APD : hausse des chiffres doit signifier hausse de la lutte contre la pauvreté

L’OCDE rend aujourd’hui son verdict sur les chiffres 2009 de l’Aide publique au développement (APD). Il montre un net retard global sur les engagements des principaux pays donateurs, malgré une augmentation de certains pays, dont la France. Mais selon Oxfam France, cette augmentation permet simplement à la France de combler son retard. Surtout, cette hausse ne bénéficie pas à la lutte contre la pauvreté.

« L’aide au développement stagne dramatiquement.Les principaux pays dont l’APD est en baisse :
– Allemagne : -12% (0,38% en 2008; 0,35% en 2009).
– Italie : -31% (0,22% en 2008; 0,16% en 2009).
– Japon : – 10,2%; (0,19% en 2008; 0,18% en 2009).
– Canada : – 9.5% (0,33% en 2008; 0,30% en 2009).
– L’Irlande voit son aide baisser drastiquement de 18,9% par rapport à 2008.

Les principaux pays en hausse :
– Le Danemark, la Finlande, le Luxembourg, la Norvège et la Suède augmentent leur aide, les trois derniers passant la barre des 1% de leur RNB.
– Le Royaume-Uni tient ses engagements d’aide, passant de 0,43% en 2008 à 0,52% en 2009.
– La France passe de 0,39% en 2008 à 0,46% en 2009.
– L’aide de la Belgique passe à 0,55% contre 0,48% en 2008.
] La variation de l’aide publique au développement des 23 pays du Comité d’aide au développement de l’OCDE (CAD) ne s’explique pas tant par les efforts financiers de ces pays que par les corrections de changes et de l’inflation. Les pays pauvres, dont une partie des ressources budgétaires dépend de cette solidarité, seront ravis d’apprendre que si aux prix et taux de change de 2008, l’aide augmente légèrement de 0,7%, elle recule de plus de 2% à prix courants.] Près de 20 milliards de dollars manquent pour atteindre les engagements pris en 2005 de doubler l’aide à l’Afrique Selon l’OCDE, sur les 25 milliards qui lui avaient été promis à Gleneagles, l’Afrique ne devrait recevoir qu’environ 11 milliards de dollars, principalement à cause de donateurs européens ne tenant pas leurs ambitieuses promesses de consacrer une grande partie de leur APD au continent africain.] et d’atteindre 0,51% du RNB en 2010 [[En 2005, 15 pays membres de l’Union européenne et du DAC de l’OCDE se sont engagés à atteindre un minimum de 0.51% de leur RNB consacré à l’APD en 2010.]]. A ce rythme, les chances d’atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement sont quasi-nulles en Afrique Sub-saharienne. L’aide à elle seule ne peut pas tout, mais elle est vitale pour des populations de pays pauvres auprès desquelles les dirigeants des Etats riches se sont engagés à réduire de trois-quarts la mortalité maternelle ou encore à garantir une scolarisation primaire universelle
« , déplore Sébastien Fourmy d’Oxfam France.

Comme chaque année, la liste de l’OCDE pointe les bons et les mauvais élèves. Comme chaque année, la France est alternativement dans l’une puis l’autre catégorie. Après un recul de 15,9% en 2007 et une légère augmentation en 2008 (2,9%), la France affiche une croissance de 16,6% de son APD. Une croissance largement due à des annulations de dettes, que, contrairement aux années passées l’OCDE ne détaille pas, et à une croissance exponentielle des prêts de l’Agence française de développement (AFD).

A 0,46% du RNB, la France revient seulement au niveau auquel elle était en 2005. Et si elle demeure l’un des principaux bailleurs de fonds internationaux en volume, avec les Etats Unis, la Grande Bretagne et l’Allemagne les prévisions budgétaires du Parlement français pour les années à venir sont inquiétantes. En 2010, l’APD devrait à nouveau stagner avant de diminuer en 2011. Ceci alors que pour tenir ses engagements, en 2010 la France devrait, selon l’OCDE, consacrer 0,61% de sa richesse à l’APD. L’augmentation de L’APD cette année ne permet donc pas rattraper le retard pris lors des années précédentes. Plus important encore : ce ‘rattrapage’ ne bénéficie pas aux objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).

« L’APD française souffre chroniquement de deux maux : elle est imprévisible et insuffisamment orientée vers les OMD. Pour atteindre ses objectifs, la France doit présenter un véritable plan de rattrapage et adopter un calendrier contraignant pour atteindre les 0,7%. Elle doit également améliorer la qualité de son aide. Annulation de dette amplifiée, frais de scolarité des étudiant étrangers, coûts des réfugiés… On le sait, une large proportion de l’APD française n’est pas directement consacrée au développement. Ce que l’on sait moins, c’est que les sommes consacrées directement aux OMD, et aux priorités affichées par le gouvernement en 2009 [[Suite au dernier comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) qui s’est tenu le 5 juin 2009, le Premier ministre François Fillon a affirmé que « l'aide française sera concentrée sur cinq secteurs prioritaires : santé, éducation et formation, développement durable et climat, agriculture et sécurité alimentaire, soutien à la croissance » (cf. site du [Ministère des Affaires étrangères français->http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/actions-france_830/aide-au-developpement_1060/institutions-francaises_19758/dispositif-institutionnel-francais_19759/cicid-juin-2009_74507.html])]], agriculture, éducation et santé, ne représentent qu’une faible part de l’APD française« , souligne Sébastien Fourmy.

Malgré les engagements du gouvernement français, les subventions bilatérales reculent constamment. Santé, éducation, agriculture, le nombre de projets que la France finance ne cesse de baisser. Les subventions de la France en santé étaient estimées à 100 millions d’euros en 2007, à 50 millions en 2009, elles devraient passer à 20 millions en 2010. En 2009, l’aide consacrée à l’agriculture et la sécurité alimentaire a diminué de 8,5% par rapport à 2008 et de 15% par rapport à 2007. D’après les calculs d’Oxfam France, les subventions à l’éducation baisseraient de moitié entre 2008 et 2009.

En novembre 2008, Oxfam France avait rendu publique une liste de 55 projets d’aide bilatéraux en Afrique sub-saharienne menacés de ne pas être financés. Malgré une rallonge de dernière minute et un engagement du gouvernement à soutenir les secteurs sociaux sur le continent africain, les coupes continuent plus que jamais. Oxfam France demande au gouvernement français de présenter le détail des chiffres de son APD concernant l’éducation, la santé et l’agriculture. [[En février dernier, Oxfam International a rendu public [un plan européen de sauvetage des OMD->IMG/pdf/Plan-sauvetage-OMD_Oxfam.pdf] que devrait adopter l’Union européenne. Le document souligne les étapes et les résultats à atteindre dans les domaines de la pauvreté, de la faim, de l'éducation, de la santé, de l'environnement et de l'égalité des sexes en 2010 afin de permettre la réalisation des OMD.]] [[Les pays membres du CAD de l’OCDE sont : Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Corée, Danemark, Espagne, Etats-Unis, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Japon, Luxembourg, Norvège, Nouvelle Zélande, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède et Suisse.]]

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