Un mois passé depuis l’appel du Secrétaire général des Nations Unies, mais les efforts menés par la communauté internationale afin de mettre en place un cessez-le-feu là où il est plus nécessaire, se sont soldés par un échec retentissant. Un cessez-le-feu général urgent est nécessaire pour que les pays touchés par le conflit puissent contrer la propagation du coronavirus et ainsi sauver des millions de vies.

Dans un nouveau rapport « Conflict in the time of coronavirus », Oxfam montre que dans de nombreux pays déchirés par des conflits, les violences et les combats se poursuivent sans relâche. Des crises exacerbées par l’échec diplomatique du Conseil de sécurité des Nations Unies et de ses membres permanents, dont la France, par des années d’investissements insuffisants dans les efforts de consolidation de la paix et par l’afflux permanent d’armes dans les zones de conflit.

L’année dernière, plus de 1 900 milliards de dollars ont été investis dans le monde en dépenses militaires. Cette somme est 280 fois plus élevée que la dernière somme fixée par l’appel aux dons de l’ONU contre le coronavirus.

Par ailleurs, 2 milliards de personnes vivent aujourd’hui dans des pays fragiles et zones touchées par des conflits, où les systèmes de santé sont paralysés et où les hôpitaux sont bombardés. Elles se retrouvent parfois obligées de fuir pour rejoindre des camps surpeuplés où les conditions déplorables favorisent la propagation du virus.

« Nous attendions une prise de responsabilité de la part du Conseil et de nombreux pays qui disent soutenir le cessez-le-feu tout en continuant de participer activement à des conflits dans d’autres parties du monde, de déployer des opérations militaires, de vendre des armes et de soutenir des tierces parties impliquées dans les conflits. », affirme José María Vera, directeur général intérimaire d’Oxfam International.

Le vendredi 8 mai, les États-Unis ont finalement refusé de voter une résolution de l’ONU en faveur d’un cessez-le-feu mondial. Pour Oxfam, il s’agit d’un nouvel échec qui vient s’ajouter à la longue liste de défaites dans les tentatives de mettre fin aux conflits, dans un contexte où la paix et la coopération internationale sont plus nécessaires que jamais.

Dans le contexte actuel marqué par le coronavirus :

• Fin avril, la branche de BAE Systems au Royaume-Uni a envoyé un avion-cargo en Arabie saoudite.
• La Russie a des commandes de tanks blindés qui ont été testés en Syrie.
• La France continue d’alimenter la guerre au Yémen en vendant des armes à l’Arabie saoudite.
• L’Allemagne a autorisé la vente d’un sous-marin à l’Égypte en avril.
• Le mois dernier, le Canada a levé la suspension sur les exportations d’armes en Arabie saoudite.

« Les pays exportateurs d’armes doivent impérativement arrêter d’alimenter des conflits et au lieu de cela, redoubler d’efforts pour faire pression sur les pays belligérants en faveur d’un cessez-le-feu mondial afin d’investir dans des processus de paix mettant fin une fois pour toute aux conflits », a ajouté Jon Cerezo, Responsable de campagne humanitaire chez Oxfam France.

Au Yémen, en République Centrafricaine ou au Burkina Faso les craintes sont partagées, comme en témoignait aux équipes d’Oxfam sur le terrain Fatimata Gansonré, habitante de Kaya au Burkina Faso qui a reçu l’aide d’Oxfam : « Depuis le début de l’épidémie de COVID-19, tout est bloqué. On ne peut plus sortir, on ne peut plus se rassembler, nous avons dû mettre un terme à nos activités. La vie est devenue plus rude, et j’ai peur. Ma peur a deux visages : l’insécurité et le virus. Avant le COVID-19, nous avions déjà du mal à trouver de quoi manger, mais c’est encore plus difficile aujourd’hui. »

Oxfam renforce son action face à l’épidémie de Covid-19, et prévoit d’arriver en soutien de plus de 14 millions de personnes dans près de 50 pays. Tout en se concentrant sur certaines des zones de conflit les plus durement touchées comme le Yémen, la RDC et le Burkina Faso, Oxfam fournit des produits d’hygiène et de l’eau propre, des informations sanitaires, un soutien aux hôpitaux ainsi que de l’argent aux familles déplacées par le conflit afin d’acheter des denrées alimentaires et d’autres biens de première nécessité.

 

Contact presse :

Jon Cerezo, Responsable campagne humanitaire, 06 51 15 54 38

 

Notes aux rédactions :

• Rapport Oxfam “Conflict in the time of Coronavirus”
• L’Arabie saoudite a annoncé un cessez-le-feu unilatéral de deux semaines au Yémen à partir du 9 avril et l’a ensuite prolongé d’un mois, mais des affrontements continuent d’avoir lieu entre toutes les parties au conflit. À peine la moitié des services de santé yéménites fonctionnent encore tandis que plus de 100 000 cas de choléra ont été recensés cette année.
• Au Burkina Faso, en raison des violences actuelles, les populations se voient souvent dans l’incapacité d’accéder à des biens et services essentiels comme l’eau, les soins de santé et les denrées alimentaires. Les restrictions en place visant à prévenir la transmission du virus sont d’autant plus d’obstacles.
• L’ONU vient d’annoncer la suspension de son intervention humanitaire en République centrafricaine, dans les zones où des groupes armés ont violé le cessez-le-feu dans une montée subite de violence, malgré l’appel à la paix lancé et le fait que 14 groupes armés avaient signé un accord de paix avec le gouvernement en février 2019.
• En Afghanistan, les négociations de paix intra-afghanes prévues pour mars ont été retardées et les Talibans refusent un cessez-le-feu si le gouvernement ne s’y engage pas aussi.
• En Colombie, les rebelles de l’ELN ont déclaré le cessez-le-feu, mais pas les autres groupes armés, ni le gouvernement.
• Au Soudan du Sud, certains financements destinés à la consolidation de la paix ont été interrompus par les bailleurs, qui donnent la priorité à la lutte contre le coronavirus.
• La position de la France sur la vente d’armes aux pays de la coalition dirigée par l’Arabie Saoudite, n’a été mise en question à aucun moment, même après les informations publiées qui démontraient la participation d’armes françaises dans le conflit au Yémen.
• Des données de suivi des vols indiquent que l’avion-cargo 737 de BAE Systems a effectué un vol entre l’usine de l’entreprise à Warton au Royaume-Uni et la base aérienne de King Fahd en Arabie saoudite, via une base militaire britannique à Akrotiri, à Chypre, le 23 avril. En même que les combats qui ont place au Yémen depuis plus de 5 ans continuent en ce moment, des cas de Covid sont confirmés dans plusieurs régions du pays.
• Selon plusieurs sources, le Gouvernement allemand a autorisé la livraison d’une série d’équipements militaires produits par Thyssen Krupp le 1er avril, y compris un sous-marin pour l’Égypte, qui a participé au blocus maritime au Yémen dans le cadre de la coalition menée par l’Arabie saoudite.
• Le ministre russe de l’Industrie et du commerce a déclaré à la mi-avril que son tank T-14 avait été testé en Syrie.
L’ONU a lancé un appel à hauteur de 6,7 milliards de dollars pour répondre à la crise du coronavirus. Deux milliards de personnes vivent dans des régions touchées par des conflits selon l’Aperçu de la situation humanitaire mondiale 2019 de l’ONU.