Menace de quatre famines en 2017 : « trahison ultime de notre humanité commune »

Oxfam appelle à une action humanitaire et politique immédiate

En 2017, le monde risque de connaître un nombre sans précédent de famines car la communauté internationale manque cruellement à ses devoirs envers les populations les plus vulnérables. Oxfam appelle aujourd’hui les bailleurs de fonds à agir sans délai pour aider pas moins de 20 millions de personnes risquant de mourir de faim.

L’état de famine a été déclaré la semaine dernière dans plusieurs régions du Soudan du Sud. Dans le nord du Nigeria, quelque 400 000 personnes vivant dans des zones inaccessibles à l’aide humanitaire connaissent vraisemblablement déjà la famine. Quant au Yémen et à la Somalie, tous deux sont en risque de famine. Les situations de conflit sont le premier facteur expliquant ces crises, même si la sécheresse est en cause en Somalie.

Les pays donateurs n’ont pas suffisamment soutenu les efforts visant à régler ces conflits. Au Yémen, ils alimentent même le conflit à travers la vente d’armes. Ils ont à présent l’obligation morale de mobiliser les 2,1 milliards de dollars nécessaires pour financer une opération humanitaire d’envergure suffisante. Ils doivent trouver des réponses politiques aux causes du basculement de ces pays dans de tels niveaux de souffrance.

Pour Laura Garel, porte-parole d’Oxfam France pour lebassin du Lac Tchad :

« Une famine ne survient pas subitement et sans crier gare. Elle fait suite à des mois de procrastination et de mises en garde ignorées. C’est un processus lent et atroce, engendré par des politiques nationales insensibles au problème et par l’indifférence de la communauté internationale. C’est la trahisonultime de notre humanité commune.

« Les réponses timorées aux appels de fonds des Nations unies ont conduit au sous-financement des efforts d’aide destinés à sauver des vies. Ce vendredi à Oslo, les donateurs n’ont été en mesure de s’engager à répondre aux besoins humanitaires autour du Lac Tchad qu’à hauteur du tiers de ce qui est nécessaire. Cela ne saurait continuer. Les gouvernements doivent sans plus tarder passer à la vitesse supérieure et fournir tous les fonds nécessaires.

« La famine qui sévit déjà dans certaines régions du Soudan du Sud s’étendra à tout le pays si rien de plus n’est fait. En Somalie, au Yémen et au Nigeria, la famine est certesimminente, mais n’est pas encore inévitable. Si, animés par l’impératif de sauver des vies, nous agissons maintenant, grâce à une injection massive de fonds et avec l’appui de la diplomatie, nous pourrons empêcher une hécatombe catastrophique. Sans un apport immédiat de fonds, le système humanitaire ne pourra pas faire face, et le bilan humain sera très lourd. »

Les financements sont nécessaires dès maintenant, car une crise alimentaire peut dégénérer rapidement. Dans une crise, les taux de malnutrition et de mortalité augmentent de façon exponentielle, et non linéaire. Une fois le point de basculement atteint, la dégradation de la situation risque de s’accélérer. L’aide doit être acheminée tout de suite, avant que l’insécurité alimentaire ne devienne absolument critique et que les familles n’épuisent leurs derniers recours pour se nourrir.

Pour faire face à une malnutrition sévère, il faut des infrastructures humanitaires importantes, telles que des centres d’alimentation et de santé. Or ces infrastructures ne sortent pas de terre par enchantement. Les populations en première ligne de ces crises ne peuvent plus attendre.

Oxfam appelle à une action humanitaire et politique immédiate. Il faut notamment :

· renforcer l’aide alimentaire et de première nécessité ;

· ouvrir et sécuriser les territoires pour que les populations puissent accéder à l’aide et pour que les organisations humanitaires puissent les atteindre, notamment en suspendant toutes les opérations militaires qui entravent l’accès humanitaire et la sécurité des déplacements ;

· assurer la protection des civils lors de toute opération militaire ;

· s’engager à l’avenir à réagir plus tôt aux signes avant-coureurs des crises, avant que celles-ci ne s’aggravent ;

· renforcer la capacité des populations à faire face à de futures crises. Même en l’absence de conflit, ces pays demeureront vulnérables et sujets à des crises alimentaires.

En Somalie, 2,9 millions de personnes font face à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire : on parle de situations de « crise » et d’« urgence », qui pourraient culminer en une famine si les pluies attendues entre les mois d’avril et de juin sont insuffisantes, si le pouvoir d’achat des ménages diminue et ne leur permet plus d’acheter de nourriture et que les populations ne reçoivent aucune aide humanitaire.

Au Nigeria, plus de 5 millions de personnes subissent une crise alimentaire. Selon les projections, elles seront 5,7 millions en juin 2017. Au moins 400 000 personnes vivent probablement déjà dans des conditions de famine et, si l’aide humanitaire est entravée, ce nombre risque de passer à 800 000 au cours de l’année 2017.

Au Soudan du Sud, 100 000 personnes sont désormais confrontées à la famine, tandis qu’un autre million sont dites « en risque de famine » dans l’État de Unity.

Au Yémen, plus de 7 millions de personnes sont à un pas de la famine et 10 millions souffrent gravement de la faim. Il s’agit de la plus importante urgence alimentaire au monde. Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, les stocks de blé du pays seront épuisés en avril.

Oxfam porte déjà assistance à plus d’un million de personnes au Yémen, 600 000 au Soudan du Sud et 200 000 au Nigeria. Une mission d’évaluation revient tout juste du nord de la Somalie où l’organisation prévoit également d’intervenir face à la sécheresse.

Contact

Oxfam France – Laura Garel :
06 85 26 79 62

Notes aux rédactions

Des porte-paroles Oxfam sont disponibles pour des interviews.