Pourquoi doit-on (enfin) prendre au sérieux la levée des brevets sur les vaccins anti-Covid ?

Oxfam vous aide à démêler le vrai du faux dans le débat qui se poursuit autour de la levée des brevets sur les vaccins anti-COVID19.

Alors que la France affichait jusqu’à présent une position ambigüe vis-à-vis de la question de la levée des brevets, Emmanuel Macron a très récemment officiellement soutenu cette solution. La France a un rôle important à jouer au sein de l’Union Européenne (UE). Elle doit désormais affirmer sa position auprès de ses partenaires européens afin de tenter de convaincre l’ensemble des pays de l’Union de la pertinence de cette solution dans la lutte contre la pandémie. 

Alors que la pandémie du coronavirus continue de faire rage dans le monde, comme l’illustre la situation en Inde, les vaccins anti-Covid 19 sont toujours injustement répartis. A la mi-mai 2021, la majorité des doses administrées l’étaient dans les pays riches au détriment des pays en développement. Des pays tels que les Etats-Unis et la Grande Bretagne atteignent un taux de couverture vaccinale avoisinant les 50 % de la population ayant reçu une première dose, l’Union Européenne s’apprête pour sa part à atteindre un tiers de sa population. Pourtant, moins de 10 % de la population mondiale a reçu une première dose de vaccin, avec moins de 2 % de la population africaine. Un tel niveau d’inégalité vaccinale est un non-sens sanitaire car aucun pays ne sera à l’abri du virus et de ses différents variants tant que l’ensemble de la population mondiale ne sera pas vaccinée.

Le 6 mai dernier, le président américain Joe Biden s’est dit favorable à la demande portée par l’Inde et l’Afrique du Sud à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) de lever temporairement les barrières liées à la propriété intellectuelle pour les produits médicaux nécessaires pour faire face à la pandémie de coronavirus, dont les vaccins anti-covid. Cette annonce historique du président américain, espoir dans la lutte contre les inégalités vaccinales, a entraîné de nombreuses réactions en Europe, notamment celle du Président Emmanuel Macron. Après des mois à s’opposer à la proposition de l’Inde et l’Afrique du Sud à l’OMC, le Président français s’est dit « favorable à l’ouverture de la propriété intellectuelle » concernant les vaccins anti-covid. Néanmoins, ce soutien est resté ambigu durant plusieurs semaines. Le 10 juin, Emmanuel Macron a officiellement annoncé le soutien de la France à la levée des brevets.

Déconstruire les principaux arguments qui s’élèvent contre la levée des brevets

En reprenant les arguments souvent utilisés par les opposants à la levée des brevets, cet article a pour objectif de répondre au scepticisme français sur la demande de dérogation temporaire des droits relatifs à la propriété intellectuelle des vaccins anti-covid19.

Retrouvez toutes nos réponses ci-dessous, ou cliquez sur l’argument souhaité pour accéder directement à l’explication :

ARGUMENT N°1 : « La France, défenseure du vaccin bien public mondial, soutient depuis le début de la pandémie la levée de la propriété intellectuelle »

FAUX : Il est vrai que la France a très tôt déclaré que le vaccin anti-Covid19 devait être un bien public mondial et a été au cœur des dynamiques multilatérales telles que la création de l’Act-A et de Covax. Néanmoins, un an après ces grandes déclarations, force est de constater que le vaccin anti-Covid est loin d’être un bien public mondial. Pour le devenir il doit être libéré des monopoles détenus par les laboratoires pharmaceutiques.

Bien que le président français se soit déclaré favorable à la levée de la propriété intellectuelle à la suite de l’annonce des Etats-Unis, la position de la France est toujours ambiguë. Premièrement, elle n’a rien fait pour défendre la demande de dérogation portée depuis octobre par l’Inde et l’Afrique du sud à l’OMC. De plus, des membres du Gouvernement, dont la ministre déléguée à l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher, et le secrétaire d’Etat à l’Europe, Clément Beaune, se sont exprimés à plusieurs reprises contre la levée des brevets. Ce dernier ayant déclaré devant l’Assemblée Nationale que lever les brevets ne servait à rien. Le lendemain de l’annonce américaine et après s’être dit favorable, le Président Emmanuel Macron a continué de minimiser l’importance de la levée des brevets lors de sa conférence de presse du conseil social européen à Porto. En marge du sommet pour les économies africaines se tenant à Paris le 18 mai dernier, le président a appelé à lever toutes les barrières, notamment celles de la propriété intellectuelle, à la production des vaccins. Si la position  de la France est restée très ambigûe pendant plusieurs semaines, le 10 juin, Emmanuel Macron a officiellement annoncé le soutien de la France à la levée des brevets.

