliquer des politiques qui comblent le fossé entre les ultra-riches et les pauvres. L’indice indique clairement qui œuvre en ce sens et qui ne le fait pas. »

L’autre constat majeur du rapport concerne les pays de l’OCDE, les « bons élèves » du classement, dans lesquels on observe une tendance à l’affaiblissement du soutien politique à des mesures progressives, qui se traduit par l’érosion des dépenses publiques, de la fiscalité et des droits du travail. La France n’échappe pas à cette tendance.

La France figure au 22ème rang sur l’indicateur fiscal, loin derrière l’Australie, le Danemark, l’Autriche ou encore l’Italie. Cela s’explique par un recours croissant à des impôts régressifs comme la contribution sociale généralisée (CSG), qui est collectée à un taux unique quels que soient les revenus des travailleurs et travailleuses. Dans le même temps, les impôts progressifs comme l’impôt sur les sociétés sont considérablement réduits. Par ailleurs la suppression de l’impôt sur la fortune (ISF) et la création d’un impôt forfaitaire sur le capital, dans le cadre de la réforme fiscale de 2017 risque de faire chuter la France au classement ERI dans les prochaines années.

Pour Manon Aubry, porte-parole d’Oxfam : « Le classement de la France symbolise la nouvelle approche adoptée par le pays en matière d’inégalités, où les politiques fiscales n’ont plus pour objectif de redistribuer les richesses et de financer les services publics mais plutôt d’attirer les investissements. La réforme fiscale injuste mise en œuvre par Emmanuel Macron ne va faire qu’accélérer cette tendance en réduisant dans des proportions inédites les impôts des Français les plus aisés. Pour preuve, un rapport récent de la World Inequality Database indique que pour la première fois depuis 1990 le taux d’imposition effectif des 10 % les plus riches en France a diminué en 2018 ! »

La France occupe la 3ème place en matière de dépenses sociales,principalement en raison de son investissement dans la protection sociale, soit plus de 43 % de son budget. Pour Manon Aubry : « A l’heure où notre Président s’interroge sur les montants des prestations sociales, le rapport montre le rôle absolument décisif des services publics dans la réduction des inégalités. Néanmoins ce filet de sécurité solide pourrait être mis à mal avec la réduction des recettes fiscales et les menaces croissantes de coupes budgétaires de la part des responsables politiques. La France pourrait ainsi compromettre sa place de leader et dégringoler au classement relatif aux dépenses publiques ».

Enfin en matière de droit du travail, la France arrive à la 16ème place, loin derrière l’Allemagne qui termine 4e. Toutefois, la France pourrait facilement remonter si elle prolongeait le congé paternité, actuellement limité à 11 jours, quand il est par exemple de cinq semaines au Portugal.

Pour répondre à la crise mondiale des inégalités qui sévit également fortement en France, Oxfam demande aux parlementaires et au Président Emmanuel Macron d’adopter trois mesures prioritaires :

  • Partager équitablement les richesses créées au sein des entreprises, entre dirigeant.e.s,salarié.e.s et actionnaires : en finir avec le versement de dividendes records et limiter les écarts démesurés de revenus au sein d’une même entreprise notamment par la transparence sur les écarts au moins par quartile, garantir un salaire décent à tous les travailleurs tout au long de la chaîne de production.
  • Renforcer les mesures de lutte contre l’évasion fiscale pour financer les services publics qui réduisent les inégalités : imposer la transparence fiscale aux entreprises, lister véritablement les paradis fiscaux et mettre fin à l’impunité fiscale pour les fraudeurs
  • Redistribuer équitablement les richesses par la défense d’un système fiscal juste et progressif: privilégier les impôts dont sont surtout redevables les plus riches, tels que l’impôt sur la fortune plutôt que des impôts injustes comme la TVA et assurer que les entreprises contribuent leur juste part d’impôts.

Contacts

Pauline Leclère
pleclere@oxfamfrance.org
07 69 17 49 63

Notes aux rédactions

[1] Classement de l’indice ERI sur 157 pays

Les 10 premiers pays :

  • Danemark
  • Allemagne
  • Finlande
  • Autriche
  • Norvège
  • Belgique
  • Suède
  • France
  • Islande
  • Luxembourg

Les 10 derniers pays :

  • Bangladesh
  • Singapour
  • RDP du Laos
  • Madagascar
  • Bhoutan
  • Sierra Leone
  • Tchad
  • Haïti
  • Ouzbékistan
  • Nigeria

 

 

 

 

 

 

[2] Rapport Oxfam « Partager la richesse avec celles et ceux qui la créent », 22 janvier 2018.

La méthodologie de l’indice de l’Engagement à la réduction des inégalités (ERI) est disponible sur demande.

L’indice se base sur les données les plus à jour disponibles fin 2017. La quasi-totalité des données sur la fiscalité et le marché du travail date de 2017.

Le groupe Development Finance International est une organisation à but non lucratif de promotion, de conseil et de recherche en matière de renforcement des capacités, qui travaille avec plus de 50 gouvernements et organisations internationales dans le monde. http://www.development-finance.org/

Oxfam est une confédération internationale travaillant avec des partenaires et les communautés locales dans plus de 90 pays pour mettre fin aux injustices qui génèrent la pauvreté.

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