Somalie : La crise alimentaire sévit toujours et menace de s’aggraver

En Somalie, le manque d’eau et de nourriture a atteint un niveau critique ces derniers mois. Oxfam a réalisé il y a quelques mois une enquête dans 40 régions du pays et alerte que sans mesures urgentes, la situation risque de se détériorer encore davantage dans certaines parties du pays, avec pour effet de prolonger la crise alimentaire qui sévit depuis plus d’un an [[Oxfam a mené son enquête auprès de plus de 1 800 ménages et organisé 240 groupes de discussion dans 40 régions du pays entre juillet et août 2012 pour comprendre l’impact de la faible pluviosité observée durant la saison des pluies, dite saison Gu, qui dure d’avril à juin.]]. Une perspective particulièrement alarmante dans ce pays tout juste sorti d’une des pires famines que la région ait connue depuis 50 ans.

Mauvaise récoltes, pluies erratiques puis inondations, baisse des revenus et coût élevé de l’alimentation… de nombreuses familles sont aujourd’hui extrêmement vulnérables en Somalie. Elles se retrouvent de plus en plus dépendantes vis-à-vis de l’aide, et davantage exposées à la menace grandissante de maladies pourtant évitables. Les zones les plus touchées : le sud de la Somalie, dans les régions du Gedo, du Bas Juba et du Bakool, où, sans que l’on prévoie un retour de la famine, les taux de malnutrition sont particulièrement inquiétants. Un bilan qui risque fort de s’aggraver sous le coup des inondations qui s’abattent actuellement sur le pays ainsi que dans les parties du territoire où l’aide ne parvient pas à être acheminée en raison des conflits qui y font rage. En cette période critique pour la Somalie, il est donc indispensable que la communauté humanitaire continue de soutenir le pays et reste présente dans la région, un pourcentage non négligeable de la population somalienne risquant de replonger dans la crise si l’aide n’est pas maintenue. Précarité A l’heure actuelle, environ les trois quarts des personnes interrogées au cours de cette enquête craignent de ne pas avoir assez de nourriture pour affronter les quatre prochains mois. En cause : la faible pluviosité combinée à la perte de bétail et de revenus résultant de la sécheresse de l’an dernier, des revenus deux fois inférieurs à ceux obtenus en temps normal à la même époque. Pour faire face à la situation, les Somaliens ont recourt à un certain nombre de stratégies, en diminuant par exemple leurs rations alimentaires. En outre, près de la moitié des personnes interrogées (42 %) sauteraient régulièrement des repas, tandis qu’un cinquième d’entre elles auraient affirmé avoir déjà réduit leurs rations alimentaires. Les familles les plus vulnérables n’ont pas été en mesure de cultiver assez ou de reconstituer suffisamment leur bétail après la crise de l’an dernier. Oxfam s’inquiète par ailleurs du taux de mortalité disproportionnellement élevé chez les femmes enceintes. Il est peu probable que la Somalie ne retombe dans la famine dans un futur proche et la vie à Mogadiscio commence à s’améliorer. Cependant, il est clair que la plupart des Somaliens les plus pauvres vivent toujours sur le fil du rasoir. La communauté internationale ne doit pas laisser s’installer un faux sentiment de sécurité en se basant sur les premiers signes de sortie de crise dans la capitale. Nous devons agir sans tarder dans tout le pays pour éviter que la crise ne s’aggrave. Dans les zones rurales, certaines femmes affirment avoir dû parcourir, au péril de leur vie, jusqu’à 18 kilomètres (aller-retour) à pied pour collecter la ration en eau journalière de leurs familles. Les budgets des ménages sont également affectés dans certaines régions où des familles sont contraintes de dépenser une part plus importante de leur revenu pour l’approvisionnement par camions-citernes. Les signes de maladies d’origine hydrique se font de plus en plus ressentir et 32 personnes auraient perdu la vie lors d’une possible épidémie de choléra. On craint que l’absence de moyens de traitement de l’eau et de sources d’eau potable ne fasse grimper rapidement ces chiffres. De surcroît, Belet Weyne, dans la province du Hiran, est déjà frappée par des inondations, lesquelles devraient se multiplier dans mois à venir. Oxfam renforce ses programmes Face à cette situation, Oxfam, présente dans la région depuis plus de 40 ans, intensifie d’ores et déjà ses programmes grâce à ses partenaires locaux, même si les inondations qui sévissent dans le pays vont rendre encore plus difficile l’accès à l’eau propre, avec un risque de contamination plus grand autour des points d’eau surpeuplés. Pour Oxfam, un soutien à long terme et une volonté ferme de régler les problèmes systémiques qui transforment les sécheresses récurrentes en situations d’urgence humanitaire sont essentiels. S’il est vrai que la situation sécuritaire dans la plupart des régions de la Somalie est encore incertaine et que la résolution de ce long conflit est essentielle, il est également indispensable d’investir dans l’amélioration de la gestion de l’eau, la réhabilitation des routes et le renforcement de la planification agricole.

