Réponse de la BNP Paribas à notre campagne « Banques : la faim leur profite bien »

A l'occasion du lancement de la campagne Banques : la faim leur profite bien, Oxfam France a été amenée à entamer un dialogue avec les principales banques françaises.

A la veille du lancement de la campagne, Monsieur Jean-Laurent Bonnafé, Administrateur Directeur Général de la BNP Paribas, a adressé un courrier officiel à Luc Lamprière, directeur général d'Oxfam France.
A sa demande, nous publions cette réponse sur notre site (en téléchargement en bas de cet article).

Plusieurs éléments intéressants sont à noter dans cette réponse :

  • La BNP Paribas ne conteste pas le chiffre issu des recherches menées par Oxfam France, et confirme qu'elle gère, via des fonds indiciels, un total de près d'un milliard et demi d'euros investi sur les matières premières. Le montant investi sur les matières premières purement agricoles s'élèverait, selon à la BNP Paribas, à 411 millions d'euros, soit environs 30% des montants investis sur les matières premières via ses fonds indiciels. Oxfam France avait été en mesure de faire ces calculs pour les fonds gérés par d'autres banques, comme la Société Générale ou Natixis. Pour la BNP Paribas, l'opacité de la composition des portefeuilles des fonds incriminés rendait le calcul impossible. Le fait que la BNP Paribas nous communique aujourd'hui ce chiffre constitue donc une avancée majeure en termes de transparence.
  • La BNP Paribas explique que les sommes investies dans les fonds indexés sur les matières premières agricoles ne sont pas investies pour compte propre, mais pour le compte de ses clients. C'est tout à fait ce qu'expliquait Oxfam France dans son rapport, et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous demandons aux pouvoirs publics français d'interdire, dans le cadre du projet de réforme bancaire, non seulement la spéculation sur les matières premières pour compte propre (ce qui est prévu dans le projet de loi) mais aussi la spéculation sur les matières premières menées par les banques pour le compte de clients (ce qui correspond à la quasi-totalité des opérations spéculatives menées sur les marchés agricoles, et n'était, dans le projet du gouvernement, pas concerné par le projet de réforme bancaire). Il convient de rappeler que ces activités spéculatives sur les marchés agricoles, qu'elles soient menées pour compte propre ou pour le compte de clients, ont strictement les mêmes impacts sur la sécurité alimentaire mondiale.
  • La BNP Paribas explique qu'elle vend à ses clients des produits financiers leur permettant d'investir sur le long terme. L'horizon de placement recommandé est de 5 ans, et les frais d'entrée décourageraient les clients à vendre et à racheter rapidement leurs parts. Nous ne pouvons que nous féliciter de constater que le BNP Paribas n'incite pas ses clients à spéculer eux-mêmes sur le court terme. De fait ce n'est pas nécessaire, puisque les gestionnaires de ces fonds s'en chargent pour eux – c'est dans la nature même de ces produits. Même investis sur 5 ans, les montants investis dans ces fonds, indépendamment de la durée du placement, permettent en effet une activité de spéculation constante sur les denrées agricoles. C'est cette activité qui est un facteur de volatilité et explique que ces fonds participent à la hausse des prix alimentaires sur le long terme.
  • La BNP Paribas annonce qu'elle suspend, dès le 11 févier 2013, les souscriptions sur le fonds indiciel Parvest World Agriculture, qui permettait à ses clients d'investir à 100% sur les matières premières agricoles. Elle annonce également qu'elle va fermer un fonds indiciel appelé Easy ETF Ultra Light Energy, qui permettait à ses clients d'investir à plus de 40% sur les matières premières agricoles. Oxfam France se félicite de ces annonces, et considère que la BNP Paribas fait preuve de la responsabilité dont devraient faire preuve l'ensemble des banques françaises désireuses de lutter pour le respect du droit à l'alimentation de centaines de millions de personnes. Néanmoins, la BNP Paribas reste un acteur bancaire majeur sur les marchés agricoles et alimentaire, et Oxfam France lui demande d'aller encore plus loin, en fermant l'intégralité de ses fonds indexés, même partiellement, sur le cours des matières premières agricoles.

Au cours de la campagne, Oxfam France adressera à la BNP Paribas et à l'ensemble des banques françaises d'autres demandes concernant d'autres secteurs de l'activité bancaire. En particulier, Oxfam France demandera aux banques françaises de :

  • cesser d'octroyer des financements aux entreprises produisant des agrocarburants dont la demande croissante contribue fortement à la volatilité des prix alimentaires, et constitue le principal moteur de l'accaparement des terres.
  • retirer de leurs fonds d'investissement socialement responsable (ISR) les actifs relatifs aux entreprises produisant, transformant ou commercialisant des agrocarburants, ainsi que les actifs relatifs aux entreprises ayant été accusées d'avoir accaparé des terres.