Somalie : les donateurs doivent se concentrer sur la crise humanitaire, pas sur les pirates

Alors que Bernard Kouchner doit prendre part aujourd’hui à une réunion des donateurs pour la Somalie à Bruxelles, Oxfam France demande que la question de la piraterie n’éclipse pas l’urgence humanitaire à laquelle font face plus de trois millions de personnes en Somalie.

La conférence internationale qui a lieu aujourd’hui, sous l’égide de l’Union européenne et des Nations unies, intervient à un moment critique alors que plus de 3,2 millions de Somaliens ont désespérément besoin d’aide, soit une augmentation de 77% depuis janvier 2008. Plus d’un million de personnes ont fui leurs foyers au cours des deux dernières années.

« La piraterie, qui fait la une de l’actualité internationale, est symptomatique de questions plus profondes qui n’ont jamais été résolues depuis l’effondrement du gouvernement national en 1991 » déclare Robert Maletta pour Oxfam international. « Sans opportunités économiques offrant des alternatives à la criminalité, ni ordre public pour freiner ces activités, la piraterie se poursuivra, encouragée par la perspective des retombées économiques juteuses des détournements de navires. »

La sécheresse s’accentue à travers le pays, dévastant les sources de revenus des civils et laissant une majorité d’entre eux avec peu ou pas d’accès à de l’eau propre. Il est de plus en plus difficile pour les familles de subvenir à leurs besoins les plus basiques alors que les prix des denrées alimentaires de base n’ont jamais été aussi hauts – la plupart ayant doublé par rapport à la même période l’année dernière.

« La détresse des civils somaliens et les moyens d’alléger leurs souffrances devraient figurer en haut de l’agenda des gouvernements donateurs à Bruxelles. La communauté internationale doit de toute urgence consacrer toute son attention à la recherche de moyens pour venir en aide aux millions de personnes qui en ont désespérément besoin » ajoute Robert Maletta..

Oxfam France vient de publier son premier « baromètre annuel de la protection des civils » dans lequel il ressort qu’en 2008 la communauté internationale a octroyé près de 9 milliards de dollars d’aide publique au développement à l’Irak et 4 milliards à l’Afghanistan, contre seulement 400 millions à la Somalie. Pourtant, la Somalie arrive en tête du classement des pays ayant connu les plus importants déplacements de population l’année dernière.

« La France, dans le cadre de sa présidence de l’Union européenne, a su faire en sorte que la communauté internationale déploie une opération militaire contre la piraterie : elle doit désormais mobiliser la même volonté politique en faveur des civils somaliens » déclare Nicolas Vercken d’Oxfam France.

Alors que les civils continuent d’être prisonniers des champs de bataille et forcés de fuir leurs foyers en masse, le manque de justice et l’impunité ont exacerbé la crise humanitaire en Somalie. Au-delà de l’aide, Oxfam France fait appel à la France et aux autres participants à la conférence pour qu’on enquête sur les violations du Droit international humanitaire et des Droits de l’Homme qui ont été rapportées à travers le pays.

« Les groupes impliqués dans la piraterie doivent bien entendu être tenus responsables de leurs actes ; mais la communauté internationale doit appliquer ces mêmes standards aux groupes coupables de violations du Droit international humanitaire et des Droits de l’Homme à travers le pays, même quand cela ne concerne pas directement des navires ou des touristes occidentaux » conclut Nicolas Vercken.

Notes aux rédactions :

43% de la population nationale, soit 3,2 millions de personnes, ont besoin d’assistance d’urgence. Ce qui correspond à une augmentation de 77% depuis janvier 2008. Les citadins pauvres et les déplacés constituent environ deux tiers (2 millions de personnes) des victimes de cette crise. Dans les zones rurales, d’après les Nations unies, 1,2 million de personnes sont touchées.

Un million de personnes ont dû fuir leurs foyers à cause de la violence et de l’insécurité prévalentes depuis 2007. On compte désormais plus de 1,3 millions de déplacés en Somalie.

Les taux de malnutrition aiguë à travers la majorité des zones du sud et du centre de la Somalie dépassent la limite des 15% définie par les Nations unies (OCHA).

Un enfant sur six souffre de malnutrition aiguë en Somalie (soit environ 200 000). D’après la FSAU, un enfant sur 20 (soit 60 000) souffre de malnutrition grave et risque de mourir sans traitement spécialisé.

D’après l’UNICEF, seuls 29% de la population somalienne a accès à de l’eau propre et potable et la majorité de la population n’a que peu ou pas d’eau.

Oxfam France vient de publier un « Baromètre de la protection des civils 2008 » qui vise à évaluer l’impact sur les civils de 10 conflits qui se sont poursuivis en 2008, ainsi que la réponse de la communauté internationale, y compris le traitement médiatique dont ont bénéficié ces différents conflits.

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Notes aux rédactions