Le G7 esquisse de timides progrès sur le climat mais ignore le sort des populations les plus pauvres

Pour Nicolas Vercken, directeur Plaidoyer Etudes pour Oxfam France : « Les dirigeants du G7 font de timides progrès sur la question du climat. Mais cela n’est pas à la hauteur des engagements en matière de réduction d’émissions de GES qui sont attendus d’eux. Les pays du G7 ne doivent pas attendre un autre sommet pour agir : ils doivent dès maintenant se défaire de leur addiction au charbon et rassurer les pays en développement en tenant leur engagement d’abonder pour 2020 de 100 milliards de dollars, le fonds pour l’adaptation au changement climatique et des fonds additionnels qui seraient nécessaires sur le long terme. »

Les membres du G7 réunis ce week-end en Allemagne, ont été incapables de prendre des décisions à même de produire des changements significatifs pour les millions de personnes vivant dans la pauvreté.

Certes, il reste des occasions aux dirigeants du G7 de se rattraper après cette piteuse prestation. Ainsi, dès le mois prochain, ils doivent prendre part au sommet sur le Financement du Développement à Addis Abeba pour convenir de réformes ambitieuses du système fiscal mondial, et préciser comment ils vont enfin tenir leurs promesses en matière d’aide au développement, qui remontent à plusieurs dizaines d’années.

Climat

La sortie des énergies fossiles est en vue pour le G7 qui a adopté un objectif de décarbonisation de l’économie mondiale, et a défini un objectif mondial de long terme concernant la réduction de toutes les émissions de GES, en s’approchant des préconisations scientifiques les plus hautes. Le G7 s’est également engagé à transformer les secteurs de l’énergie dans ses pays membres d’ici à 2050. Ces nouvelles mesures, significatives, sont encourageantes.

« Néanmoins, il est regrettable que les annonces spécifiques en matière de réduction des émissions de chaque membre du G7 soient renvoyées à l’accord crucial qui devrait être adopté à Paris en décembre.  Afin de traduire leurs paroles en actes, les pays du G7 doivent maintenant collectivement prendre leurs responsabilités, et se retirer du charbon, le plus polluant de tous les combustibles fossiles » ajoute Nicolas Vercken.

Concernant le fonds climat  qui doit être abondé de 100 milliards de dollars d’ici 2020, les dirigeants du G7 restent évasifs. Leur réticence à mentionner une augmentation des financements publics à cet effet, est inquiétante : ce fonds conditionne en partie le succès de la COP à Paris. Les pays en développement attendent une feuille de route claire, pas des astuces comptables.

Heureusement Angela Merkel a montré la voie à suivre en annonçant de doublement des financements climat allemands : la pression pèse désormais sur les autres pays, qui doivent s’inspirer de cet exemple. Les pays riches ne fournissent actuellement que 2 % des 100 milliards de dollars annuels dont les pays pauvres ont besoin pour s’adapter au changement climatique, ce qui ne représente que 5 % de la richesse des 100 personnes les plus riches du monde.

Santé

Il est bienvenu que le G7 ait souhaité tirer les leçons de la crise Ebola, et fournir une aide aux pays aux prises avec des épidémies. Cependant, la gestion effective et durable de pandémies comme Ebola nécessite plus que le déploiement de mesures d’urgence en cas d’alerte. Les dirigeants du G7 doivent apporter aux pays en développement l’aide financière nécessaire pour mettre en place des systèmes de santé solides et résilients. Cela permettra aux communautés les plus pauvres d’accéder aux services de santé, et aux pays pauvres de se doter de capacités médicales adaptées afin de prévenir et de contenir de futures crises sanitaires.

Faim et alimentation

L’annonce du G7 sur la faim et l’alimentation n’aidera en rien les 2 milliards de personnes dans le monde qui souffrent de la faim ou qui sont mal nourries. Le communiqué du G7 fait référence à l’objectif de faire sortir de la faim et de la malnutrition 500 millions de personnes supplémentaires – objectif impulsé par Angela Merckel en amont du Sommet – hélas, aucun engagement n’y est associé et sans financements publics, le G7 ne sera pas en mesure de tenir cet objectif. Le G7 doit donc revoir son approche, et se concentrer sur la réponse aux besoins des groupes les plus vulnérables, dont les femmes et les petits paysans.

Croissance économique et fiscalité

Les discussions du G7 sur la croissance économique n’ont pas abouti quant à la question des inégalités croissantes au niveau mondial. Il s’agit d’un échec majeur alors que le fossé se creuse entre les plus riches et les plus pauvres et menace la lutte contre la pauvreté et le futur de la croissance économique.

Les mesures du G7 pour s’attaquer à l’évasion fiscale et pour soutenir les administrations fiscales dans les pays pauvres sont bienvenues, mais pour Oxfam, elles ne sont que partielles. Les pays pauvres, qui voient s’évader 105 milliards de dollars par an de taxes non payées, doivent avoir une place à la table des négociations. Il existe des institutions internationales pour la santé, le commerce, ou même le football : il faut désormais mettre en place un organe fiscal intergouvernemental sous l’égide des Nations unies afin de s’assurer que les pays perçoivent bien les impôts qui leur sont dûs par les entreprises.

Chaîne de production et fournisseurs

La mise en place d’un “Fonds Vision Zéro » est bienvenue, mais ne constitue qu’un timide premier pas. Cette initiative se concentre uniquement sur le soutien aux personnes qui ont souffert d’abus au travail, mais ne fait rien pour garantir le respect de conditions de travail justes sur l’ensemble de la chaîne de production. Mieux vaut prévenir que guérir. Le G7 devrait introduire des règles contraignantes sur les normes au travail, qui reposeraient sur les principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’Homme.

Renforcement du pouvoir économique des femmes

Les mesures visant à renforcer le pouvoir économique des femmes via la formation professionnelle sont importantes, mais sans action pour promouvoir la gratuité de l’éducation pour les femmes, leur impact sera limité. Il convient de mettre également en œuvre des mesures pour corriger les inégalités de pouvoir, les stéréotypes de genre, et les discriminations à l’égard des femmes sur le lieu de travail.

Crise grecque et austérité

La crise grecque, qui a dominé le G7 de cette année, ne pourra être résolue par des mesures d’austérité qui présentent une ressemblance troublante avec les politiques d’ajustement structurel désastreuses imposées à travers le monde en développement dans les années 1980 et 1990. De telles politiques ont échoué, alors que le remède a failli tuer le patient. Oxfam appelle le G7 à faire plus qu’un simple ajustement des mesures d’austérité existantes. Pour commencer, il convient d’offrir à la Grèce des possibilités d’annulation ou de restructuration à long terme de sa dette.

 

Contact

Caroline Prak – Oxfam France – 06 30 46 66 04 / cprak@oxfamfrance.org / @carolineprak

Notes aux rédactions

Contact sur place au G7 : Nicolas Vercken, directeur Plaidoyer Etudes.
+33 7 87 49 59 26 et au +49 1577 0691495 / nvercken@oxfamfrance.org