L’action d’Oxfam en Somalie

– Depuis l’été 2011, les programmes d’Oxfam en Somalie, menés grâce à nos partenaires locaux, ont permis de porter assistance à environ 900 000 personnes, et ce malgré des conditions d’accès particulièrement difficiles. – Favoriser l’accès à l’eau et aux systèmes d’assainissement fait partie des missions premières d’Oxfam : installations de citernes, de pompes à eau ou de latrines… En Somalie, près de 900 000 personnes ont pu bénéficier de ces programmes. – En parallèle, grâce aux activités de distribution d’argent, 320 000 personnes ont été en mesure d’acheter la nourriture, les semences et l’eau indispensables à leur survie. – En outre, les programmes de transferts d’argent ont pu profiter à près de 200 000 bénéficiaires. – La mise en place de mécanismes de communication destinés à la santé publique, permettant, par téléphones mobiles de limiter la propagation de maladies comme le choléra, a bénéficié à près de 100 000 personnes dans des camps de déplacés. – En prévision des prochaines récoltes, un soutien accru a été apporté aux agriculteurs de la région du Bas Juba, à qui les équipes Oxfam ont notamment distribué des semences et des outils – Depuis 2009, un programme de soins thérapeutiques communautaires (CTC) à Mogadiscio a permis de soigner plus de 150 000 enfants et mères souffrant de malnutrition. Ce programme de nutrition, le plus important au centre et dans le sud de la Somalie, est mis en œuvre dans le cadre d’un partenariat entre Oxfam et Saacid, une ONG locale. – Comme dans d’autres situations d’urgence humanitaire, Oxfam effectue un plaidoyer actif aux niveaux régional et international sur des questions liées à la crise en Somalie, en exigeant notamment que tout Somalien et toute Somalienne puisse accéder à l’aide dont il ou elle a désespérément besoin.

L’action d’Oxfam France

– Oxfam France travaille depuis des années sur la protection des populations et les questions agricoles, la volatilité des prix et le soutien à l’agriculture paysanne. – Les conflits récurrents et persistants dans cette partie de l’Afrique contribuent à empirer la situation des populations, et dans certains endroits empêchent les ONG d’accéder aux populations. Oxfam France mène un travail de plaidoyer pour que la sécurité des civils soit la priorité absolue de tous les Etats et des institutions internationales. – À la fin du mois de juillet 2011, alors que l’aide de la France dans la Corne de l’Afrique ne s’élevait qu’à 10 millions d’euros, Oxfam France avait dénoncé avec vigueur cette (trop) faible contribution. Le message a porté puisque au début du mois d’août, le gouvernement nous a répondu directement en annonçant un triplement de son aide sur la zone (portée à 30 millions d’euros). – Dans le même temps, Oxfam plaidait auprès des pays du G20 et de l’Union européenne pour une régulation plus forte des prix des matières premières agricoles et un soutien financier à long terme de l’agriculture paysanne. – Grâce aux dons reçus pour l’aide d’urgence d’Oxfam sur le terrain et aux financements obtenus du gouvernement français à cette occasion, Oxfam France a été en mesure de soutenir l’action immédiate des affiliés Oxfam présents dans la région en faveur des populations affectées. Du 1er octobre 2011 au 31 janvier 2012, Oxfam France a ainsi contribué au financement d’un projet visant à améliorer la sécurité alimentaire de plus de 20 000 personnes dans le sud de la Somalie.

Aller plus loin

Voir le rapport sur l’efficacité de la réponse d’Oxfam en Somalie en 2011 / 2012 – En savoir plus sur la campagne CULTIVONS