Communication d’Oxfam en amont de la réunion des ministres de la santé du G7 les 3 et 4 juin 2021

 Au rythme de vaccination actuel, les pays à faible revenu devraient attendre 57 années pour que l’ensemble de leurs populations soient vaccinées.

Plus d’un million de personnes sont mortes de la COVID-19 depuis la dernière réunion des dirigeants du G7 en février dernier (1). À cette occasion, ces derniers avaient offert de vagues promesses concernant l’augmentation de l’offre mondiale de vaccins, mais avaient surtout refusé de soutenir collectivement la dérogation concernant les droits de propriété intellectuelle et l’investissement dans la fabrication de vaccins dans les pays en développement.

Alors que les ministres de la santé du G7 se réunissent aujourd’hui pour des discussions en vue du sommet des chef·fe·s d’État de la semaine prochaine, la People’s Vaccine Alliance demande aux gouvernements du G7 de cesser de faire des promesses vaines et d’arrêter de  protéger les intérêts des sociétés pharmaceutiques, ainsi que de prendre des mesures urgentes pour combler l’énorme vide en matière de vaccins entre leurs nations et les pays plus pauvres.

Les nouveaux calculs de la People’s Vaccine Alliance (qui compte parmi ses membres des organisations telles que Health Justice Initiative, Oxfam et l’ONUSIDA) montrent que le mois dernier encore, les personnes vivant dans les pays du G7 avaient 77 fois plus de chances d’être vaccinées que celles vivant dans les pays les plus pauvres du monde. Dans leur ensemble, les pays du G7 ont vacciné 4,6 millions de personnes par jour en mai, ce qui signifie qu’au rythme actuel, toutes les personnes habitant les pays du G7 pourraient être entièrement vaccinés d’ici le 8 janvier 2022. En ce qui concerne les pays à faible revenu, il faudrait à ce rythme (63 000 personnes vaccinées par jour) 57 ans pour atteindre le même niveau de protection.

Sur les 1,77 milliard de doses de vaccins administrées dans le monde, 28 % l’ont été dans les pays du G7. En revanche, seulement 0,3 % des doses de vaccins COVID ont été administrées dans des pays à faible revenu, bien que la population des pays du G7 et des pays à faible revenu soit relativement comparable. (2)

Fatima Hassan, fondatrice et directrice de Health Justice Initiative en Afrique du Sud, a déclaré : « Huit personnes sont mortes du COVID-19 chaque minute depuis la dernière réunion des dirigeants du G7. Cela représente plus d’un million de vies perdues, alors que quelques pays seulement, dont le Royaume-Uni et l’Allemagne, continuent de bloquer les propositions visant à lever les brevets sur les vaccins et les traitements anti-COVID, ce qui permettrait à tous les fabricants qualifiés du monde de produire des vaccins au lieu d’une poignée de sociétés pharmaceutiques américaines et européennes. Quelles qu’aient été leurs engagements ou décisions passées, elles ont toujours laissé aux sociétés pharmaceutiques le choix de décider de qui vit et meurt. »

Sandra Lhote Fernandes, responsable du plaidoyer santé chez Oxfam France, a déclaré : « De retour d’Afrique du Sud, le Président Emmanuel Macron doit entendre l’appel lancé par le président sud-africain Cyril Ramaphosa. Ce dernier a été clair : les dirigeant·e·s africain·e·s attendent un soutien du G7 à la demande de levée temporaire des brevets au sein de l’OMC pour augmenter la production des vaccins et protéger leur population ».

« Il est indécent que le Royaume-Uni, l’Allemagne et d’autres pays riches, qui sont en mesure de vacciner leur propre population, empêchent les pays pauvres de fabriquer les doses dont ils ont besoin pour sauver des vies. La triste réalité est que les pays en développement ne peuvent pas seulement dépendre de COVAX ou de la bonne volonté de l’industrie pharmaceutique pour vacciner toute leur population. Les dirigeants du G7 doivent profiter de ce moment pour se placer du bon côté de l’histoire. »

Parmi les pays du G7, seuls les États-Unis soutiennent la proposition de lever temporairement les brevets sur les vaccins anti-COVID portée par l’Afrique du Sud, l’Inde et une centaine de pays en développement. Le Royaume-Uni et l’Allemagne s’y opposent, tandis que le Canada, la France, le Japon et l’Italie sont indécis.

