Etre un-e réfugié-e : impressions du camp de Za’atari et d’ailleurs

Qu’est-ce que cela fait d’avoir dû se réfugier dans un pays inconnu et de dépendre de l’aide humanitaire pour sa survie ? Comment savoir où s’adresser, à qui faire confiance pour obtenir des renseignements fiables ? Comment subvenir aux besoins essentiels de sa famille ?

A l’occasion du 20 juin, qui marque la journée mondiale des réfugiés, nous avons voulu laisser la parole à ceux qui vivent cette sitation, à celles et ceux qui sont loin de chez soi et souvent tributaires d’autrui.

Afin d’en savoir plus sur la façon dont les Syriennes et Syriens réfugié-e-s en Jordanie vivent l’aide humanitaire internationale, Oxfam a lancé un travail de recherche sur les perceptions des réfugié-e-s. Nous avions pour objectif de non seulement améliorer nos services et notre communication à l’intention des réfugié-e-s, mais aussi de nous assurer que les personnes touchées par la crise soient entendues et contribuent à façonner l’aide humanitaire, aujourd’hui et demain.

On compte désormais près de 600 000 réfugiés syriens officiellement enregistrés en Jordanie, ce qui pèse sur les infrastructures et les services publics jordaniens. Bien que le camp de Za’atari soit le plus connu, et souvent cités dans les médias, 80 % des personnes qui ont traversé la frontière pour fuir les violences en Syrie vivent dans des communautés à l’extérieur des camps de réfugiés. Les réfugiés syriens installés à proximité des villes et des villages ne sont pas légalement autorisés à travailler et restent donc tributaires de l’aide humanitaire.

De nombreux organismes gouvernementaux et onusiens, ainsi que des ONG locales et internationales, apportent une aide humanitaire pour tenter d’alléger les souffrances des réfugié-e-s et de renforcer la capacité des communautés d’accueil jordaniennes à faire face à cet afflux. Mais les résultats de l’étude témoignent des difficultés rencontrées au jour le jour par les réfugié-e-s : 50 % des personnes interrogées dans le camp de Za’atari, dans les communautés d’accueil en zones urbaines, mais aussi dans les campements non officiels, ont rapporté des difficultés d’accès aux services de base.

À Za’atari, pas moins de 74 % des personnes interrogées ont indiqué que la distance entrave leur accès aux services. Cela peut sembler étrange quand on pense aux concentrations de réfugié-e-s sur un même site. Mais selon une estimation récente, Za’atari constituerait désormais la quatrième plus grande ville de Jordanie, avec une population de 80 000 à 120 000 habitants.

25 % des personnes interrogées ont également déclaré que le manque d’informations sur les services les empêchait d’obtenir de l’aide. Dans les communautés d’accueil aussi, la distance et le manque de connaissance des services sont cités comme des freins à l’accès à des services médicaux, scolaires et nutritionnels de qualité.

Il est ressorti de l’étude qu’un grand nombre de personnes interrogées comptent sur le bouche à oreille pour s’informer sur les services disponibles, d’où la vulnérabilité des bénéficiaires aux rumeurs, à la manipulation des informations et aux lacunes générales en matière de communication. C’est un problème particulièrement épineux dans les communautés d’accueil, avec le dispersement des réfugiés.

Tant dans les camps que dans les communautés d’accueil, les réfugié-e-s estiment ne pas bénéficier d’une communication claire sur les types de services à leur disposition.

Notre rapport, disponible en anglais ici, adresse une série de recommandations au gouvernement jordanien, aux bailleurs de fonds, aux agences des Nations Unies et aux ONG actives dans le pays pour renforcer l’offre de services. Par exemple, les organismes de l’ONU et les ONG doivent développer des moyens plus efficaces de recevoir et d’intégrer les retours des bénéficiaires.

Ils doivent également mieux tenir compte des restrictions à la mobilité des femmes en effectuant davantage de visites à domicile, en recrutant plus de personnel féminin sur le terrain et en ciblant plus particulièrement les femmes lors de la diffusion d’informations sur les services.

Oxfam s’emploie activement à appliquer ces recommandations dans ses programmes en cours. Pour améliorer la connaissance des communautés sur l’éventail des services proposés dans les différents secteurs, nous distribuons des prospectus contenant également des informations sur les autres prestataires et visant plus particulièrement les comités de réfugiés et les bénévoles. La question des droits légaux est un autre domaine dans lequel les personnes interrogées ont signalé un manque d’information.

Oxfam collabore actuellement avec ARDD, une organisation partenaire locale, afin d’organiser des réunions de sensibilisation sur les droits des réfugiés en Jordanie. Nous travaillons en outre à améliorer les services d’assistance téléphonique, avec l’ajout d’une ligne supplémentaire et la mise à disposition de davantage de personnel pour répondre aux bénéficiaires, et à installer des centres d’appel et d’information dans les régions où nous menons des projets, afin de recueillir les plaintes et les retours d’expérience.