Le jeudi 5 janvier 2023, deux grandes entreprises financières – le Crédit Mutuel Alliance Fédérale et la MAIF – ont annoncé consacrer une partie de leurs bénéfices à la transition écologique et sociale. On fait le point sur ces deux annonces. 

 

Dividende sociétal et dividende écologique : une bonne nouvelle pour la planète et les plus précaires… mais beaucoup reste à faire !

 

Le Crédit Mutuel Alliance Fédérale a annoncé la création du “dividende sociétal”, consistant à consacrer 15% de son résultat net à un fonds pour la transition écologique et sociale. Le Crédit Mutuel devient la première banque et entreprise française à consacrer une part aussi importante de ses bénéfices à la société. Cette année, ce seront près de 500 millions d’euros consacrés à la transition écologique et sociale. 

 

Cette annonce a été accompagnée le même jour par celle de la MAIF qui crée un “dividende écologique”, qui consiste à affecter 10% de leurs bénéfices à des projets de solidarité climatique et de protection de la biodiversité, soit près de 10 millions d’euros pour 2022. La MAIF devient de son côté le premier assureur à consacrer une part si importante de ses bénéfices à lutter contre le dérèglement climatique. 

 

Plafonner les bénéfices pour financer la transition écologique et sociale : une demande d’Oxfam France depuis 2020

 

Ces annonces, nous ne pouvons que nous en réjouir, car ce “dividende sociétal” répond à une des demande d’Oxfam France formulée dès 2020, dans notre rapport “CAC 40 Des profits sans lendemain”, qui consiste à plafonner la part de bénéfices allant aux actionnaires, pour financer la transition écologique, sociale et climatique.  

 

Nous avions déjà constaté que, tandis que l’investissement dans les entreprises du CAC 40 avait baissé de 5% entre 2009 et 2018, le versement de dividendes aux actionnaires avait lui augmenté de 70% sur la même période. Un tiers du CAC 40 avait même versé des dividendes au moins une fois sur la période, alors qu’ils affichaient des pertes. Cette pression de rentabilité croissante de la part des actionnaires s’est donc faite au détriment de l’investissement, au détriment de la société et de la planète. 

 

Pourtant, le Carbon Disclosure Project (CDP) évaluait en 2020, dans leur rapport “Doubling Down”, que les entreprises européennes devaient consacrer 25% par an de leurs investissements dans la transition écologique, pour atteindre les objectifs de l’Union Européenne en matière climatique. En prenant en compte cette méthodologie, nous avions calculé que, en 2018, ces besoins en investissement aurait pu être couverts à 98% si les entreprises du CAC 40 avaient plafonné le versement de dividendes à 30%. Autrement dit, 70% de ce qui avait été versé aux actionnaires en 2018 aurait suffit à combler les besoins en investissement pour la transition écologique.

 

Une avancée à saluer, mais insuffisante 

 

Si cette initiative va clairement dans le bon sens, elle doit s’accompagner d’une politique de l’entreprise en phase avec cet engagement. En effet, en matière climatique, une banque aura un impact plus significatif en cessant tout soutien financier à des entreprises qui développent de nouveaux projets d’énergies fossiles, car l’inverse est incompatible avec un scénario à un 1.5°C, aligné avec l’Accord de Paris.

 

C’est pour cela que nous continuons ainsi de demander au Crédit Mutuel Alliance Fédérale, comme à toutes les banques, de cesser tout soutien financier à des entreprises qui développent de nouveaux projets fossiles. Si les banques souhaitent réduire réellement leur impact, il est nécessaire de regarder l’essence même de leur activité : le financement et l’investissement. Si une banque procède à un soutien financier à l’exploration et l’exploitation  d’énergies fossiles, alors son  activité est incompatible avec un scénario 1,5°C. 

 

S’il est bien de flécher une partie de ses bénéfices vers des projets verts, c’est un jeu à somme nulle si la banque continue de soutenir financièrement des entreprises qui développent des projets néfastes pour la planète, et par extension néfastes pour la société. 

 

Le dividende sociétal et écologique sont donc un pas vers la bonne direction mais cela doit être un début de réponse à l’immense défi qu’est la transition écologique et sociale.