ARGUMENT N°2 : « Actuellement il n’y a plus de capacité de production disponible pour produire les vaccins »

FAUX : Pour répondre à la demande actuelle, les laboratoires pharmaceutiques ont dû produire en un temps record un nombre de doses de vaccins anti-Covid19. Tous les laboratoires ayant développé en premier des vaccins efficaces ont dû démarcher des sous-traitants pour pouvoir tenir leurs objectifs de production, à la fois pour contribuer à la production du sérum et à son flaconnage. Le vaccin Astra Zeneca mobilise plus d’une vingtaine de producteurs, notamment aux Etats Unis, Russie, Chine, Inde, Thaïlande et en Europe. Idem pour le vaccin Pfizer-BioNtech, produit notamment aux Etats-Unis, Chine, Singapour et en Europe.

Néanmoins, il est faux d’affirmer qu’il n’existe pas actuellement de capacité de production sous-exploitée. De nombreux contributeurs ont manifesté leur disponibilité pour contribuer à l’ « effort de guerre » et produire des vaccins anti-Covid19 si les laboratoires partageaient les technologies et savoir-faire. Des producteurs canadien, israélien, danois, bangladais, sud-coréen ou pakistanais ont essayé en vain de contribuer à la production mais ont été rejetés par les producteurs actuels, détenteurs des brevets. Le producteur israélien Teva, l’un des plus gros producteurs de médicaments génériques au monde, avait proposé de contribuer dès le début de l’année 2021. Le Canadien Biolyse annonçait pouvoir produire au moins 50 millions de doses par an de tous les vaccins anti-Covid actuels, soit ce qui serait nécessaire pour garantir une première dose à l’ensemble de la population d’Afrique du Sud. Selon un des consultants du laboratoire, si Biolyse avait eu le feu vert des producteurs actuels, il aurait fallu 6 mois à l’entreprise pour pouvoir se mettre en route et produire les vaccins anti-Covid19.

L’organisation américaine Knowledge Ecology International a identifié au moins 144 sites de production dans plus de 35 pays qui pourraient contribuer à la production des vaccins anti-Covid19. Grâce aux droits exclusifs liés à la propriété intellectuelle, les laboratoires fixent librement les règles du jeu. Ils contrôlent qui peut produire ou non leur vaccin, sélectionnent leurs partenaires. Ces monopoles limitent artificiellement les capacités de production disponibles.

ARGUMENT N°3 : « Les pays en développement n’ont pas de capacité de production mobilisable… » 

FAUX : C’est un vieil argument déjà utilisé à l’époque du combat pour rendre le traitement contre le VIH-Sida, les antirétroviraux, accessibles aux pays en développement. Les mêmes acteurs de l’industrie pharmaceutique, protégeant leurs droits liés à la propriété intellectuelle, soutenaient que les pays « du sud » ne pouvaient pas produire des médicaments de qualité. Or cet argument est faux, de nombreux pays tels que l’Inde, la Chine, le Brésil, l’Egypte, l’Indonésie, l’Afrique du Sud sont des grands pays producteurs de médicaments.

Il est vrai que le continent africain dispose de capacité de production plus limitées mais mobilisables, avec près de 10 fabricants produisant des vaccins, basés dans cinq pays, l’Afrique du Sud, Egypte, Maroc, Sénégal et la Tunisie, et environ 80 installations d’injectables stériles. L’un des exemples de capacité de production en Afrique est l’institut Pasteur de Dakar (IPD). Avec plus de 80 années d’expérience dans la production de vaccins, l’IPD est à la pointe de la lutte contre les maladies infectieuses. L’IPD est un pôle d’excellence notamment dans la production des vaccins contre la fièvre jaune que l’institut exporte sur le continent africain et dans le monde.

Concernant la production de vaccin anti-Covid19, la directrice générale de l’OMC, Ngozi Okonjo-Iweala, a affirmé que plusieurs pays dont le Pakistan, le Bangladesh, l’Indonésie, l’Afrique du Sud et le Sénégal avaient déclaré disposer d’infrastructures nécessaires pour produire des vaccins.

