Le système agricole alimente la faim et les inégalités

Tandis que l’urgence climatique se rappelle à nous chaque jour, des scientifiques ont démontré que notre modèle agricole et alimentaire mondial accentue la dégradation de l’environnement mais aussi les inégalités et la pauvreté. Amorcer une transition écologique juste et repenser le système agricole devient donc inévitable.

Oxfam se mobilise chaque jour en ce sens pour défendre un système agricole soutenable, basé sur l’agroécologie, qui permette à la fois de nourrir 9 milliards d’individus à horizon 2030, tout en respectant les droits fondamentaux des agriculteurs et des agricultrices du monde entier et en leur permettant de vivre de leur travail et de manger à leur faim.

Un système agricole défaillant, qui alimente les inégalités, la faim et les changements climatiques

Si nous ne changeons rien à notre façon de produire et de consommer, les émissions de gaz à effet de serre issues du secteur agroalimentaire pourraient augmenter de 30 à 40 % d’ici 2050, alors qu’elles représentent aujourd’hui déjà un tiers des émissions globales.

Ce système, qui alimente la crise climatique, est également défaillant sur le plan social car largement inégalitaire. Le système agroalimentaire actuel est basé sur la domination du modèle industriel friand en énergies fossiles et concentre les richesses entre les mains d’un petit nombre d’acteurs, laissant pour compte les plus petits producteurs.

Les agricultrices et agriculteurs forment en effet un groupe hétérogène et interviennent dans des marchés très divers. À l’échelle mondiale, plus de 80 % des agricultrices et agriculteurs familiaux opèrent dans les marchés alimentaires locaux et nationaux. Ils agissent généralement en dehors de structures de marché « modernes » et ne sont donc pas en mesure de participer facilement (ou ne le souhaitent pas) à des chaînes de valeur formelles.   En conséquence, l’agriculture familiale, mise en concurrence par des exploitations de taille industrielle et ultra-subventionnées est souvent écrasée par le marché, touchée par la pauvreté et entrainée malgré elle dans un système qui contribue  à aggraver la crise climatique.

Comble de l’ironie, ces agriculteurs qui nous nourrissent souffrent eux-mêmes de la faim.

Une action politique nécessaire qu’Oxfam appel de ses vœux

A ce titre, l’alimentation devient donc un sujet politique. Depuis les crises des prix alimentaires de 2007-2008 puis 2010-2011, les gouvernements ont focalisé leurs réponses pour lutter contre la faim autour de l’augmentation de la production agricole, sans régler le problème de répartition et d’accès à l’alimentation.

La journée mondiale de l’alimentation, le 16 octobre de chaque année, est l’occasion de rappeler ces faits. Oxfam dénonce ce système agricole et alimentaire qui ne tient compte ni de ses travailleurs, ni de la cause climatique, et demande à ce qu’il soit mis fin aux dérives politiques qui le gangrène et notamment au poids démesuré des multinationales de l’agroalimentaire.

Témoins au quotidien de ses conséquences, nous ne pouvons rester silencieux. Nous sommes aussi les porteurs de solutions concrètes, durables et efficaces et notre rôle est, ensemble, de les défendre jusqu’à ce qu’elles soient mises en œuvre.

Recrudescence de la faim dans un monde d’abondance

En 2018, 1 personne sur 9 a souffert de la faim alors que nous produisons paradoxalement assez pour nourrir la planète.  Et l’Afrique reste le continent le plus touché par la faim, qui frappe presque 21,5 % de la population.

Le fait que le nombre de personnes souffrant de la faim a augmenté en 2018, et ceci pour la 3e année consécutive, est donc le résultat d’un échec politique à résoudre les problèmes structurels du système agricole et alimentaire mondial  et à ignorer la diversité des besoins et aspirations des paysans et agriculteurs.

Les femmes plus durement touchées par l’insécurité alimentaire

La sécurité alimentaire n’a pas la même importance pour les hommes et les femmes. Oxfam, dans son rapport «Inégalités de genre et insécurité alimentaire» , montre que les femmes sont les premières à souffrir de l’insécurité alimentaire.

Elles jouent pourtant un rôle crucial dans l’agriculture en représentant près de la moitié de la main d’œuvre agricole dans les pays en développement – mais moins de 13% d’entre elles possèdent la terre qu’elles cultivent – et en nourrissant des centaines de millions de personnes à travers le monde.

Elles sont 613 millions à souffrir d’anémie, en raison d’une alimentation trop pauvre en fer. Dans bien des foyers, les femmes mangent moins, en dernier, et sont les premières à réduire leur ration alimentaire lorsque leur famille se retrouve à court de nourriture. 

Pourtant, les politiques de soutien au secteur agricole sont loin de soutenir les agricultrices et de contribuer ainsi à la réduction de la faim et des inégalités. Oxfam a analysé en 2017 les données des projets européens d’aide au développement dans le secteur agricole et a montré que seulement 2 à 3 % de l’aide européenne ont été dédiés à la réduction des inégalités de genre dans l’agriculture.

