Acta : un danger pour les personnes dépendant des médicaments à bas prix

Alors que commencent cette semaine [28 juin – 1er juillet 2010] à Lucerne, en Suisse, de nouvelles négociations sur l'Accord commercial anti-contrefaçon (Acta en anglais), la confédération internationale Oxfam lance un appel aux négociateurs pour que cet accord ne représente pas une nouvelle barrière à l'exportation de médicaments génériques dans les pays pauvres.

Les ministres du commerce des pays négociateurs d'Acta se rencontrent depuis lundi 28 juin à Lucerne pour discuter de ces dispositions juridiques controversées qui pourraient renforcer et étendre le monopole des multinationales pharmaceutiques dans les pays pauvres. Si la version actuelle de l'accord était retenue, Acta mettrait un frein à la concurrence exercée par les médicaments génériques, ce qui aurait un impact dévastateur sur l'accès aux médicaments dans les pays en développement.

L'accord, dans sa forme actuelle, permet aux entreprises pharmaceutiques multinationales de demander aux services douaniers de saisir des médicaments génériques légitimes et de qualité, au motif fallacieux qu'ils seraient des contrefaçons.

« Les pays négociateurs profitent avec cynisme des craintes sur les médicaments contrefaits pour mieux contrôler la vente de médicaments génériques aux pays pauvres, explique Rohit Malpani, porte-parole d'Oxfam. Acta est un nouveau dispositif de protection de la propriété intellectuelle, au service des intérêts des multinationales pharmaceutiques, qui contient des mesures asphyxiant le commerce légitime de médicaments génériques. En conséquence, les personnes pauvres se verront refuser l'accès à des médicaments génériques qui pourraient leur sauver la vie, un accès auquel elles ont droit. »

L'Union européenne (UE) applique déjà actuellement une réglementation demandant aux douanes de saisir les médicaments génériques légitimes qui violeraient les réglementations sur les brevets au sein de l'UE. Plus de vingt cargaisons légales de médicaments génériques en provenance d'Inde et de Chine et à destination de pays en développement ont été saisies en 2009 aux points de transit européens – y compris de nombreux médicaments anti-VIH, en provenance d'Inde et destinés au Nigéria faisant l'objet d'un échange commercial conforme aux règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). La réglementation européenne est aujourd'hui contestée par l'Inde et le Brésil devant l'OMC, car elle va à l'encontre des règles du commerce international.

Rohit Malpani ajoute : « Acta représente un grand pas en arrière. Au lieu de promouvoir une plus grande souplesse en matière de propriété intellectuelle pour favoriser l'accès aux inventions et encourager l'innovation, les pays développés se sont engagés dans des négociations secrètes qui constituent un véritable “accaparement des ressources”?au nom des multinationales. Les politiques de commerce international qui visent à limiter le libre mouvement de médicaments génériques à faible coût toucheront en priorité les populations les plus pauvres des pays en développement. Les intérêts des grandes compagnies pharmaceutiques ne doivent pas éclipser les intérêts de deux milliards de personnes à travers le monde qui n'ont pas accès aux médicaments essentiels« .

Note aux rédactions

– Les pays négociateurs d'Acta sont : l'Union Européenne, l'Australie, le Canada, la Corée-du-Sud, les Etats-Unis, le Japon, le Mexique, le Maroc, la Nouvelle-Zélande, Singapour, la Suisse et l'Union européenne.
– Les parties prenantes cherchent également à introduire de nouvelles règles qui nuiraient au commerce de médicaments génériques légitimes. Il est préoccupant de voir l'accord concerner également sur le plan juridique les fournisseurs de principes actifs, qui constituent les matières premières de tout médicament. Si ces règles étaient acceptées, les fabricants de médicaments génériques verraient se tarir leur source d'approvisionnement en principes actifs, ce qui mettrait en péril le commerce de nombreux médicaments génériques dont les pays les plus pauvres ont besoin.
– L'accord pourrait également établir un nouveau Secrétariat, qui ne rendrait des comptes ni aux pays en développement ni à la société civile. Ce Secrétariat viserait à imposer l'adoption, par les pays les plus pauvres, de ces réglementations en matière de propriété intellectuelle. Ceci surviendrait à un moment où d'autres institutions de protection de la propriété intellectuelle, y compris l'Organisation mondiale du commerce et l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, commencent à apporter de véritables réponses aux besoins des pays en développement.
– Julien Potet, responsable de plaidoyer sur les questions de santé à Oxfam France est disponible pour répondre à vos questions.

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– Delphine Bedel : bedel@oxfamfrance.or / + 33 (0)1 77 35 76 00

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