Traité sur le commerce des armes : encore des efforts à faire sur la transparence !

Nicolas Vercken, responsable de plaidoyer Conflits, était du 10 au 15 juillet à New York au siège de l'ONU, pour suivre les négociations préparatoires du Traité sur le commerce des armes qui doit être adopté en juillet 2012. Retour sur une semaine de plaidoyer.

La semaine de négociations sur le Traité sur le Commerce des armes (TCA) qui vient de se tenir à New York a été particulièrement "bouillante"… Etaient-ce les températures caniculaires qui frappaient tout l'Est américain ? La fièvre de la qualification de l'équipe de football féminine américaine pour la finale de la Coupe du Monde aux dépens des footballeuses françaises ? Les craintes des marchés financiers qui voient poindre l'échéance fatidique de renégociation de la dette publique américaine, tandis que les agences de notation menacent de baisser la note accordée au gouvernement américain ? Ou le processus de négociation du TCA lui-même qui entre "dans le dur" ? Toujours est-il que les négociations se sont ouvertes dans une atmosphère chargée, alors que le premier jour la climatisation ne fonctionnait pas et que les ONG se pressaient dans les travées du fond de la salle : un chiffre record d'environ 240 représentants "non gouvernementaux" avaient en effet été accrédités pour observer ces négociations. Outre les quelques 140 membres de la coalition Control Arms, dont une quinzaine de représentants d'Oxfam venus d'Angleterre, d'Allemagne, d'Australie, de Nouvelle- Zélande, des Etats-Unis et de France, d'autres acteurs de la "société civile" venaient défendre des valeurs et des agendas parfois différents, voire contradictoires… Ainsi, le lobby pro-armes américain, qui continue de voir – à tort ! – dans le TCA une menace au droit des citoyens américains de posséder une arme à feu était articulièrement actif et "bruyant".. Tout le monde a clairement conscience que le compte-à-rebours jusqu'à la conférence finale de négociation est désormais lancé : les positions et les attitudes se durcissent, les alliances se précisent. Pour la première fois, les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité – qui représentent 88% des exportations d'armes mondiales – se sont exprimés 'une voi sur le TCA. Des [investisseurs->http://www.unpri.org/files/2011-07-13_ATT_second_investor_statement_final.pdf] représentant au total plus de 1200 milliards de dollars d'investissements ont également appelé à un TCA robuste et efficace. Tant [le groupe des Etats arabes->http://www.un.org/disarmament/convarms/ATTPrepCom/Documents/Statements-MS/PrepCom3/2011-July-11/2011-07-11-Kuwait-E.pdf] que la Chine ont rejoint certaines de nos demandes en appelant d'une part à la publication des données relatives aux autorisations et aux refus d'exportations , et d'autre part à la mise en place d'un dispositif d'évaluation indépendante du respect du Traité par ses Etats parties. Dans le même temps, l'Union Européenne indiquait quant à elle [sa réticence à de telles mesures de transparence->http://www.un.org/disarmament/convarms/ATTPrepCom/Documents/Statements-MS/PrepCom3/2011-July-12/2011-July-12-EU-Corrected-E.pdf]… malheureusement suivie (ou influencée ?) en cela par [la France->http://www.un.org/disarmament/convarms/ATTPrepCom/Documents/Statements-MS/PrepCom3/2011-July-11/Afternoon/2011-07-11-France-F.pdf], qui semble jouer un rôle de plus en plus important dans ces négociations par la voix de son ambassadeur Eric Danon… Alors que tout le monde s'attendait à une clôture "habituelle" des travaux le vendredi midi, le nombre important d'Etats souhaitant s'exprimer a poussé le Président de séance à prolonger les débats jusque dans l'après-midi, l'Algérie et l'Inde jouant notamment les prolongations en soulevant des questions de procédure sur la suite des négociations : espérons que cela n'indique pas une volonté de leur part de ralentir ou d'affaiblir le processus en cours ! Désormais, toutes les questions au cœur du futur traité ont été posées : quelles sont les armes à considérer ? quels sont les types de transferts à prendre en compte ? Quelles règles un Etat doit-il appliquer au moment d'autoriser ou non un transfert ? Quelle transparence doit prévaloir sur les transferts d'armes, tant entre les Etats que vis-à-vis de l'opinion publique ? Qui sera en mesure d'évaluer le respect du Traité et quelles seront les conséquences des éventuelles violations ? Les Etats ont commencé à y répondre : les attentes des ONG sont claires et nous continuerons de faire pression dans les douze mois qui viennent pour faire entendre nos voix, et surtout nous assurer que ces négociations cruciales pour la vie de millions de femmes et d'hommes dans le monde, soient portées à la connaissance du grand public. Seul un véritable contrôle démocratique des transferts d'armes et des instruments juridiques censés les réguler aura un effet dissuasif sur les marchands d'armes peu scrupuleux des droits de l'homme, du droit international humanitaire et des efforts de développement. – [En savoir plus sur le Traité sur le commerce des armes et le travail d'Oxfam France->-Controle-du-commerce-des-armes-]