En plus d’échouer à assurer que tous individus mangent à leur faim, en première ligne desquelles se trouvent les femmes, le système agro-alimentaire actuel entretient considérablement la crise climatique, et ne fait donc que renforcer la vulnérabilité des populations les plus modestes.

Dans les pays les plus pauvres, les agricultrices sont seulement 13% à posséder les terres qu'elles cultivent.

Le système agricole et alimentaire, victime et bourreau des changements climatiques

Les changements climatiques alimentent la faim dans le monde

Les changements climatiques sont responsables d’une sécheresse accrue des terres et d’une baisse de leur fertilité, impactant dès lors les rendements, la qualité nutritionnelle des cultures et les prix.

La FAO estime que le nombre de personnes risquant de souffrir de la faim augmentera de 10 % à 20 % d’ici 2050 en raison des changements climatiques. Or plus nous tardons à réduire nos émissions de gaz à effet de serre, notamment en modifiant en profondeur le système agricole et alimentaire industriel , plus les impacts de la crise climatique seront forts.

Jusqu’à un tiers des émissions de gaz à effet de serre sont issues du système agricole et alimentaire

De la fourche à la fourchette, un tiers des émissions de gaz à effet de serre sont imputables au système agro-alimentaire.

Le mode de production extrêmement polluant. Le modèle commercial mondialisé et concentré et la tendance à la surconsommation de produits d’origine animale dans les pays du Nord sont largement responsables de ces émissions. Les 5 plus importantes entreprises de viande et produits laitiers au monde émettent ensemble chaque année plus d’émissions de gaz à effet de serre que les trois géants de l’industrie pétrolière ExxonMobil, Shell et BP.

Pourtant, il en va des responsables politiques d’offrir un accompagnement et une régulation afin que les façons d’appréhender notre production agricole et notre consommation constituent des solutions à la crise climatique.

L’agroécologie, une clé pour éradiquer la faim et réduire les émissions de gaz à effet de serre

Pour être efficace, la solution doit être politique, systémique et revêtir un caractère d’urgence.

Les Etats doivent développer une nouvelle approche qui allie « faim zéro » et « zéro émission de gaz à effet de serre ». Pour cela, il est indispensable qu’ils encouragent l’agroécologie, qui s’appuie sur le savoir paysan.

A travers l’agroécologie, il s’agit de tirer le meilleur de la nature, sans la dégrader, tout en augmentant les rendements grâce à une diversité de cultures sur une même parcelle, et l’utilisation de semences adaptées à un terroir. L’agroécologie, dans le même temps, aide les populations à lutter et à s’adapter face aux changements climatiques.

Mais pour être optimale, l’agroécologie doit pouvoir s’adosser à des circuits de distribution plus équitables, qui garantissent un juste partage de la valeur ajoutée au sein des différentes filières et jouent un rôle dans la réduction de la pauvreté.

Ce ne sont pas des changements à la marge qui permettront au système alimentaire mondial de se rééquilibrer. Il est impossible de nier les interdépendances entre notre agriculture, notre surproduction et notre consommation, et les conséquences néfastes qu’elles ont sur les populations et le climat . Il est urgent de repenser en profondeur nos modes de production agricole et de distribution alimentaire, dans le respect de la nature et de l’humain.

Découvrez notre rapport complet. 

Climat, inégalités, faim, pauvreté, un même combat que nous portons ensemble !

L’urgence climatique est là, donnons dès maintenant aux agricultrices et aux agriculteurs les moyens de s’adapter face aux changements climatiques qui ont des incidences directes sur leur activité et leurs moyens de subsistance. Il est indispensable qu’une part plus importante des financements climat soit consacrée à l’adaptation aux changements climatiques.

Pour l’heure, seuls 3 dollars par personne et par an sont versés par la communauté internationale aux populations les plus vulnérables pour les aider à se protéger face aux conséquences dévastatrices du dérèglement global des températures.

Rejoignez un mouvement déterminé en demandant à Emmanuel Macron et à l’ensemble de la classe politique française d’agir. Un mot d’ordre : climat, inégalités, faim, pauvreté sont un seul et même combat !

Des urgences humanitaires aux programmes de soutien à l’agriculture paysanne et familiale sur le long terme et à la défense des droits et de la place des agricultrices, Oxfam est présente à travers le monde pour soutenir, au quotidien, un modèle agricole durable et juste.

Ces réalités, ces voix et les solutions que nous connaissons, nous les portons auprès des responsables politiques en France, en Europe et dans le monde entier, pour faire évoluer durablement le système agricole et alimentaire dans le bon sens : celui de la justice et de l’égalité.

Ces actions sont possibles grâce à toutes les personnes qui soutiennent notre vision, ponctuellement ou durablement. Merci !