Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition la France à l’heure du bilan

Le 3 Juin, le conseil de gouvernance de la Nouvelle Alliance du G7 pour la Sécurité Alimentaire et la Nutrition (NASAN) tient sa réunion annuelle au Cap, en Afrique du Sud. Dans la foulée, les 7 et 8 juin, les Etats du G7 se réuniront à Schloss Elmau (Allemagne) [1]. L’occasion de faire le bilan à trois ans de cette initiative lancée par le G7 en 2012, dont Action contre la Faim, le CCFD-Terre Solidaire et Oxfam France ont dénoncé les impacts désastreux dans un rapport publié en septembre 2014 [2]. Un constat confirmé par le bilan d’étape rendu public aujourd’hui par les trois ONG. L’heure sera aussi à l’évaluation des avancées du gouvernement français au regard des recommandations formulées par les ONG.

Alertant sur l’aggravation des risques d’insécurité alimentaire et nutritionnelle en Afrique Subsaharienne, les ONG ont en effet demandé au gouvernement français une réforme radicale de cette initiative ou, s’il n’y parvient pas, de quitter la NASAN d’ici le G7 de juin 2015.

Le bilan d’étape de la NASAN publié ce jour [3], rappelle le rôle prépondérant de la France dans l’Alliance : elle compte parmi ses trois premiers contributeurs avec 754 millions d’euros en 2014. Si des avancées dans la gouvernance de la NASAN ont pu être observées, le poids des multinationales et les intérêts de l’agrobusiness continuent de primer au détriment du soutien à l’agriculture paysanne et de la lutte contre l’insécurité alimentaire et nutritionnelle en Afrique.

Sur le terrain, l’impact des politiques menées dans le cadre de la NASAN sont accablants : en Côte d’Ivoire, les paysans sont liés contractuellement à des multinationales et se voient dans l’obligation de leur payer des services, même en l’absence de récolte. Endettement, risque d’accaparement de terres s’ensuivent. « En Côte d’Ivoire, le constat est sans appel : à cause de la Nouvelle Alliance, des paysans sont démunis, endettés et acculés à céder leurs terres. Et pourtant les Etats membres du G7 semblent fermer les yeux. Notamment la France qui en soutenant des leaders du trading de matière première comme ETG ou Louis Dreyfus contribuent de fait à aggraver les conditions de vie des populations. C’est clairement David contre Goliath : les paysans sont les grands perdants face à des multinationales qui agissent en dehors de tout contrôle. Dès lors, comment les Etats peuvent-ils continuer d’affirmer que leur objectif est la lutte contre la pauvreté et la faim ? ».s’indigne Maureen Jorand du CCFD-Terre Solidaire.

Au Burkina Faso, sur le pôle de croissance de Bagré, 78 % des terres irrigables sont attribuées à des entreprises sélectionnées via un appel d’offre, qui en bénéficient avec des termes préférentiels (baux allant de 18 à 99 ans, exonérations fiscales, etc.) en concurrence déloyale avec des agriculteurs familiaux déjà installés qui se partagent les terres restantes. « Il est extrêmement choquant de constater qu’au Burkina Faso, pays où la France a la responsabilité directe de la mise en œuvre de la NASAN, plus de 9 000 paysans sont déplacés des terres qu’ils exploitaient pour permettre aux entreprises de s’installer sur le pôle de croissance de Bagré. Les compensations promises sont loin de satisfaire les populations locales, les standards internationaux loin d’être respectés, et les risques d’accaparement de terres sont plus importants que jamais », dénonce  Clara Jamart d’Oxfam France.

Depuis le lancement de la NASAN, les sociétés civiles africaines et des Etats membres du G7 ont interpellé leurs gouvernements et rappelé leur opposition à l’initiative. Elles exigent la fin des projets d’investissements et des réformes législatives portées par la NASAN. Si des signes encourageants ont été donnés par la France au sein de la NASAN, ces initiatives restent cependant insuffisantes. Pour Peggy Pascal, d’Action Contre la Faim, « la France doit montrer l’exemple et envoyer un signal politique fort à ses alliés du G7, en sortant immédiatement de cette initiative qui met en péril le droit à l’alimentation, à la sécurité alimentaire et à la nutrition des plus vulnérables ».

 

Contact

Action contre la Faim : Agnes Varraine-Leca – avarraineleca@actioncontrelafaim.org 01 70 84 72 22 / 06 70 01 58 43

CCFD-Terre Solidaire : Karine Appy – k.appy@ccfd-terresolidaire.org 01 44 82 80 67 / 06 66 12 33 02

Oxfam : Caroline Prak – cprak@oxfamfrance.org 01 56 98 24 45 / 06 30 46 66 04 – twitter : @carolineprak

Notes aux rédactions

Etude Action contre la faim, CCFD-Terre Solidaire, Oxfam France.

[1] En amont du G7, le 3 juin prochain se tiendra également la réunion annuelle du Conseil de gouvernance de la Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition (NASAN) au Cap, en Afrique du Sud.

[2] « La faim, un business comme un autre – comment la nouvelle alliance du G8 menace la sécurité alimentaire en Afrique » ACF, CCFD-Terre Solidaire et Oxfam France, septembre 2014.

[3] « Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition – un business comme un autre » – bilan d’étape en amont du G7 de Schloss Elmau. ACF, CCFD-Terre Solidaire et Oxfam France, mai 2015.

Copyright dessins : Aurel pour ACF – les dessins, réalisés gracieusement pour Action contre la Faim, sont utilisables librement par les médias.