Chaque année, l’humanité consomme un peu plus vite les ressources de la planète

Le couperet vient de tomber : en 2018, c’est aujourd’hui – mercredi 1er août – que l’humanité finira de consommer l’ensemble des ressources naturelles que la planète est en capacité de produire.

En d’autres termes, à compter de demain, toutes les populations vivront à crédit jusqu’au 31 décembre.

Ces dates, calculées par l’ONG Global Footprint Network sur la base de deux indicateurs que sont la consommation annuelle de l’humanité en ressources naturelles et la capacité de régénération de la Terre (1), sonnent le glas d’une surconsommation responsable d’un accroissement des inégalités.

Plus précisément, l’ONG s’est concentrée sur l’empreinte carbone, les ressources halieutiques consommées, l’élevage, les cultures, l’utilisation de la ressource en eau et des terres.

Concrètement, qu’est que cela révèle ?

Disposant de données depuis 1961, l’ONG a commencé à se préoccuper du « jour du dépassement » à partir de 1970, année à laquelle le déficit a commencé à se creuser (le jour de bascule ayant été le 29 décembre) (2). Depuis, la tendance n’a pas faibli, et il est établi que notre mode de consommation nous amène aujourd’hui à consommer l’équivalent d’1,7 planète.

Les ressources naturelles étant diversement réparties sur la planète et épuisables, une telle situation creuse par conséquent les inégalités entre les pays les plus riches et pays les plus pauvres.

A titre d’exemple, la France a une empreinte carbone deux fois plus importante que celle de la moyenne mondiale, grevant ainsi le « budget écologique » des pays les plus vulnérables, contraints de limiter leur consommation de ressources naturelles. Alors qu’une partie de l’Afrique par exemple (zone Sahel notamment) a une empreinte parmi les plus faibles (3).

Une posture qui engendre bien des problèmes d’une part : aggravation du changement climatique, déforestation massive, déclin de la biodiversité (4), épuisement des sols, accaparement des terres, surpêche, etc.

Tandis que d’autre part, des populations payent le prix fort de ce déséquilibre : alors que nous produisons suffisamment de nourriture pour alimenter convenablement la population actuelle, la FAO estime qu’en 2016, ce sont 815 millions de personnes qui ont souffert de la faim dans le monde (5). Et le nombre de personnes souffrant de la faim augmentera de 10 à 20% d’ici 2050 en raison du changement climatique (6).

C’est ainsi davantage l’accès aux denrées alimentaires qui est en cause, plutôt que leur quantité.

Pauvreté, faim, inégalités et changement climatique sont donc inextricablement liées.

Leviers d’action

Forts de ce constat, il est possible d’agir.

Tandis que Global Footprint Network, vient de lancer le hashtag #MoveTheDate (7) afin de relayer les alternatives qui existent pour contenir le phénomène, de son côté Oxfam est attentif à une meilleure prise en compte des producteurs locaux et au développement de l’agroécologie et suit avec attention les politiques publiques de réduction des gaz à effet de serre (GES) suite aux engagements pris lors de la COP 21.

La réduction des émissions de GES (responsables de 60% de l’empreinte carbone mondiale) et l’encouragement aux énergies renouvelables permettraient, elles aussi, de réduire les inégalités et les disparités de consommation. Les pays du Nord ont, à ce sujet, une forte responsabilité, dans la mesure où 10% des pays les plus riches de la planète génèrent environ la moitié des émissions de CO2 mondiales. Or c’est bel et bien la moitié la plus pauvre de l’humanité qui en paiera le prix le plus fort, d’après les données contenues dans notre rapport « Inégalités extrêmes et émissions de CO2 ». On pense notamment au Bangladesh qui, avec ses 136 millions d’habitants, présente des émissions par habitant entre 0,12 et 0,23 tCO2, des chiffres très faibles.

A l’aune de la COP24, qui se tiendra à Katowice (Pologne) en décembre prochain, les pays développés doivent donc rester dans la droite ligne de l’Accord de Paris, et s’engager à réduire les émissions de GES (notamment en arrêtant les subventions aux énergies fossiles, en sortant du charbon au plus tard en 2030, etc) pour maintenir le réchauffement climatique de la planète sous la barre des 1,5°C.

  1. La journée du dépassement mondial est calculée en comparant la consommation annuelle de l’humanité en ressources écologique à la capacité de régénération de la Terre. Ces deux indicateurs sont quantifiés sur la base des comptes nationaux d’empreinte produits annuellement. Ils sont actualisés chaque année, en fonction des dernières données du Global Carbon Project http://www.globalcarbonproject.org/index.htm
  2. https://www.overshootday.org/newsroom/past-earth-overshoot-days/
  3. https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2018-07/20161027-Synthese-Rapport-Planete-Vivante-2016.pdf
  4. https://www.wwf.fr/rapport-planete-vivante-2016
  5. http://www.fao.org/news/story/fr/item/1037322/icode/
  6. https://www.oxfamfrance.org/communique-presse/droit-alimentation/rapport-fao-lutte-contre-faim-dans-monde-fin-lembellie
  7. https://www.overshootday.org/movethedate-live-stream/