Les financements, au cœur des tensions à la COP24

La question des financements revient inlassablement au cœur des débats lors de toute négociation internationale sur le climat, et ne cesse de cristalliser les tensions. La COP24 ne fera pas exception.

La solidarité climatique, socle de la confiance entre les Etats

En 2009 à Copenhague (Danemark), les pays riches ont ainsi promis 100 milliards de dollars par an d’ici 2020 aux pays en développement pour leur action climatique. En 2016, seuls 56 milliards de dollars de financements publics ont été fournis, et ce chiffre cache une vaste majorité de prêts. Pourtant, le respect de cette promesse constitue le socle de la confiance entre les Etats.

Les financements promis par les pays riches doivent permettre aux pays en développement de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, mais aussi de s’adapter aux impacts des changements climatiques.

Ces soutiens sont d’autant plus cruciaux que les plus vulnérables de par le monde sont déjà frappés de plein fouet par des sécheresses, inondations, ou tempêtes. C’est bien là l’injustice ultime du changement climatique : ce sont ceux qui ont le moins contribué au problème qui s’en trouvent être les premières victimes, alors même qu’ils n’ont pas les moyens d’y faire face. Les financements sont un gage de solidarité entre les pays riches, responsables historiques des changements climatiques, et les pays en développement qui en sont les premières victimes.

Ils permettent aussi de soutenir des projets agricoles, énergétiques, de développer des infrastructures dont on sait qu’elles sont cruciales pour aider les populations vulnérables, en particulier les femmes, à affronter les effets dévastateurs des changements climatiques.

Des actions directes sur le terrain pour permettre l’adaptation au changement climatique

Oxfam mène des projets d’atténuation et d’adaptation qui permettent de rendre concrète l’action climatique, et de changer durablement les conditions de vies de populations vulnérables.

Ainsi, au Malawi, Oxfam fait partie d’un consortium qui intervient auprès de 3 000 paysans et paysannes, dont une majorité de femmes, pour accroître leur accès à l’énergie solaire. Le programme a déjà installé des systèmes d’irrigation alimentés par l’énergie solaire pour des agriculteurs et agricultrices jusqu’alors tributaires des précipitations. Il a également mis en place des centres de transformation alimentés par l’énergie solaire pour le beurre d’arachide, le soja et l’huile de tournesol. L’accès à l’énergie solaire s’est traduit par une augmentation des revenus des paysannes grâce à une productivité accrue et en leur permettant d’apporter une valeur ajoutée aux produits par le biais de la transformation.

Les financements, pierre angulaire des négociations lors de la COP24

Les financements seront omniprésents lors de la COP24. Les Etats doivent s’accorder sur les règles d’application de l’accord de Paris signé lors de la COP21 en 2015, et dans ce cadre sont négociées les modalités liées à la comptabilisation et la prévisibilité des financements. Ces questions, d’apparence technique, ont une portée extrêmement politique.

Par ailleurs, les pays en développement attendent de la part des pays riches de réels signaux en faveur de l’atteinte de l’objectif des 100 milliards de dollars d’ici 2020. Ces signaux sont en particulier cruciaux pour l’adaptation aux changements climatiques, qui représente aujourd’hui à peine un quart des financements.

Le sujet du Fonds Vert sera aussi au cœur des débats, puisqu’arrivant au bout de ses financements initiaux, le Fonds commencera sa recapitalisation en 2019. Seuls l’Allemagne et le Japon se sont déjà engagés à y contribuer, les autres pays ne s’étant à ce jour pas prononcés. A ce jour, le Fonds Vert a mobilisé 10,2 milliards de dollars de ressources, et nous surveillerons particulièrement les déclarations à venir de la France qui en est le cinquième contributeur.

Des tensions sur les financements qui ne se résument pas à une ligne de fracture entre pays développés et pays en développement

Les négociations sur les financements font souvent apparaitre un clivage entre pays développés et pays en développement mais les différents peuvent être divers, comme sur la question de la comptabilisation des financements.

Aujourd’hui les pays riches se contentent de reporter le montant total des financements qu’ils fournissent, y compris sous forme de prêts sur lesquels ils récupèrent des remboursements avec intérêts. Cette pratique leur permet de déclarer des montants bien plus élevés que la valeur nette du soutien accordé aux pays en développement. Ainsi, sur 2015-2016, Oxfam estime que la valeur nette des financements fournis est en réalité 2 à 3 fois plus faible que les montants reportés, et ne dépasse pas 16 à 21 milliards de dollars par an.

Si les pays en développement s’accordent sur l’importance d’améliorer la transparence sur les financements, les Etats-Unis, l’Australie et le Japon, ont de leur côté proposé un texte commun excluant toute avancée sur ce plan. La plupart des autres pays riches ont jusqu’ici saisi cette opportunité pour se cacher derrière ce texte et rester silencieux… Pourtant les Etats vont devoir s’atteler sérieusement à la tâche, et rapidement. Alors que toutes les décisions dans le cadre des négociations climatiques doivent être adoptées à l’unanimité, les divergences sur ce sujet – parmi tant d’autres – illustrent l’ampleur de la tâche pour cette COP24.

Les Etats sont face à leurs responsabilités : les financements sont au cœur des négociations et la COP24 ne saurait être un succès sans réelle avancée sur ces enjeux.