Interpeller sa collectivité pour l’inciter à changer de banque

Les collectivités, la transition écologique et la justice sociale

Le combat pour la transition écologique et la justice sociale se mène à tous les niveaux, de l’échelle planétaire à celle de notre commune. D’après le GIEC, la transition des systèmes urbains et ruraux, quels que soient les territoires, est favorisée par « une planification inclusive, intégrée et à long terme aux niveaux local, municipal, international et national » (1). Notre « mille-feuille territorial » français est complexe, mais il nous donne des outils pour agir à tous les échelons de notre territoire. Les collectivités territoriales, de la commune à la région, ont donc un rôle clé pour nous permettre de concilier transition écologique et justice sociale. Construction de projets à fort impact pour le climat ou la biodiversité, politique de la ville, occupation des sols, bâtiments, transports, politique de la petite enfance… Tous ces éléments sont des facteurs essentiels de la crise environnementale et des inégalités sociales, et tous sont au moins en partie déterminés par l’action des collectivités locales.

Les villes plus exposées aux risques climatiques et plus émettrices de GES (gaz à effet de serre)

Les villes en particulier sont un levier essentiel de la transition écologique : 67 villes françaises sont responsables de 67% des émissions de GES en France, les 10 plus grandes métropoles françaises regroupent 20 % de la population nationale et représentent 16% des émissions nationales de gaz à effet de serre (3).

Les villes sont des espaces de concentration de la population, elles sont donc particulièrement exposées aux risques climatiques. Elles sont également plus exposées à certains phénomènes : l’effet de l’îlot de chaleur urbain aggrave par exemple l’effet des canicules en ville (4), et l’imperméabilité des sols rend particulièrement difficile la gestion des inondations. Les citadins sont par ailleurs particulièrement exposés à la pollution puisqu’en 2020, 54 agglomérations, dont les plus peuplées, ont souffert de niveaux de pollution de l’air nocifs pour la santé humaine. Les villes sont donc des espaces clés du changement climatique, qui cumulent concentration des conséquences environnementales mais aussi moyens d’action.

Des disparités entre les territoires, inégalement touchés par les inégalités sociales et environnementales

70 % des 10 % des communes les plus pauvres sont exposées à la pollution de leurs sols, contre 42 % des 10 % des communes les plus riches (5). Il est clair que pauvreté rime avec une exposition plus forte aux risques environnementaux. On doit donc avoir une compréhension locale de ces inégalités pour pouvoir agir de manière efficace et construire une transition juste.

Les inégalités sociales se concentrent particulièrement à l’intérieur des villes, où les indices d’inégalités sont plus élevés que la moyenne française (6). Les quartiers prioritaires de la politique de la ville sont des lieux de concentration de la pauvreté, avec un taux de pauvreté de 43.6%, alors qu’il est de 14,9% en France en 2019. Ces quartiers sont les plus exposés aux risques environnementaux : les habitants déclarent souffrir à un degré plus élevé du manque d’espaces verts, ce qui a un effet sur l’effet d’îlot de chaleur, ainsi que du risque lié à la pollution (7).

Les collectivités locales sont donc un levier majeur de la transition écologique et de plus de justice sociale ! Il est donc possible d’agir, en interpellant sa collectivité dans ses domaines de compétences !

Les collectivités peuvent agir !

Les émissions de GES tout comme les inégalités sociales sont différenciées selon les territoires et les échelles, et les collectivités permettent d’avoir une réponse adaptée à ces différences. Les inégalités sociales sont le plus souvent liées à des inégalités territoriales et environnementales. Il est essentiel de comprendre que les trois sont liées et qu’il faut donc agir simultanément sur ces inégalités, à une échelle adaptée. Etant donnée leur poids et leur capacité d’action, il est essentiel d’avoir des politiques territoriales ambitieuses et à la hauteur des enjeux. Nous ne pourrons pas faire la transition sans les collectivités territoriales.

Au fait, c’est quoi une collectivité territoriale ?

Une collectivité territoriale ou locale est une entité administrative décentralisée qui exerce des compétences sur un territoire donné, indépendamment de l’État. Les collectivités locales se déclinent à différents niveaux : régions, départements, Établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et communes. Ces collectivités ont leurs propres élu-e-s et institutions, et prennent leurs décisions indépendamment de l’Etat. Elles ont des compétences diverses, dans des domaines tels que l’éducation, l’action sociale, la culture, citoyenneté, logement, transport, voire dans le domaine de l’insertion professionnelle. Les collectivités locales constituent une part essentielle de l’action et  de la dépense publique( 3e poste de dépense de l’État en 2022, avec 115 milliards d’euros). C’est donc l’incarnation d’une véritable démocratie locale  au plus près de chez soi ! Les collectivités territoriales sont ainsi un levier majeur de l’action publique, et sont incontournables pour répondre aux défis du changement climatique et de la croissance des inégalités.

Quel est le réel pouvoir des collectivités territoriales pour faire face aux enjeux sociaux et climatiques ?

La transition ne se fera pas sans l’engagement des collectivités

Alors que la France vise la neutralité carbone en 2050, il faut noter que 50 % des émissions de gaz à effet de serre sont directement issues des décisions prises par les collectivités territoriales 8), et que le ministère de l’Ecologie estime « qu’environ 80% des orientations de la stratégie nationale bas-carbone nécessitent une action au niveau local pour être pleinement mises en œuvre » (9). La France ne pourra pas atteindre ses objectifs climatiques sans l’implication des collectivités locales.

Transition des transports, énergies renouvelables, rénovation thermique des bâtiments, occupation des sols … Tous ces leviers de l’atténuation et de l’adaptation au changement climatique dépendent au moins en partie des collectivités locales.

