Le Niger : la cristallisation des luttes sahéliennes

Le Niger est le pays le plus vaste d’Afrique de l’Ouest. Situé au centre de la région sahélienne, il marque également la frontière entre l’Afrique noire et l’Afrique du Nord. Pays chargé d’histoire, le Niger constitue l’un des 6 pays avec lesquels Oxfam travaille au Sahel, aux côtés du Burkina Faso, du Mali, du Sénégal, du Tchad et de la Mauritanie.

Le Niger, un grand pays chargé d’histoire

Carte d’identité du Niger

  • Géographie : la République du Niger est un pays situé dans la région du Sahel, en Afrique de l’Ouest. C’est un grand pays à l’échelle de la région : il compte une superficie de 1 267 000 km carré, et sa capitale est la ville de Niamey.
  • Population : il compte 24,2 millions d’habitants en 2020 selon la Banque Mondiale, avec un taux de croissance démographique à 3,8%.
  • Langues : si le français est la langue officielle du pays, il coexiste avec le Haoussa, le Zarma, le Tamachek, le Foulfoulde, le Kanuri, le Toubou et l’Arabe.
  • Religions : il s’agit d’un pays dont les habitants sont très largement de confession musulmane (98%), les autres religions et croyances existantes dans le pays sont le christianisme et l’animisme.
  • Monnaie : la monnaie est le Franc CFA, monnaie instaurée par la France lors de la période coloniale ; ce Franc est encore aujourd’hui indexé sur l’euro.
  • Politique : c’est un régime démocratique qui est aujourd’hui en place, avec Mr. Mohamed Bazoum à sa tête depuis 2021.

Un des pays les plus pauvres du monde malgré ses richesses

Le Niger est l’un des pays les plus pauvres de la planète, et il occupe la dernière place du classement de l’Indice de Développement Humain (IDH) établi chaque année (189/189) selon le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). Le Niger a une économie peu diversifiée, dépendante de l’agriculture pour 40% de son PIB. Le niveau d’extrême pauvreté à 41,8% en 2021 concerne plus de 10 millions de personnes. Même dans la pauvreté, s’imposent les inégalités de genre : selon un rapport sur le Profil Genre Pays publié en 2020 par la Banque Africaine de Développement, 28% des femmes âgées de 20 à 24 ans ont été mariées ou ont vécu en union avant l’âge de 15 ans. Le taux d’alphabétisation est aussi éloquent, puisque seulement 18% des femmes savent lire et écrire contre plus du double pour les hommes (40%). Moins de filles et de jeunes filles sont scolarisées par rapport aux garçons, ce qui maintient les femmes (qui travaillent à 72% dans le secteur agricole au Niger) à vivre pour 67% d’entre elles en deçà du seuil de pauvreté national. Et la situation sécuritaire n’arrange rien à ces problèmes. Au-delà de la menace terroriste dans son propre pays, le Niger fait face à un afflux de réfugiés fuyant les conflits au Nigéria au Mali et au Burkina Faso. En mars 2022, le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) recensait environ 250 000 réfugiés et plus de 276 000 personnes déplacées sur le territoire. Aujourd’hui, le pays est surtout confronté à une situation d’extrême pauvreté et ses recettes restent trop dépendantes de la production d’uranium, dont le cours, longtemps en baisse ou stable, remonte depuis 2007.

Il en va de même pour les recettes liées au pétrole, deuxième source financière du pays. Néanmoins, suite à la construction d’un oléoduc sur le territoire, la production de pétrole du Niger pourrait passer de 20 000 barils par jour en pleine capacité à 110 000 barils par jour. L’économie bénéficie également de l’essor du domaine du BTP et des télécommunications, mais cette croissance ne parvient pas à équilibrer la balance face à la plus grande croissance démographique du monde (3,8%). Après la crise sanitaire, la croissance a fortement chuté, basculant une partie considérable de la population dans la pauvreté. Par ailleurs, pour les raisons sécuritaires liées à la menace terroriste, le Niger a consacré près de 10% de son budget aux dépenses militaires et de sécurité en 2021. Néanmoins, l’augmentation de l’aide publique au développement (plus de 14% en 2020) peut être perçu comme un premier encouragement, que l’Initiative de suspension du service de la dette portée par le Club de Paris (groupe informel de créanciers publics dont le rôle est de trouver des solutions durables aux difficultés de paiement de pays endettés) et le G7 permettraient de poursuivre.

