5 ans d’accord UE – Turquie, cinq années d’échec de la politique européenne d’asile
Cinq ans depuis l’annonce et mise en place de l’accord UE-Turquie. Depuis, la politique de centres « type Moria » s’est développée à la frontière gréco-turque, caractérisant cruellement l’échec de la politique d’asile européenne. Une politique qui a cherché à éviter à tout prix l’arrivée en Europe de personnes en quête de sécurité et dignité, laissant des milliers d’enfants, femmes et hommes dans des conditions de vie indignes, à l’opposé des valeurs que l’UE devrait représenter.
C’est pour cela qu’Oxfam, avec 8 ONG, appelle aujourd’hui toutes les instances de l’UE à tirer les leçons des échecs passés et à apporter des changements urgents au pacte migratoire de l’UE, qui prévoit déjà la construction de nouveaux centres d’accueil dans les îles grecques.
Pour Jon Cerezo, Responsable de la Campagne Migrations chez Oxfam France « Malgré des preuves accablantes de l’échec de sa politique, le nouveau pacte migratoire et d’asile proposé en novembre par la Commission européenne continue de s’appuyer sur cette approche Moria. »
Depuis 2016, l’un des objectifs de l’Union européenne de maintenir les demandeurs d’asile dans les îles grecques était d’accélérer leur retour en Turquie. Cependant, le manque de ressources et de réponse européenne coordonnée ont surtout entrainé une forte pression sur les camps, provoquant des pratiques de contrôle aux frontières violentes, des refoulements et d’immenses retards dans les procédures d’asile, ainsi que des conditions de vie indignes en constante dégradation : manque d’accès à l’eau et l’hygiène de base, logement à base de tentes ou conteneurs surpeuplés sans chauffage, manque d’assistance sanitaire ou juridique, enfants et femmes exposés à la violence ou l’exploitation… Oxfam et ses partenaires locaux, présents dans l’île de Lesbos depuis 2015, sont témoins de cette dégradation des conditions de vie, aggravées depuis l’arrivée de la pandémie.
Les institutions européennes doivent faire face à la réalité des îles grecques et faire preuve de responsabilité en matière de protection. Au lieu de reproduire les politiques qui ont donné comme résultat le camp de Moria, priorisant la réduction des arrivées à tout prix, l’Europe devrait se rappeler de ses valeurs fondamentales et garantir la sécurité et la dignité des demandeurs d’asile, des réfugiés et des migrants.
Pour cela dans notre déclaration nous appelons l’UE, la France et ses États membres à garantir :
1. La non détention de personnes en demande d’asile: les nouveaux plans de centres d’accueil dans les îles grecques s’apparentent à un établissement de type détention. Cela ne convient pas aux personnes recherchant la sécurité. La proposition ne prend pas non plus en compte les besoins spécifiques des personnes, en particulier des femmes et des filles, qui arrivent en Europe après des voyages longs et périlleux.
2. Des conditions de vies dignes pour les demandeurs d’asile : l’UE ne peut pas contourner ses propres responsabilités en matière de droits en créant une «phase préalable à l’entrée», la proposition de pre-screening, dans laquelle le droit d’asile de l’UE ne s’appliquerait pas pleinement. Les demandeurs d’asile qui entrent en Europe doivent être protégés par les législations européennes et nationales sans exception.
3. L’accès à une assistance et un soutien juridiques: la procédure d’asile est complexe, c’est pour cela que les demandeurs d’asile doivent avoir accès aux informations nécessaires et au soutien juridique des ONG et du HCR. La tentative de l’UE d’accélérer les procédures d’asile par des procédures aux frontières accélérées met ces organisations à l’écart et porte atteinte aux droits des demandeurs d’asile.
4. Un contrôle efficace et indépendant: les centres d’accueil ne peuvent pas rester fermés à un contrôle extérieur. L’UE et les États membres doivent permettre un contrôle externe et des rapports de la part de parlementaires et ONG, et mettre en place des mécanismes de contrôle clairs, indépendants et efficaces.
Contact presse :
Jon Cerezo, Responsable campagne humanitaire et migrations Oxfam France, 06 51 15 54 38
Notes aux rédactions
– Lisez la déclaration conjointe d’Oxfam avec Amnesty, Caritas Europe, le Danish Refugee Council, le Greek Council for Refugees, Human Rights Watch, International Rescue Committee et Refugee Rights Europe
– Oxfam organise l’événement «Après cinq ans de réponse de l’UE aux réfugiés dans les îles grecques, que nous réserve l’avenir?» Avec Refugee Rights Europe le 18 mars 2021.
– Oxfam opère à Lesbos depuis 2015. Depuis 2019, Oxfam développe avec ses partenaires des programmes de protection et d’assistance juridique.