Il existe des capacités de production dans les pays en développement qu’il ne faut pas dénigrer. Affirmer le contraire relève d’une vision arrogante et dépassée des pays du Nord.

ARGUMENT N°4 : « Seuls les pays riches peuvent produire des vaccins à ARN messager »

FAUX : Plusieurs vaccins développés emploient la technologie de l’ARN messager, notamment les vaccins Pfizer et Moderna. Cette technologie est certes nouvelle et innovante, mais cela ne signifie pas qu’il est impossible de la développer dans le monde entier, notamment avec les producteurs de vaccins « traditionnels ». L’ancien directeur chimie de Moderna, Suhaib Siddiqi, a lui-même déclaré qu’avec un transfert de technologie et le partage des savoir-faire des producteurs habilités pourraient produire des vaccins à ARN messager en 3 à 4 mois.

Dès le début de la pandémie en avril 2020, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a lancé une initiative en faveur du partage de la connaissance pour faciliter les transferts de technologies : le groupement d’accès aux technologies contre la COVID 19 (C TAP). Cette initiative a été ostensiblement snobée par les laboratoires pharmaceutiques et les pays producteurs.

ARGUMENT N°5 : « La question de la propriété intellectuelle n’est pas d’actualité, elle devra être traitée plus tard quand on discutera des prix »

FAUX : Dire que la levée des barrières liées à la propriété intellectuelle n’est pas d’actualité est complètement faux. Des épidémiologistes du monde entier nous alertent : nous avons un an pour vacciner l’ensemble de la planète pour atteindre une immunité collective à l’échelle mondiale. Laisser des régions du monde peu ou pas vaccinées est dangereux pour nous tou-te-s car cela favorise l’apparition de variants potentiellement résistants aux vaccins existants.

Les droits exclusifs détenus par les laboratoires ne permettent pas seulement de fixer librement les prix, mais aussi de limiter artificiellement la production des vaccins. Plusieurs producteurs ont manifesté il y a plusieurs mois leur disponibilité pour contribuer. Les vaccins seraient en cours de production si la technologie était partagée.

L’Inde et l’Afrique du Sud, faisant face aux obstacles liés aux brevets et autres barrières liées à la propriété intellectuelle, ont déposé dès octobre la demande de dérogation à l’OMC. Depuis plus de 6 mois les pays riches repoussent les négociations, donc 6 mois perdus pour organiser le transfert de technologies et la mutualisation des savoir-faire à grande échelle et augmenter la production de vaccins disponibles. A chaque fois que les pays riches continuent à bloquer cette décision à l’OMC ce sont des doses qui ne sont ni produites, ni distribuées, et in fine des vies qui auraient pu être sauvées.

Avant même que les vaccins n’aient été développés, la société civile dont Oxfam, s’était mobilisée appelant, en vain, les pays riches qui commençaient à précommander des doses à imposer des conditionnalités aux contrats passés avec les laboratoires. Fort·e·s de l’expérience des années sida et de plusieurs décennies de combats pour casser les monopoles des grands groupes pharmaceutiques pour garantir un accès équitable aux médicaments. Pourtant cet appel n’a pas été entendu par les pays riches, notamment l’Union Européenne, qui a préféré maintenir le statu quo avec l’industrie pharmaceutique en pleine pandémie. Les laboratoires pharmaceutiques ont engrangé des milliards de profits, les pays riches ont réservé la grande majorité des doses existantes, les pays en développement ont faiblement eu accès aux doses et l’histoire s’est répétée.

La levée de la propriété intellectuelle, barrière juridique insensée en période de pandémie, était d’actualité en amont du développement des vaccins quand il fallait négocier les règles du jeu avec les laboratoires pharmaceutiques et instaurer un rapport de force favorable à l’intérêt général. Elle est toujours d’actualité pour augmenter la production et la disponibilité des vaccins à toute la population mondiale. Elle le sera à l’avenir pour casser les monopoles des grands groupes pharmaceutiques et produire des génériques à prix abordables.

