Nouveau rapport d’Oxfam sur les chaines d’approvisionnement des supermarchés

Oxfam révèle dans un nouveau rapport choc  Grande distribution : nouvelles révélations sur les violations des droits des travailleurs et travailleuses dans les chaînes d’approvisionnement » comment les salaires de misère, la violation des droits de travailleurs et les discriminations de genre sont aujourd’hui la norme dans les chaînes de production du thé et des fruits et légumes qui approvisionnent certains des plus grands supermarchés du monde, tel que Lidl et ALDI. Ces violations aggravent la pauvreté et les inégalités de façon dramatique.

Lien vers la synthèse en français 

L’ONG appelle la Commission européenne et le Parlement européen à adopter de toute urgence une législation contraignante afin de s’assurer que les entreprises respectent les droits humains et environnementaux, et que les victimes d’abus puissent avoir accès à la justice.

Pour Caroline Avan, porte-parole d’Oxfam France : « Nous ne pouvons accepter que la souffrance humaine et la pauvreté soient des ingrédients de la nourriture que nous consommons. La grande distribution s’arroge la part du lion de ce que nous payons à la caisse, tandis que les travailleuses et les travailleurs se tuent à la tâche pour des salaires de misères. Les femmes sont particulièrement affectées puisqu’elles sont majoritaires dans les travaux agricoles pénibles et sous-payés et trop souvent victimes d’harcèlement et d’abus sexuels sur leurs lieux de travail. »

Oxfam met en lumière l’inégalité de la répartition de la valeur produite dans les chaînes de production et apporte de nouvelles preuves de la pression exercée par le secteur de la grande distribution pour baisser les coûts de production, réduire à la marge les salaires des travailleurs, et maximiser les profits. L’ONG s’appuie sur des entretiens avec des travailleuses et des travailleurs dans des exploitations agricoles de patates douces aux Etats-Unis, de mangues, raisins et melons au Nord-Est du Brésil et dans des plantations de thé en Inde.

o Aux États-Unis, la grande distribution et les marques de thé captent près de 94 % du prix d’une boîte de thé noir produit en Inde, tandis que moins de 1 % revient à la main-d’œuvre des plantations de thé.
o En Allemagne, la grande distribution et les marques de thé s’attribuent 2,15 € sur une boîte de thé coûtant 2,48 €, soit 87 % du prix final, alors que la main-d’œuvre n’en touche que 0,03 €.
o En Inde, les entretiens menés auprès de travailleurs du thé dans 50 plantations de thé mettent en lumière des conditions de travail extrêmement dégradées : choléra et typhoïde sont des affections courantes, du fait d’un manque chronique d’eau potable et d’accès à des installations sanitaires adéquates. Les salaires versés ne permettent pas de vivre décemment et la moitié des personnes interrogées vivent sous le seuil de pauvreté. Les femmes sont particulièrement affectées et travaillent souvent plus de 13 heures par jour.
o Au Nord-Est du Brésil – d’où viennent près de la moitié des mangues consommées aux Etats-Unis ; les saisonniers, et particulièrement les mères de famille, travaillant dans les exploitations de mangues, raisins et melons reçoivent également des salaires de misère – et n’ont souvent tout simplement pas la possibilité d’aller chercher du travail ailleurs.
o En Caroline du Nord aux Etats – Unis, les travailleurs des exploitations agricoles de patates douces sont à la tâche jusqu’à 14 heures par jour, avec peu de pauses.

« Les citoyens et la société civile attendent des pouvoirs publics qu’ils agissent pour mettre un terme à cette spirale infernale des inégalités et des abus dans les droits humains » appelle Caroline Avan qui poursuit : « En 2017, la France a montré la voie en adoptant la loi sur le devoir de vigilance des multinationales. Depuis, plusieurs Etats membres sont en train d’avancer de manière significative. L’Union européenne doit maintenant prendre sa part et assurer un vrai leadership en adoptant une législation contraingnant les entreprises à respecter les droits humains et environnementaux sous peine de sanction juridique » [1] [2].

Oxfam appelle le Parlement européen et la Commission européenne à adopter une directive européenne sur le devoir de vigilance qui s’assure que :
• Les compagnies soient tenues d’identifier, de prévenir, de remédier et d’être redevables des impacts de leurs activités sur les droits humains dans leurs chaines d’approvisionnement ;
• Ces obligations s’appliquent à l’ensemble de leur chaine d’approvisionnement ;
• Les personnes qui ont été exploitées ou victimes d’abus aient accès à la justice quand les compagnies ont failli à leur devoir de vigilance.

Contact presse

Pauline Leclère – pleclere@oxfamfrance.org – 07 69 17 49 63

Notes aux rédactions :

Le résumé du rapport en français est disponible en francais. Le rapport complet en français sera disponible le 14 octobre au plus tard. Merci pour votre compréhension.

Retrouvez les études de cas concernant le thé en Inde, les fruits au Brésil, les patates douces aux Etats-Unis

[1] Les consommateurs finaux sont de plus en plus nombreux à trouver ces inégalités insupportables : un sondage YouGov pour Oxfam en Grande-Bretagne montre comment près de 9 consommateurs sur 10 de ALDI pensent qu’il est important que la chaîne mette tout en œuvre afin de s’assurer que les travailleurs en amont des chaînes de production des aliments distribués par ALDI reçoivent un salaire leur permettant de vivre décemment, et d’éliminer les situations de violation de droits humains.

Les investisseurs font également pression : 50 d’entre eux, représentant plus de 3,1 mille milliards de dollars américains, ont publié un  appel aux supermarchés à être plus transparent sur leurs chaînes d’approvisionnement et à éliminer les abus de droits humains.

[2] Une coalition de plus de 80 organisation européennes de la société civile – dont Oxfam – a appelé la nouvelle Commission européenne à adopter une législation contraignante afin de s’assurer que les entreprises respectent les droits humains et environnementaux, et que les victimes d’abus puissent avoir accès à la justice. L’appel est disponible en anglais sur le site de European Coalition for Corporate Justice, ici. 

[3] En juin 2018, Oxfam a sorti un précédent rapport « Derrière le code-barres : des inégalités en chaînes » sur le partage de la valeur ajoutée sur les chaines de production des supermarchés du monde et qui formulait les trois recommandations : verser un salaire décent à tou.te.s les travailleu.r.se.s de la chaîne de production, en exigeant des entreprises qu’elles s’abstiennent de rétribuer les actionnaires par le biais de dividendes ou de rachats tant que des mesures n’ont pas été prises pour garantir qu’elles paient des prix assurant un revenu décent à la main-d’œuvre ou aux productrices et producteurs de leurs principales chaînes d’approvisionnement ; limiter les écarts démesurés de revenus au sein d’une même entreprise, en instaurant la transparence sur les écarts de salaires dans les entreprises ; mettre fin aux versements record de dividendes pour les actionnaires au détriment des salariés, notamment en exigeant des grandes entreprises qu’elles garantissent qu’après investissement, la part des bénéfices reversée sous formes de dividendes ne représente pas davantage que la part des bénéfices redistribuée aux salariés.