Les sondages (3) montrent qu’en moyenne, 70 % des personnes interrogées dans les pays du G7 estiment que les gouvernements devraient veiller à ce que les entreprises pharmaceutiques partagent leurs formules et leurs technologies, afin que les fabricants qualifiés du monde entier puissent contribuer à accroître l’offre.

Selon un autre sondage récent (4), les Français·es sont parfaitement constient·e·s de la répartition inégale des vaccins anti-COVID entre pays riches et pays pauvres et ils sont 76% à refuser toute idée de privilège en matière d’accès à la vaccination : ils ne souhaitent ni privilège économique lié à la capacité de certains pays d’acheter les vaccins, ni privilège scientifique lié au fait d’avoir découvert les vaccins. La majorité des Français·es (51%) estiment ainsi que, dans le contexte d’une pénurie de vaccins, la priorité devrait être de protéger équitablement toutes les populations vulnérables et tous les personnels de santé de tous les pays en même temps (« développés » ou « en développement »). Par ailleurs, 60% des Français·es estiment que leur gouvernement devrait soutenir l’initiative présentée à l’OMC prônant la levée temporaire des brevets.

Contact presse

Marika Bekier, responsable des relations médias
mbekier@oxfamfrance.org / +33 6 24 34 99 31

Notes aux rédacteurs :

(1) Depuis la dernière réunion des dirigeants du G7 pour un sommet virtuel le 19 février, 1 094 213 personnes sont mortes du COVID, soit l’équivalent de 8 personnes par minute, selon les données de Our World in Data : https://ourworldindata.org/covid-deaths.
(2) Données sur la fourniture et la livraison de vaccins provenant d’Airfinity, de Our World in Data, de l’UNICEF et du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies. Les projections du temps que pourraient prendre les vaccinations sont basées sur le taux moyen de vaccinations entre le 1er mai et le 25 mai 2022, les calculs ayant été effectués le 26 mai 2021.
À eux tous, les pays du G7 vaccinent 4 630 533 personnes par jour. À ce rythme, il faudrait 227 jours pour vacciner l’ensemble de leur population, le 8 janvier 2022, en supposant que chacun reçoive deux doses,
Entre eux, les pays à faible revenu vaccinent 62 772 personnes par jour. À ce rythme, il leur faudra 57 ans pour vacciner leur population avec au moins une seule dose jusqu’au 7 octobre 2078.
Selon les nouveaux calculs effectués par la People’s Vaccine Alliance à partir des données de Our World In Data du 25 mai, 1 774 959 169 vaccins ont été administrés dans le monde. Les personnes vivant dans les pays du G7 ont reçu 497 150 151 de ces vaccins (28%), leur population combinée étant de 774 917 290 personnes. Les personnes vivant dans les pays à faible revenu ont reçu 5 481 470 vaccins (0,31%), leur population totale étant de 660 310 395 personnes.
Pour le mois de mai, 497,15 millions de doses ont été administrées dans les pays du G7, réparties entre 774 millions de personnes = 0,6423 dose par personne, 5,48 millions de doses ont été administrées dans les pays à faible revenu, réparties entre 660 millions de personnes = 0,0083 dose par personne, 0,6423 divisé par 0,0083 = 77,4 – par conséquent, le mois dernier, les personnes vivant dans les pays du G7 avaient 77x plus de chances d’être vaccinées que celles vivant dans les pays pauvres.
La statistique selon laquelle le mécanisme COVAX n’atteindra que 10% des personnes dans les pays en développement cette année n’inclut pas l’Inde.
(3) Pour plus d’informations sur le sondage d’opinion du G7 réalisé par la People’s Vaccine Alliance, cliquez ici : https://www.amnesty.org/en/latest/news/2021/05/an-average-of-7-in-10-across-g7-countries-think-their-governments-should-force-big-pharma-to-share-vaccine-know-how/.
(4) Sondage de Focus2030 publié le 26 mai 2021 et consultable sur https://focus2030.org/Perception-de-la-solidarite-internationale-en-periode-de-Covid?var_mode=calcul