Alors qu’Emmanuel Macron vient d’annoncer la fin de l’opération Barkhane et tandis que le Forum de Paris sur la Paix s’ouvre demain, Oxfam France alerte sur le fait que le gouvernement Français, au contraire de ses partenaires de la communauté internationaux, refuse d’honorer ses engagements en faveur de la réponse humanitaire nécessaire face à la crise que traversent les populations du Sahel. Dans le cas du Mali, la France s’apprête même à suspendre des actions déjà engagées : alors que la démocratie de ce pays est plus fragile que jamais, il est urgent d’y soutenir les acteurs de la société civile, pas de leur couper les vivres.

Il y a 5 mois, la communauté internationale s’était engagée à mobiliser 1,7 milliards de dollars pour prévenir et répondre à une nouvelle crise alimentaire menaçant 38 millions de personnes au Sahel. Cinq mois plus tard, la grande majorité des promesses ont été tenues, puisque les financements mobilisés sont de l’ordre de 1,5 milliards de dollars, représentant 88% des engagements initiaux. Mais selon les données d’Oxfam, la France fait pâle figure à côté des autres bailleurs de fonds et porte la principale responsabilité des promesses non encore tenues, puisqu’elle n’a mobilisé que moins de 40 millions de dollars sur les 180 millions auxquels elle s’était engagée. Pire, cette défaillance française représente les ¾ de ce qu’il reste à apporter pour respecter les engagements collectifs d’avril dernier.

Selon Louis-Nicolas JANDEAUX, chargé de plaidoyer et campagne sur les questions humanitaires chez Oxfam France : « La France n’a mobilisé à l’heure actuelle que 38,9 millions de dollars, soit seulement 22% de sa promesse initiale. Or, si la France ajoutait aujourd’hui ses 142 millions manquant, elle permettrait de combler les ¾ du gap restant par rapport à l’objectif global d’avril dernier, et par conséquent, elle pourrait s’assurer d’un investissement suffisant pour faire face à cette crise alimentaire à court terme. Le retrait militaire ne doit signifier la fin de la solidarité, et l’abandon des populations à la faim »

Par ailleurs, concernant la crise politique que traverser spécifiquement le Mali, Louis-Nicolas JANDEAUX ajoute : « La France a annoncé qu’elle suspendait ses financements vers le Mali il y a d’ores et déjà plusieurs mois, mais elle vient juste de préciser que les organisations de la société civile maliennes allaient également perdre tous leurs financements. C’est pourtant ces dernières qui veillent à l’amélioration de l’égalité femmes-hommes dans des contextes de crise, qui militent pour la défense de la démocratie, qui luttent pour protéger l’espace civique… Ce dont a malheureusement le plus besoin le pays. Ce choix de la France est totalement déconnecté vis-à-vis du contexte et contre-productif ».

Note aux rédactions

Pour être totalement précis la communauté internationale s’est engagée à mobiliser plus de 2,7 milliards de dollars, mais 1,7 milliards lorsque nous excluons la Banque Mondiale

Alors que ce forum planchera entre autre sur « comment une approche intégrée de la crise alimentaire mondiale peut contribuer à la consolidation de la paix », Oxfam France tient à rappeler qu’il y a 7 mois, plus de 400 décideurs politiques internationaux se sont rencontrés dans le cadre de la conférence de haut niveau « Crises alimentaires et nutritionnelles dans les régions du Sahel et du Lac Tchad : Agir maintenant et mieux se mobiliser à l’avenir en Afrique de l’Ouest » organisée à l’initiative de l’OCDE et de l’Union Européenne (UE).  Cette rencontre avait un double objectif : alerter sur l’imminence d’une nouvelle crise alimentaire au Sahel avec plus de 38 millions de personnes qui pourraient sombrer dans la faim (Prévisions du Cadre Harmonisé en Afrique de l’Ouest, Mars 2022 ) et coordonner la mobilisation d’une assistance nutritionnelle et alimentaire d’urgence afin de soutenir au mieux les populations les plus affectées.

En 2020, la France fournissait 126 millions d’euros d’aide au développement au Mali. Sur cette somme, 20 millions sont destinés à l’éducation, 19 millions d’euros pour l’éducation, ainsi que 260 000 euros pour les organisations militant pour les droits humains. Cette dernière somme est majeure pour permettre de structurer ces organisations de la société civile et les soutenir dans leur combat. Cette suspension des financements en 2022 va impacter un grand nombre de projet d’ores et déjà lancé par des ONG françaises ou des organisations locales. Cette suspension concerne l’entièreté des financements français donc tout autant ceux transitant par l’agence française de développement que ceux du Centre de Crises et de Soutien du Ministère de Affaires Etrangères.

Contact

Oxfam : Louis-Nicolas JANDEAUX – lnjandeaux@oxfamfrance.org – 06.49.15.58.60