Le Parlement européen loupe de nouveau le coche pour lutter contre l’évasion fiscale

Lors d’un vote crucial, deux commissions du Parlement européen ont renoncé à prendre des mesures significatives en faveur de la transparence fiscale et à adopter un réel reporting pays par pays public.

Manon Aubry, porte-parole d’Oxfam France, réagit : « Malgré les nombreux et récents scandales d’évasion fiscale, les Membres du Parlement européen se sont une nouvelle fois abstenus de prendre des mesures significatives, qui auraient permis une véritable transparence sur les activités des multinationales et les impôts qu’elles paient. En incluant d’importantes échappatoires dans le texte de loi, les Membres du Parlement européen favorisent les grandes multinationales au détriment des PME et des citoyen-ne-s.

Les citoyen-ne-s peuvent tenir les entreprises responsables de leurs pratiques fiscales seulement s’ils savent où elles réalisent leurs bénéfices et les impôts qu’elles payent dans tous les pays où elles opèrent. Il en est de même lorsqu’il s’agit de s’assurer que les gouvernements n’autorisent pas des pratiques d’’évasion fiscale.

Oxfam appelle les Membres du Parlement européen à voter en faveur d’une véritable transparence fiscale lors du prochain vote du Parlement en session plénière et à rétablir la confiance des citoyen-ne-s européen-ne-s dans le système fiscal. Nous attendons également d’Emmanuel Macron et du nouveau gouvernement français qu’ils défendent une véritable transparence fiscale au niveau européen pour prendre à bras le corps la lutte contre l’évasion fiscale. »

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Eleonora Trementozzi – 01 85 34 17 66 – 07 69 17 49 63 etrementozzi@oxfamfrance.org

Notes aux rédactions

-La mesure votée aujourd’hui par le Parlement européen – connue sous le nom de reporting pays par pays public – oblige les entreprises multinationales à rendre publiques les informations sur leurs activités et les impôts qu’elles paient dans chacun des pays où elles ont une activité. Cependant, le texte de loi inclue une clause de sauvegarde permettant aux entreprises multinationales de ne pas publier certaines informations, si elles déclarent que leur publication pourrait nuire à leurs affaires. Cet amendement a été proposé par les groupes des libéraux et des conservateurs au Parlement européen : l’Alliance des Libéraux et Démocrates pour l’Europe (ALDE), le Parti Populaire européen (PPE), le Conservateurs et Réformistes européens (CRE).

-Le Parlement européen a rappelé à plusieurs reprises l’importance de parvenir à une plus grande transparence sur l’activité des multinationales. Les députés européens ont appelé à inclure les critères pour le reporting pays par pays public dans la directive sur les droits des actionnaires ou dans leur rapport d’enquête sur le scandale de Luxleaks. Les scandales d’évasion fiscale du «Luxleaks» et des «Pamana Papers» font également l’objet d’une commission d’enquête du Parlement européen.

-Ce vote représente la position du Parlement européen sur une proposition de directive initiée par la Commission européenne en avril 2016. Le Conseil de l’UE évalue actuellement sa position sur cette mesure et un trialogue devrait ensuite commencer, une fois que les deux institutions auront formalisé leur position.

-En 2016, la France avait été le premier pays à adopter, avec la loi Sapin 2, un reporting public pour les entreprises multinationales. Bien que perfectible sur de nombreux points, ce reporting représentait un premier pas important pour dissuader les multinationales d’échapper à l’impôt. En novembre 2016, le Conseil constitutionnel a porté un coup d’arrêt à cette dynamique positive, en censurant cette mesure sur des arguments très contestables juridiquement. Retrouvez ici la réaction d’Oxfam publiée à cette occasion : https://www.oxfamfrance.org/communique-presse/justice-fiscale/lutte-contre-levasion-fiscale-coup-darret-porte-par-conseil

-En mars 2017 Oxfam a publié le rapport « Banques en Exil », analysant pour la première fois les données issues du reporting pays par pays public des banques européennes, seul secteur pour lequel le reporting par pays public est en vigueur. Ce rapport révélait que certaines parmi les plus grandes banques européennes déclarent des profits dans les paradis fiscaux qui sont en réalité bien supérieurs au niveau de leur activité économique dans ces pays.

-L’évasion fiscale prive chaque année les pays du monde entier, et notamment les pays en développement, de ressources essentielles pour garantir à tous l’accès à des services essentiels tels que la santé et l’éducation, ainsi que pour lutter contre les inégalités et la pauvreté. Pour cette raison Oxfam mène depuis des années un combat contre l’évasion fiscale et se bat pour que des mesures de transparence fiscale soient approuvées à l’échelle nationale, européenne et internationale.