G8 : les bons diagnostics, pas encore les bons remèdes

Les dirigeants du G8 étaient réunis les 17 et 18 juin en Irlande du Nord. Les réactions d'Oxfam aux principaux points du communiqué final.

Sur l'évasion fiscale et les taxes

Les attentes lors de ce sommet autour de la lutte contre l'évasion fiscale étaient grandes. Avec les avancées aux niveaux européen, américain, du G20 et de l'OCDE, les pays du G8, qui hébergent 15 paradis fiscaux notoires, se devaient d'agir collectivement avec détermination. S'ils posent le bon diagnostic et reprennent de bons principes, les réponses apportées ne sont pas à la hauteur des attentes et de l'urgence de la situation. Pendant les deux jours du sommet du G8 en Irlande du Nord, 2,2 milliards de dollars sont sortis des pays en développement à destination de paradis fiscaux." L'échange multilatéral et automatique d'informations fiscales est bien en train de devenir un peu plus la nouvelle norme mondiale. C'est certes une bonne nouvelle, mais les pays du G8 n’ont pas tranché sur le périmètre des échanges ou défini de calendrier clair. Surtout, les pays en développement ne doivent seulement bénéficier de cette mesure, ils doivent être inclus directement en amont dans les négociations. "Le G8 n'a pas réussi à s'accorder sur la mise en place de registres publics des bénéficiaires pour les structures opaques liées aux paradis fiscaux, y compris les trusts., déplore Sébastien Fourmy. C'est une occasion manquée pour le G8 d'enfoncer le clou de la lutte contre l'évasion fiscale et un répit précieux que les paradis fiscaux ne manqueront pas d'exploiter." Oxfam estime qu'au moins 18 500 milliards de dollars sont cachés dans des paradis fiscaux, ce qui représente un manque à gagner en terme de revenus fiscaux de plus de 156 milliards de dollars, soit le double du nécessaire pour éradiquer l'extrême pauvreté dans le monde.

Sur le conflit en Syrie

Les dirigeants du G8 ont souhaité montrer une certaine unité, lors de ce sommet, en affirmant leur volonté commune de trouver une solution politique à la crise en Syrie, et en appelant clairement à un accès humanitaire plus important pour aider le peuple syrien. Mais le plus dur reste à faire. La communauté internationale ne doit pas laisser passer cette opportunité : les Syriens ne peuvent pas être abandonnés pendant que le monde débat de la solution à apporter au conflit. Une feuille de route sur la conférence de paix de Genève doit impérativement être mise en place. L'ensemble des parties au conflit doit participer à la conférence, tout comme les acteurs non militarisés, y compris des représentants des femmes et des réfugiés. Le G8 a collectivement annoncé un effort de financement additionnel de 1,5 milliard de dollars pour répondre aux besoins humanitaires liés à la crise syrienne. Certains pays, comme la Grande-Bretagne (274 millions de dollars), les Etats-Unis (300 millions de dollars), l'Allemagne (267 millions de dollars), le Japon (10 millions de dollars) ou encore le Canada (115 millions de dollars) ont déjà précisé le montant de leur contribution supplémentaire à titre national.
i>Mise à jour au 3 juillet : Le la France a annoncé une contribution de 85 millions d'euros sans toutefois préciser si cette somme était additionnelle ou correspondait aux engagements pris antérieurement.

Sur les questions foncières

Oxfam a salué la décision du G8 de mettre à l'ordre du jour la question des accaparements de terres. Des engagements pour améliorer la transparence des investissements fonciers ainsi qu'établir des partenariats avec les pays en développement pour faire progresser les droits fonciers en conformité avec les normes des Nations unies sont un pas dans la bonne direction. Mais tout doit être fait pour assurer que cet engagement envers les Directives volontaires du Comité sur la sécurité mondiale ne soit pas compromis par la "Nouvelle Alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition", lancée en 2012, lors du G8 aux Etats-Unis et qui, en l’état, promeut les grandes multinationales agro-industrielles au détriment des droits des agriculteurs et l'accès à la terre.

Sur le commerce et le libre-échange

Le communiqué du G8 met en avant comme jamais le libre-échange et la multiplication des accords commerciaux comme solutions à tous les maux de la crise économique. La priorité affichée par le G8 à la lutte contre les paradis fiscaux et la transparence des grandes entreprises ne saurait être une excuse pour continuer le business as usual en matière de commerce international, en particulier pour pour le continent africain." Les accords de libre-échange et les traités d'investissements bilatéraux des pays riches n'ont le plus souvent profité qu'à une minorité d'investisseurs et renforcé un peu plus les inégalités. Pour le G8, la protection des droits des investisseurs prime sur presque toutes autres considérations. "Surtout, ces accords constituent en l'état une entrave aux politiques de lutte contre la pauvreté dans les pays en développement. En aucun cas ils ne représentent un moyen de mettre le commerce et l'investissement au service du développement, ou de la lutte contre les inégalités.", souligne Sébastien Fourmy. "Tel que présenté, un accord commercial entre les Etats-Unis et l'Union européenne n'aurait que peu d'impacts pour corriger les déséquilibres qui caractérisent le commerce mondial et les règles d'investissement actuels."


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Notes aux rédactions

Photo : La petite cuisine du G8
Oxfam / Andy Aitchison