Oxfam révèle aujourd’hui que la crise due à la pandémie de COVID-19 a entraîné pour les femmes du monde entier une perte de revenus d’au moins 800 milliards de dollars en 2020, soit plus que le PIB combiné de 98 pays.

Au niveau mondial, les femmes ont perdu plus de 64 millions d’emplois l’année dernière, soit une perte de 5 %, contre 3,9 % pour les hommes.

Selon Sandra Lhote-Fernandes, responsable du plaidoyer genre d’Oxfam France : « Les femmes sont les grandes perdantes de cette crise. La pandémie de la Covid-19 a couté au moins 800 milliards de dollars en perte de revenus pour les travailleuses du secteur formel ».

« Il s’agit là d’une estimation très prudente, qui n’inclut même pas les salaires perdus par les millions de femmes qui évoluent dans le marché informel – travailleuses domestiques, commerçantes sur les marchés et ouvrières de la confection textile – qui ont été renvoyées chez elles ou dont les heures de travail et les revenus ont été considérablement réduits. La Covid-19 a porté un coup dur aux progrès accomplis récemment en faveur des femmes sur le marché du travail. »

Au niveau mondial, les femmes sont surreprésentées dans les secteurs précaires et faiblement rémunérés, tels que le commerce de détail, le tourisme et la restauration, qui ont été les plus durement touchés par la pandémie. Elles ont été plus susceptibles que les hommes de perdre leur emploi ou de voir leurs heures de travail réduites pendant la pandémie, en grande partie à cause de leurs responsabilités familiales. Avant même que le virus ne frappe, des femmes et des filles assumaient chaque jour l’équivalent de 12,5 milliards d’heures de travail soin non rémunéré, un travail dont la valeur serait d’au moins 10 800 milliards de dollars chaque année, soit plus de trois fois la valeur du secteur des technologies à l’échelle mondiale

« Pour les femmes de tous les pays et de tous les continents, la perte de revenus est allée de pair avec un accroissement considérable du travail de soins non rémunéré. Alors que les besoins en soins se sont énormément accrus au fil de la pandémie, les femmes – qui sont les véritables ‘amortisseurs’ de nos sociétés – se sont impliquées pour combler le vide. Cela répond à une attente bien souvent imposée par des normes sociales sexistes », a expliqué Sandra Lhote-Fernandes.

Les effets de la crise risquent de fragiliser durablement les droits des femmes: 36 années de perdues en matière d’égalité et 47 millions de femmes dans le monde risquent de basculer dans l’extrême pauvreté en 2021 à cause de la pandémie du Covid-19. Pourtant, les inégalités entre les femmes et les hommes ont été faiblement intégrées dans les réponses des gouvernements pour faire face à la crise.

Pour Sandra Lhote-Fernandes « La France n’échappe malheureusement pas à cette tendance mondiale. Alors que l’égalité femmes-hommes est la grande cause du quinquennat d’Emmanuel Macron, les femmes ont été les grandes oubliées des mesures de relance prises l’année dernière. La France doit corriger et s’engager d’une véritable relance féministe ».

La semaine prochaine, l’Assemblée Nationale entame l’examen d’une proposition de loi portée par la députée de la majorité Marie-Pierre Rixain visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle.

« C’est l’occasion parfaite pour prendre des mesures ambitieuses pour éviter tout recul en matière d’égalité femmes-hommes. Revaloriser les « métiers de femmes », en première ligne pendant la pandémie, conditionner les aides de l’Etat aux entreprises à l’action en faveur de l’égalité, augmenter le nombre de places en crèche, allonger les congés parentaux notamment pour les pères : voilà des mesures qui doivent être discutées à l’Assemblée Nationale pour réellement réduire les inégalités économiques entre les femmes et les hommes ».

« Les droits des femmes sont menacés par la pandémie du Covid-19 et nous risquons de revenir sur des acquis gagnés de hautes luttes. La France présidera dans deux mois un sommet des Nations Unies en faveur des droits des femmes, le Forum génération égalité. Oxfam France va mobiliser les citoyen-ne-s dans les prochaines semaines pour que la France s’engage en faveur d’une relance féministe ».

