La menace de vagues de famine et d’insécurité alimentaire extrême liées à la pandémie de COVID-19 déclenche de puissantes réactions au sein de la communauté internationale. Cependant, le manque de financements entrave les efforts des organisations humanitaires pour apporter une aide immédiate aux personnes dans le besoin.

Une nouvelle analyse d’Oxfam révèle que la réponse de la communauté internationale à l’insécurité alimentaire mondiale est dangereusement insuffisante, notamment dans les 7 pays les plus touchés. Le rapport, intitulé « Plus tard sera trop tard ! », est destiné à la réunion de haut niveau qui est organisée aujourd’hui par le Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA) dans l’objectif de « maintenir la sécurité alimentaire et nutritionnelle à l’ordre du jour des programmes mondiaux de développement durable ».

Pour Hélène Botreau, Chargée de Plaidoyer Sécurité Alimentaire et Agriculture : « Cette semaine, lors du Comité de la sécurité alimentaire mondiale, les gouvernements vont se réunir pour discuter de la transformation de nos systèmes agricoles et alimentaires et des impacts de la COVID 19. Nous espérons que ces discussions donneront lieu à un changement de paradigme où les droits des populations les plus marginalisées seront priorisés. Il faut s’attaquer aux causes structurelles de la faim et engager une transition radicale vers un système alimentaire plus juste, plus durable, et qui soutienne les petit.e.s exploitant.e.s agricoles. Après des années de négligence, plusieurs millions de personnes restent vulnérables aux chocs tels que les pandémies, les changements climatiques et les conflits. Dans certains pays, la famine est imminente : il est aussi urgent de tirer la sonnette d’alarme auprès des Nations Unies qui a une responsabilité à cet égard et souligner que nous n’en faisons toujours pas assez pour l’éviter.»

Au Yémen, en République démocratique du Congo (RDC), au Nigéria, au Burkina Faso et en Somalie, c’est-à-dire dans cinq des sept pays où la situation d’insécurité alimentaire est la plus préoccupante, les bailleurs n’ont toujours pas versé de fonds pour la « sécurité alimentaire liée à la pandémie de COVID-19 », qui faisait partie de l’appel d’aide humanitaire global des Nations Unies chiffré à 10,34 milliards de dollars. Et ce, malgré le fait que plus de 55 millions de personnes dans ces sept pays les plus touchés, dont l’Afghanistan et le Soudan du Sud, sont confrontés à des niveaux d’insécurité alimentaire de plus en plus alarmants.

« En juillet, nous avons alerté que d’ici à la fin de l’année, 12 000 personnes par jour pourraient mourir de la faim provoquée par la pandémie. Des preuves criantes montrent que les fonds dédiés aux mesures de préparation et de prévention permettraient de sauver des vies aujourd’hui, mais aussi de rompre ce cycle vicieux de pauvreté et de faim afin de donner de l’espoir pour l’avenir. », ajoute Hélène Botreau.

À ce jour, les bailleurs ont promis de verser un peu plus de 28 % du montant demandé dans l’appel des Nations Unies lancé au mois de mars. Tous les secteurs sont chroniquement sous-financés et, les secteurs les moins financés de tous sont la sécurité alimentaire (10,6 %) et la nutrition (3,2 %).

Selon Jon Cerezo, Responsable de la Campagne Humanitaire : « Au Yémen, en plein cœur de la guerre, la situation ne cesse de s’aggraver avec un accès humanitaire extrêmement compliqué et un manque de financements encore plus fort que l’année dernière. Même le Burkina Faso, l’un des premiers pays à avoir été touché par la crise alimentaire en Afrique, n’a obtenu que la moitié de l’aide humanitaire dont il a besoin.

En 2017, après une crise alimentaire à grande échelle, la communauté internationale avait parlé d’une seule voix pour promettre que le monde ne verrait plus jamais de famine de cette ampleur. Pourtant, nous en sommes encore là, dans une relative indifférence. Des millions de personnes ne peuvent tout simplement pas se permettre d’attendre. »

La pandémie a entraîné de graves conséquences économiques, notamment en privant les gens à la fois des ressources nécessaires pour nourrir leur famille mais aussi de celles en provenance de la communauté internationale du fait de de toutes les priorités concurrentes. « Nous savons que 2020 a été une année de crise sans précédent, mais notre principal objectif devrait être avant tout d’assurer la survie des gens », ajoute Jon Cerezo

 

Contact presse :
Jon Cerezo, Responsable Campagne Humanitaire : 06 51 15 54 38

 

NOTES AUX RÉDACTIONS :

• Les montants des fonds destinés à la réponse humanitaire à la pandémie de COVID-19 proviennent des rapports du Service de suivi financier du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (UNOCHA) (30 septembre 2020).
• Seuls 28 % (2,85 milliards de dollars) des 10,19 milliards de dollars demandés dans la Riposte globale du Système des Nations Unies face à la COVID-19 ont été versés. Si l’on ventile ce pourcentage par secteur, cela représente 10,6 % (254,4 millions de dollars versés sur les 2,4 milliards demandés) pour la sécurité alimentaire et à peine 3,2 % (7,9 millions de dollars versés sur les 247,8 millions demandés) pour la nutrition. Source : chiffres de l’UNOCHA en date du 30 septembre 2020
• Tous les secteurs sont chroniquement sous-financés y compris ceux des violences fondées sur le genre (58 %), de la protection (27 %), de la santé (26,6 %) ainsi que de l’eau, l’assainissement et l’hygiène (17,2 et, les secteurs les moins financés de tous sont la sécurité alimentaire (10,6 %) et la nutrition (3,2 %).
• Les Nations Unies ont divisé leur appel humanitaire en besoins « liés à la pandémie de COVID-19 » et besoins « non liés à la pandémie ». Dans les six des sept pays où la situation de faim est alarmante, les bailleurs ont fourni moins de 40 % des financements nécessaires pour lutter contre l’insécurité alimentaire liée à la pandémie.
• La situation au Nigéria, en Afghanistan, au Burkina Faso et en RDC est aujourd’hui plus grave qu’en 2017, lorsque la menace de quatre famines simultanées se profilait à l’horizon et ne fut évitée que grâce à un appel lancé à la dernière minute par les Nations Unies pour inciter les bailleurs à apporter un soutien massif.
• Certaines régions du Soudan du Sud et du Burkina Faso connaissent actuellement des conditions proches de la famine