« Les nouvelles générations ont une prise de conscience indéniable »

Younoussi est un jeune activiste nigérien. Il est engagé pour défendre les droits des populations face aux exploitations minières.

Au collège, il était déjà intéressé par les actions collectives. Il avait monté une association pour défendre les droits des élèves puis continuât au lycée et à l’Université jusqu’à devenir le secrétaire général de l’Union des Etudiants Nigériens de l’Université de Niamey (UENUN). « C’est le fruit d’un climat familial, mon père était lui-même un militant politique. »

Younoussi a arrêté ses études en Master de Philosophie pour intégrer le ROTAB, le Réseau des Organisations pour la Transparence et Analyse Budgétaire au Niger en tant que stagiaire. Il est aujourd’hui chargé de projet pour la promotion des droits socio-économiques des communautés riveraines des sites d’exploitation minières.

Le ROTAB s’est mobilisé pour changer la loi minière. Interpellés, les étudiants ont eu une réflexion sur ce que leur rapportaient les ressources naturelles exploitées par des compagnies. « Le ROTAB nous a aidé à mieux comprendre. J’ai pu sensibiliser les autres étudiants sur le problème des sociétés extractives. »

« Sur le terrain nous organisons des comités de veille citoyenne que nous formons et outillons. Quand ils constatent des manquements de la part des compagnies sur les règles de sécurité, foncières ou environnementales, ils tirent la sonnette d’alarme. »

Crédit photo : Oxfam / Sylvain Cherkaoui

Ils ont également crée un comité des femmes. Selon une étude du ROTAB, 46% du travail dans les exploitations est fait par les femmes. « Les jeunes filles sont exploitées pour le travail, le lavage, la restauration et la prostitution. Ces comités veillent spécifiquement sur ces jeunes femmes. »

Pour Younoussi, il y a également un véritable problème environnemental. « Ces exploitations dégradent les champs cultivables et empoisonnent le bétail. » Le contrôle citoyen permet de mettre la pression sur les autorités pour qu’elles agissent contre les exploitants illégaux.

« Tant que les décideurs politiques ne changeront rien, on continuera notre lutte. Les nouvelles générations ont une prise de conscience indéniable. »

Younoussi, super héros du Sahel

« Les nouvelles générations ont une prise de conscience indéniable. »

L’impact des multinationales au Sahel

Les pays du Sahel disposent de ressources naturelles substantielles. Alors qu’elles sont majoritairement exploitées par des entreprises étrangères, les populations peinent à en voir les retombées positives. Au Niger, quatrième producteur mondial d’uranium, principal produit d’exportation du pays, les revenus de l’uranium ne contribuent qu’à hauteur de 4% à 6% du budget du Niger, pendant que l’aide au développement en représente près de 40%.

En 2013, lors de la renégociation des contrats entre Areva (aujourd’hui Orano) et l’Etat du Niger, l’entreprise française avait été contrainte d’augmenter sa contribution au budget nigérien pour l’exploitation de l’uranium. Mais quelques années plus tard la redevance payée par le groupe au Niger avait en réalité diminué : pour une production équivalente, le groupe a payé une redevance inférieure en 2015 qu’en 2014, privant le pays de 15 millions d’euros.

Mettre la fiscalité au service du développement et de la réduction des inégalités nécessite donc d’importantes réformes, privilégiant des instruments de fiscalité progressive et assurant que les grandes entreprises et les plus fortunées participent pleinement aux efforts budgétaires. Mais la mobilisation de ressources supplémentaires n’a de sens que si elle se traduit par une augmentation des dépenses vers les secteurs sociaux et en particulier vers la santé, l’éducation et les dépenses de protection sociale, pour subvenir aux besoins des populations les plus vulnérables et faire naitre une classe moyenne, future génération de contribuables.

Pour tout comprendre de la situation au Sahel voir notre page dédiée au sujet.