Contact presse

Sandra Lhote-Fernandes, slhote@oxfamfrance.org 06 64 54 65 60

Notes aux rédactions

Cliquez ici pour télécharger des photos et des témoignages de femmes et de mères qui travaillent et qui sont touchées par les répercussions économiques de la pandémie de COVID-19.

L’estimation de la perte totale de revenu des femmes a été calculée à partir de l’évolution du nombre de femmes en activité en 2020 par rapport à 2019, telle que recensé par l’indicateur suivant de l’Organisation internationale du travail (OIT) : Emploi par sexe et âge – Estimations modélisées du BIT, novembre 2020 (en milliers) – Annuel. Pour calculer la valeur de la perte de revenus, Oxfam a d’abord estimé le revenu moyen des femmes dans le monde, puis a multiplié ce chiffre par le nombre de femmes en activité en 2019 et en 2020. Le chiffre du revenu moyen est issu de l’indicateur suivant de l’Organisation internationale du travail : Gains nominaux mensuels moyens des salariés par sexe et activité économique pour l’année 2019. Les données de l’OIT sur les revenus mensuels comprennent cinquante pays représentant toutes les régions du monde. Les moyennes mensuelles sont multipliées par douze pour obtenir la valeur estimée du revenu annuel. Nous partons du principe que le revenu annuel moyen des femmes est resté constant entre 2019 et 2020 (2019 étant la dernière année pour laquelle des données sont disponibles). Ce calcul est donc une estimation, sensible aux limites des données disponibles. Par exemple, le fait de se fonder sur le revenu moyen des femmes au niveau mondial ne fait pas justice à l’ampleur des inégalités économiques entre les femmes. En outre, en ce qui concerne les données relatives à l’emploi par sexe, l’OIT publie la mise en garde suivante : les observations imputées ne sont pas basées sur des données nationales, sont sujettes à une grande incertitude et ne doivent pas être utilisées pour effectuer des classements ou des comparaisons entre pays.

En Asie du Sud, en Afrique subsaharienne et en Amérique latine, la majorité des femmes travaillent dans le secteur informel. À l’échelle mondiale, les femmes constituent par ailleurs environ 70 % de la main-d’œuvre du secteur de la santé et du secteur social, où elles exercent des professions essentielles mais souvent faiblement rémunérées, qui les rendent plus vulnérables à une infection au coronavirus

On s’attend à ce que 47 millions de femmes dans le monde tombent dans l’extrême pauvreté, vivant avec moins de 1,90 dollar par jour en 2021. Aux États-Unis, l’insécurité alimentaire touche une femme de couleur sur six à cause de la pandémie. Selon les données du Forum économique mondial, il faudra désormais attendre une génération de plus pour connaitre l’égalité entre les femmes et les hommes : cela demandera 135,6 ans au rythme actuel au lieu de 99,5 ans auparavant, en raison des reculs en matière d’égalité de 2020.

Bien que certains gouvernements aient pris des mesures encourageantes pour améliorer la situation des femmes sur le plan économique et social, comme les 39 milliards de dollars que l’administration Biden a promis d’investir dans le secteur de la garde d’enfants et la nouvelle loi adoptée en Argentine visant à offrir un horaire de travail flexible aux personnes qui ont des enfants ou des personnes handicapées à leur charge, ces mesures restent nettement insuffisantes. Seuls 11 pays ont mis en place des horaires de travail réduits ou plus souples pour les salarié-e-s qui ont des responsabilités familiales, tandis que 36 pays ont renforcé les congés familiaux et les congés maladie rémunérés pour les parents et les soignant-e-s.

Du 30 juin au 2 juillet prochain la France accueillera le Forum Génération Egalité (FGE), sommet des Nations Unies en faveur des droits des femmes. Ce sommet qui devait célébrer les 25 ans de la conférence de Pékin, il sera présidé par Emmanuel Macron et le président mexicain. Le FGE réunira des che-fe-s d’Etat du monde entier pour accélérer les progrès en matière d’égalité entre les femmes et les hommes d’ici 2030.