Un combat historique pour l’indépendance

Le territoire du Niger, pays enclavé d’Afrique noire, se partage entre l’aire saharienne et l’aire sahélienne. Ancien lieu de rencontres et d’échanges commerciaux et culturels avec le Maghreb, le Niger s’est trouvé délaissé par ces grands courants à partir de l’arrivée des européens venus de la côte, au XIXe siècle. Colonie française à partir de 1922, le pays accède à l’indépendance en 1960. L’évolution politique conduit, tout d’abord, à un régime civil autoritaire, puis à un régime militaire de 1974 à 1991. En 1991, une transition démocratique se met en place, perturbée à deux reprises par des coups d’État.

Les défis actuels du Niger

Un pays particulièrement touché par les conséquences du dérèglement climatique 

Selon la Banque Mondiale, au Niger et dans le reste du Sahel, la menace du changement climatique est une réalité quotidienne pour les habitants. Les températures y augmentent 1,5 fois plus vite que dans le reste du monde. Les sècheresses, les inondations de plus en plus fréquentes et la dégradation des sols entraînent des pertes agricoles et aggravent la sécurité alimentaire et nutritionnelle, sans compter les profondes inégalités économiques et sociales qui régissent le pays. Pour amoindrir les écarts de développement, plusieurs choix politiques et économiques pourraient être faits avec l’appui de ses partenaires ; pour se relever des chocs climatiques et sanitaires, ainsi qu’à l’insécurité régionale et intérieure. Le dérèglement climatique menace très fortement le développement de la région, alors que 70% de sa population travaille dans l’agriculture de subsistance et demeure très affectée par les conditions météorologiques instables.

Comme le montrait notre Rapport sur les inégalités d’émission carbone publié en 2020, les populations qui polluent le moins sont paradoxalement les plus impactées par les conséquences du dérèglement climatique.

Une insécurité alimentaire qui s’aggrave au Niger

Au Sahel, les experts prévoient que d’ici 2100, la température augmentera de 3°C à 6°C, aggravant les problèmes de sécurité alimentaire, de raréfaction de l’eau mais aussi les conflits et les crises humanitaires déjà existantes et à venir. Toujours selon la Banque Mondiale, plus de 80 % de la population nigérienne vit de l’agriculture et les petits exploitants sont les plus directement touchés par les effets de la variabilité climatique. La violence a explosé au cours des dernières années, parfois causée par la raréfaction des ressources naturelles, entraînant le déplacement de deux millions de personnes au sein de leur pays. De plus, l’impact social et économique de la crise sanitaire menace d’effacer cinq années de progrès en matière de développement.  Ainsi, selon le Programme alimentaire mondial :

1

Plus de 3,3 millions de nigériens sont affectées par une insécurité alimentaire sévère de mars à mai 2022

2

1,5 millions d’habitants sont exposés à une insécurité alimentaire chronique

3

4,4 millions de personnes qui auront besoin d’une assistance alimentaire immédiate pendant la période de soudure 2022 (juin-août)

Le Niger, espace transitoire des migrations

Le Niger, par sa position sur le continent, est une terre de transit pour les personnes migrantes africaines. Mais au-delà de cela, s’impose le constat d’une situation sécuritaire qui s’est dégradée à la fois au niveau national et régional. Depuis l’émergence de différents groupes armés ainsi que de groupes terroristes au Sahel, le Niger est devenu un refuge pour de nombreux citoyens maliens par exemple. A Ouallam, ville située à une centaine de kilomètres au nord de Niamey, la capitale, des habitants issus de plusieurs communautés différentes (déplacés interne, immigrés, autochtones) font vivre des cultures de légumes et de fruits partagés à l’initiative du Haut-Commissariat pour les Réfugiés des Nations Unies. La grande diversité des habitants de la ville illustre l’ampleur de la crise des déplacements à laquelle le Niger est actuellement confronté. La situation sécuritaire du Sahel est très précaire, et le Niger n’échappe pas aux conséquences de l’instabilité politique ni aux attaques régulières de groupes armés. A ce jour, ces violences seules ont poussé 250 000 réfugiés (pour la plupart originaires du Mali et du Nigéria) au Niger et le nombre de déplacés internes s’élève à plus de 260 000. Toutes ces personnes, fragilisées par les dynamiques de déplacements et souvent de pauvreté, le sont d’autant plus par l’insécurité alimentaire exacerbée par les dérèglements climatiques.