Les gouvernements de l’Union européenne viennent de prendre la décision de relancer les négociations sur la transparence fiscale des multinationales, en soutenant une proposition qui oblige ces dernières à rendre compte publiquement des bénéfices qu’elles réalisent et du montant des impôts qu’elles paient là où elles ont une activité réelle. Les États membres, le Parlement européen et la Commission devront à présent se mettre d’accord sur un texte de compromis dans le cadre de négociations en « trilogue ».

 

Pour Quentin Parrinello, porte-parole d’Oxfam France : « Après 5 ans de blocage sous la pression des paradis fiscaux européens, cet accord est un premier pas important vers une plus grande transparence fiscale des entreprises, mais ce n’est pas suffisant. Le texte doit évoluer pour que cette mesure soit réellement utile et ne soit pas une transparence en trompe l’œil. Si l’on veut véritablement mettre fin au fléau de l’évasion fiscale les entreprises doivent publier des informations concernant leurs activités dans TOUS les pays où elles opèrent, sans aucune clause d’exception, et pas seulement dans les pays européens et dans une liste européenne de paradis fiscaux quasiment vide ».

« Nous appelons la France à porter activement une proposition ambitieuse d’un reporting public pays par pays accessible à tous. La France était motrice il y a quelques années auprès de ses partenaires européens, elle doit poursuivre ses efforts et être cohérente ! »

Contact presse

Pauline Leclère – pleclere@oxfamfrance.org 07 69 17 49 63

Notes aux rédactions :

– Cette mesure s’applique déjà aux banques françaises et européennes et a permis d’établir que les 20 plus grandes banques européennes réalisaient un quart de leurs bénéfices dans les paradis fiscaux (selon un rapport d’Oxfam – 2017)

– Aujourd’hui, une majorité qualifiée d’Etats membres au sein du Conseil Compétitivité a apporté son soutien à une proposition visant à demander la publication d’informations sur les revenus générés et impôts payés par les entreprises multinationales. La semaine prochaine, les Etats membres devraient confirmer leur soutien lors d’un vote officiel.

– En 2016, à la suite du scandale Luxleaks, la Commission européenne avait adressé au Parlement et au Conseil de l’Union européenne une première version de directive. Le Parlement européen avait voté en faveur du texte en juillet 2017.

– Selon l’analyse réalisée par Oxfam et par une coalition d’acteurs comprenant des syndicats et des ONG, la version de compromis soutenue aujourd’hui par le Conseil de l’Union européenne comporte d’importantes faiblesses qui amoindrissent fortement la portée du texte :
1. Le compromis proposerait aux entreprises de désagréger les informations sur les activités et les impôts payés par pays uniquement pour les pays européens et à une liste de pays tiers « posant des challenges particuliers », ce qui pourrait correspondre à la liste européenne des paradis fiscaux. Oxfam estime que les principaux paradis fiscaux sont absents de cette liste, faute de critères assez ambitieux.
2. Le compromis offrirait une clause d’échappatoire permettant aux entreprises de retarder de 6 ans la publication d’une information jugée par l’entreprise comme étant trop sensible.
3. Le compromis ne s’appliquerait qu’aux entreprises avec un chiffre d’affaires supérieur à 750 millions d’euros, excluant 85 à 90% des entreprises multinationales.

– Selon des estimations prudentes, les gouvernements à travers le monde perdent en moyenne 245 milliards de dollars de recettes par an à cause de l’évasion fiscale des multinationales. Pour les pays en développement, les pertes correspondent à plus de la moitié de leurs budgets de santé combinés. Près de 66 milliards de dollars par an seraient délocalisés au Luxembourg, le pays au cœur du scandale #OpenLux par les multinationales.
– Depuis le début de la pandémie de COVID-19, la Commission européenne a approuvé des soutiens publics aux entreprises souffrant des conséquences économiques de la crise s’élevant à 3 100 milliards d’euros.