ARGUMENT N°6 : « Contrairement aux Etats-Unis, la France a été très généreuse en nombre de partage des doses vers le reste du monde »

FAUX : Le Président Emmanuel Macron, lors de sa conférence de presse à Porto en mai, a déclaré que l’Europe était plus généreuse que les États-Unis en ayant exporté plus de la moitié des doses produites sur le sol européen. Alors que les États-Unis, qui venaient d’annoncer leur soutien à la demande de dérogation portée par l’Inde et l’Afrique du Sud, avaient mis en place des barrières à l’exportation, limitant la production de vaccin.

Il est vrai que certains pays, pour sécuriser la vaccination de leur propre population, ont mis en place des mesures bloquant l’exportation des vaccins et des produits nécessaires à leur production. C’est le cas des Etats-Unis mais également de l’Inde qui a bloqué l’exportation des vaccins produits par le Serum Institute of India pour le compte d’Astra Zeneka, pour répondre à l’aggravation de la situation dans le pays.

Ces mesures ne vont pas dans le bon sens. Les pays devraient faire preuve de coopération et tout faire en sorte pour que le monde produise plus de vaccins. Néanmoins, elle illustre tristement la compétition vaccinale lancée depuis plusieurs mois, et dans laquelle l’Europe a été l’un des acteurs. Depuis des mois les pays riches ont réservé la quasi-totalité des doses disponibles avec des accords bilatéraux avec les producteurs, se sont opposés à la demande portée par l’Inde, l’Afrique du Sud et une centaine de pays du Sud de libérer les brevets, et n’ont pas contribué suffisamment aux mécanismes de solidarité internationale créés pour distribuer les doses de vaccins aux pays les plus pauvres. Face à l’égoïsme vaccinal, nous sommes tou·te·s perdant·e·s.

L’UE n’a pas exporté les doses produites en Europe par altruisme. Il s’agit de doses produites par les laboratoires pharmaceutiques sur le sol européen faisant l’objet de contrat avec d’autres pays non-membres. L’UE ne les a pas « données » elle n’a juste pas bloqué leur exportation. Interdire leur exportation aurait d’ailleurs pu s’avérer dangereux car l’Europe bénéficie également d’importations de vaccins et de matière première.  De plus, lorsque qu’on regarde les pays vers lesquels ces doses ont été exportées il s’agit en grande majorité d’autres pays riches. Sur les 200 millions de doses exportées par l’UE plus de la moitié correspond seulement à trois pays partenaires : le Japon, la Grande Bretagne et le Canada. Clément Beaune, secrétaire d’Etat à l’Europe a déclaré « Combien de doses les Etats-Unis ont-ils exporté ? Zéro. Combien de doses l’Europe et la France ont-elles exportées vers les pays d’Afrique, vers les pays qui en ont besoin ? 200 millions ». Or, dans la quarantaine de pays vers lesquels les doses produites dans l’UE ont été exportées, seulement un pays d’Afrique était concerné : l’Afrique du Sud. L’Europe ne bloque peut-être pas l’exportation des doses, néanmoins elle continue de bloquer l’exportation des technologies et savoir-faire en s’opposant à la demande de dérogation à l’OMC.

La grande majorité des doses distribuées dans les pays les plus pauvres l’ont été par le mécanisme COVAX, pilier vaccin de l’initiative Act-A.  L’UE, à travers les contributions des Etats-membres et de la contribution de la commission européenne, contribue à hauteur de 4 milliards de dollars. Elle est derrière les Etats-Unis avec une contribution de 5,2 milliards de dollars, contrairement à ce qu’affirmait le président Emmanuel Macron dans son discours de Porto. Cette contribution européenne cache une importante disparité, car plus de la moitié correspond à la contribution de l’Allemagne. La France, à la mi-mai 2021, ne contribuait qu’à hauteur de 180 millions, soit 15 % de ce qu’on pourrait attendre d’elle. Le mécanisme Act-A souffre d’un manque de financement de 15 milliards de dollars, mettant en danger l’atteinte de ses objectifs en matière d’accès aux vaccins dans les pays les plus pauvres. Enfin, le Président Biden a récemment annoncé que les Etats-Unis qu’il enverrait 80 millions de doses dans le monde, loin des 500 000 doses promises par la France en don de doses.

