« Où sont passés nos 10% ? »

Le 10 juillet dernier a marqué les 10 ans de la déclaration de Maputo : un engagement des Etats africains à soutenir l’agriculture. L’occasion, avec notre campagne CULTIVONS, de faire le bilan et de demander des comptes.
Eric Hazard, responsable de la campagne CULTIVONS en Afrique de l’Ouest, nous en dit plus :

Quand mes enfants me demandent ma profession, j’aime leur dire souvent en souriant que je suis un paysan de bureau. Je ne cultive ni riz, ni maïs, ni fruits ou légumes, je n’élève pas de troupeaux de moutons… Mais dans mon bureau tous les jours je cultive des idées, des études pour que les paysans africains qui nourrissent l’Afrique en produisant 90% de aliments de base dans des conditions techniques et climatiques difficiles soient reconnus et soutenus par l’Etat et les populations. Pour moi, la campagne CULTIVONS que je coordonne en Afrique de l’Ouest a un objectif particulier : appuyer les organisations paysannes et pastoralistes à améliorer leurs conditions de travail en s’adaptant aux aléas du changement climatique. C’est dans ce sens que nous avons lancé le 10 juillet une nouvelle campagne : « Où sont passés nos 10% ? » pour rappeler aux chefs d’Etats africains leurs engagements pris à Maputo, il y a dix ans.

Dix ans plus tard…

En 2003, les éleveurs et paysans africains avaient accueilli avec beaucoup d’enthousiasme et d’espoir la déclaration faite par les chefs d’Etat d’accompagner l’agriculture et l’élevage et lui permettre de contribuer à la souveraineté alimentaire des Etats africains. L’une des mesures phares était l’engagement « d’adopter des politiques saines de développement agricole et des politiques saines de développement agricole et d’allouer chaque année au moins 10% de nos budgets nationaux à leur mise en œuvre, dans un délai de cinq ans« . Dix ans plus tard, le constat est amer ! Seuls sept pays africains (Burkina Faso, Niger, Guinée, Sénégal, Mali, Malawi et Ethiopie) ont respecté leur promesse. Et pourtant, en Afrique de l’Ouest, les petits agriculteurs et éleveurs occupent plus de 60% de la population active et contribuent à 30% du PIB. Peut-on encore les ignorer ?

Au delà du chiffre symbolique des 10%, il faut regarder comment ces dépenses sont effectuées ! La encore, les progrès sont limités : les rares ressources allouées à l’agriculture alimentent essentiellement des budgets de fonctionnement, en lieu et place de vrais investissements qui bénéficient aux éleveurs et paysans. Mais surtout l’Aide publique au développement continue de représenter jusqu’à 70% des budgets agricoles ! Ceci n’est pas durable… Durant les cinq mois à venir, en Afrique de l’Ouest, la campagne CULTIVONS va faire entendre les voix des paysans et éleveurs de la région pour qu’en 2014 la part des budgets nationaux alloués à l’agriculture augmente et bénéficie directement aux petites exploitations familiales et éleveurs. Alors c’est parti, pour cinq mois intenses de recherche, plaidoyer, lobbying auprès des décideurs, travail médiatique et mobilisation populaire ! Cinq mois pour faire du bruit autour du rôle des exploitations familiales et éleveurs avec des réseaux engagés comme Apess, RBM, Poscao et avec des organisations comme Wildaf. Les paysans et éleveurs ouest-africains ont besoin de vous ! Alors, mobilisez-vous pour demander aux Etats de respecter leur engagement. Merci à tous les paysans de bureau, du dimanche ou de cœur de soutenir la campagne « Où sont passés nos 10% » en la diffusant sur les réseaux sociaux. Vous pouvez également suivre la campagne CULTIVONS en Afrique de l’Ouest sur :