Les compétences des communes et des EPCI

Les communes et EPCI, en concertation avec les départements et régions, sont compétentes pour :

  • Entretenir, construire les bâtiments publics, distribuer les permis de construire, favoriser les rénovations énergétiques.
    • Le secteur du bâtiment est responsable de 19% des émissions de GES en France en 2019.
    • Le secteur du bâtiment est responsable de 44 % de la consommation énergétique.
    • 20% des Français-es déclarent avoir souffert du froid pendant l’hiver 2021-2022 (10).
  • La mise en place et la gestion des mobilités et transports locaux.
    • Les transports sont responsables de 31% des émissions de GES en France en 2019.
    • 3 millions de Français-es sont en situation de précarité mobilité d’après la FNH (11).
  • L’urbanisme, l’aménagement et l’occupation des sols.
    • L’occupation des sols en zone rurale (agriculture, foresterie et autres usages) est responsable de 23% des émissions mondiales de GES.
    • L’occupation des sols est essentielle à l’adaptation à la chaleur et à la gestion des risques d’inondation.

Les départements et la lutte contre la pauvreté

Par ailleurs, les départements sont les acteurs principaux de l’action sociale, qui, avec une fiscalité redistributive et des services publics efficaces (santé, éducation ou protection sociale notamment), est un des principaux leviers de réduction des inégalités et de redistribution des richesses. Dans les départements, l’aide sociale représente environ 2/3 des dépenses de fonctionnement. Les postes de dépense de l’action sociale en France en 2018 sont de 12 Mds € pour la lutte contre l’exclusion et la pauvreté, notamment à travers le RSA, de 8,3 Mds€ pour l’Aide Sociale à l’Enfance, de 7,6 Mds€ pour l’Aide Sociale aux Personnes Agées et de 8,4 Mds€ pour l’aide sociale aux personnes handicapées, soit en tout 36.3 Mds€ qui sont gérés par les départements pour lutter contre la pauvreté. La lutte contre les inégalités et pour la justice sociale ne peut donc pas faire l’impasse sur les départements.

Les régions, responsables d’une planification durable, juste, et concertée entre les territoires

La loi NOTRe de 2015 a donné plus de place aux régions et aux métropoles dans l’aménagement du territoire. Les régions sont devenues chefs de file Schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET), qui peuvent être des outils de planification écologique concertée avec les autres collectivités et adaptée aux territoires. Ces SRADDET sont notamment contraignants pour tous les plans d’urbanisme locaux et déterminent les orientations d’aménagement, d’usage des sols et de mobilités. Toutes les collectivités peuvent et doivent donc s’impliquer pour construire une transition juste à leur échelle et adaptée à leur territoire.

La commande publique, levier puissant de la transition de notre économie

Il ne faut pas oublier dans les multiples leviers dont disposent les collectivités locales l’importance de la commande publique : en 2020, le montant des marchés publics contractés par les collectivités locales s’élevait à 41, 6 Mds € soit 37% du total du montant de la commande publique. Or, la commande publique est un enjeu économique majeur puisqu’il représente en propre 8% du PIB de la France et qu’il contribue à imposer des normes et à transformer les entreprises par les critères utilisés pour les mettre en compétition. Cependant, 87.4% des contrats passés par les CT n’incluaient aucune clause environnementale et 88.4% aucune clause sociale (12). Il y a donc à la fois un levier majeur et une marge d’amélioration importante.

De plus, il est possible d’inciter sa collectivité à mettre en place des critères extra-financiers dans la sélection des banques à qui cette dernière réalise un emprunt, en faveur de plus de durabilité et de justice sociale. Chaque collectivité peut en effet faire le choix d’une banque et donc d’un financement éthique, qui ne contribue pas au développement des énergies fossiles. Alors rendez vous plus bas, pour recevoir un courrier d’interpellation à envoyer à  votre collectivité pour qu’elle filtre d’avantage ses emprunts en faveur de la transition écologique et de la justice sociale !

Les collectivités agissent déjà !

Des engagements encourageants

Les mairies et métropoles commencent à s’organiser et à prendre des engagements en faveur du climat. La Convention des Maires pour le Climat et l’Energie en Europe compte à ce jour 185 signataires en France, dont 83 ont soumis des plans d’action (14). Le Pacte pour la Transition, lancé par un regroupement de collectifs citoyens au moment des élections municipales a amené 796 listes de candidat-e-s à s’engager sur des propositions en faveur d’une transition juste. 290 de ces listes sont aujourd’hui majoritaires. Parmi les 25 plus grandes villes de France, les élu-e-s majoritaires de Paris, Lyon (ville et métropole), Montpellier, Strasbourg, Lille, Rennes, Grenoble, Nîmes, Saint Denis et Villeurbanne se sont engagé-e-s sur des mesures du Pacte (15).

14 maires de France se sont engagés à inclure dans leurs emprunts auprès de banques « des critères concernant la fin du soutien au développement des énergies fossiles et aux paradis fiscaux, et en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes » (16) dans une tribune publiée le 5 novembre 2022.

J’interpelle ma collectivité !

Je souhaite recevoir mon kit d’interpellation

« * » indique les champs nécessaires

Prénom et Nom*
Je suis bénévole Oxfam dans un groupe local*

En remplissant ce formulaire, je recevrai un kit d’interpellation comprenant un modèle de courrier et des conseils pour interpeller ma collectivités. Je recevrai également des informations et propositions d’engagement de la part d’Oxfam France dont je pourrai me désinscrire à tout moment.