ARGUMENT N°7 : « La levée des brevets fragilise les laboratoires pharmaceutiques et risque de freiner l’innovation en matière de production de médicament »

FAUX : Les laboratoires pharmaceutiques se sont enrichis du fait de la crise sanitaire actuelle. Oxfam a calculé que Pfizer, Johnson & Johnson et AstraZeneca ont versé 26 milliards de dollars à leurs actionnaires au cours des 12 derniers mois. Les vaccins contre le COVID ont fait émerger 9 milliardaires avec une richesse totale supérieure à 19 milliards de dollars. Cette somme correspond à ce qui serait nécessaire pour vacciner l’ensemble de la population dans les pays à faible revenu. Aux premières places de la liste des nouveaux milliardaires se trouvent les PDG de Moderna, le français Stéphane Bancel, et de BioNTech, chacun avec une richesse de plus de 4 milliards de dollars. Les vaccins à ARN messager de Moderna et Pfizer-BioNTech sont en passe de devenir deux des trois produits pharmaceutiques les plus vendus au monde. Les entreprises prévoient des revenus de 33,5 milliards de dollars en 2021 grâce à leurs vaccins. L’industrie s’est donc fortement enrichie du fait de la crise sanitaire.

Or, dans le cas des vaccins anti-Covid, le développement et l’innovation ne se sont pas faits à risque par les laboratoires pharmaceutiques. Moderna, Pfizer-BioNtech, Johnson & Johnson, Novovax et Oxford-Astra Zeneca ont reçu des milliards de dollars de financement public et des précommandes garanties, dont 12 milliards de dollars du seul gouvernement américain. Ils ont également mis à profit de nombreuses années de recherche et de développement financées par des fonds publics. Les chercheurs des universités unis pour les médicaments essentiels ont découvert que 3 % seulement des coûts de R&D pour développer le vaccin Oxford-Astra Zeneca et sa technologie sous-jacente étaient financés par le secteur privé. Il est donc indécent de continuer à défendre les profits faramineux de l’industrie pharmaceutique, rendus uniquement possible par l’argent public, alors que le monde fait face à une pandémie si dévastatrice que celle de la Covid19.

Enfin, cette pandémie rappelle que le système actuel de développement et production de médicaments ne permet pas de garantir le droit universel à la santé pour tou·te·s. Cette crise doit être l’occasion de repenser un système guidé par les besoins de santé publique et le droit à la santé plutôt que les profits de l’industrie pharmaceutique.

ARGUMENT N°8 : « Lever les brevets ne sert à rien »

FAUX : La levée des brevets est un premier pas essentiel. Mais seule, elle ne sera pas suffisante pour augmenter la production des vaccins. D’ailleurs ce n’est pas ce que demandent les défenseurs de la proposition de dérogation à l’OMC. La levée des brevets est la première étape pour lever les obstacles juridiques maintenant les monopoles des grands groupes pharmaceutiques sur les technologies développées pour produire les vaccins. Une fois les droits liés à la propriété intellectuelle levés, les Etats doivent identifier les capacités de production sous-exploitées et organiser le transfert des technologies et des savoir-faire. Les Etats peuvent ainsi rejoindre le C-TAP et demander aux laboratoires d’y contribuer. Enfin, pour réduire les inégalités vaccinales et garantir une juste répartition des doses dans le monde, les Etats doivent contribuer à hauteur de leur richesse au mécanisme Act-A et redistribuer les doses excédentaires qu’elles ont réservées.

La levée des brevets n’est donc pas une fin en soi mais une première étape nécessaire. Face à la course contre la montre dans laquelle nous sommes, il n’y a pas de temps à perdre. Les pays riches doivent suivre l’exemple des Etats-Unis et soutenir la demande de dérogation lors de la prochaine réunion de l’OMC des 8 et 9 juin prochain.

En finir avec l’égoïsme vaccinal, dans l’intérêt de toutes et tous

Face à ce virus, nous sommes dans une course contre la montre. Nous avons un an pour vacciner l’ensemble de la planète. Face à ce défi, aucune barrière juridique protégeant les monopoles des grands groupes pharmaceutiques ne peut primer sur l’intérêt général de l’humanité. En tant que pionnière dans la défense d’un bien public mondial, la voix de la France est attendue. Les prochaines semaines sont jalonnées de rendez-vous internationaux décisifs pour rapidement s’accorder sur une levée des brevets. Aux côtés des Etats-Unis et d’alliés européens tels que l’Espagne, la France, à travers la voix d’Emmanuel Macron doit apporter un soutien clair et sans équivoque à la demande de dérogation portée par l’Inde, l’Afrique du Sud et une centaine de pays en développement.