Feu vert pour une taxe Robin des Bois européenne

Au cours de ces dernières semaines, l'Europe a franchi une nouvelle étape en vue d'une taxe Robin des Bois. Onze pays, dont nombre des grandes économies européennes, ont reçu le feu vert de la Commission pour mettre en train le projet de taxe européenne sur les transactions financières.

Difficile de croire que cette idée ait pu sortir de l'ombre de la forêt de Sherwood pour gagner les chambres des gouvernements en à peine trois ans. En tout cas, un tel résultat n'aurait pas été possible sans le soutien des sympathisant-e-s d'Oxfam à travers le monde. Voici tout ce qu'il faut savoir pour mesurer l'importance de l'enjeu.

Quels pays ont décidé d'introduire la taxe ?

Allemagne, France, Espagne, Italie, Autriche, Belgique, Portugal, Grèce, Slovénie, Slovaquie et Estonie. Derniers venus, les Pays-Bas, ont signalé le 13 novembre 2012, lors de la réunion européenne des ministres des finances leur intention de rejoindre la coalition sous certaines conditions.

Que signifie "décider d'introduire" ?

Tous les pays européens ne souhaitent pas appliquer une taxe sur les transactions financières. Cependant, tant qu'un nombre suffisant de pays se déclarent intéressés, rien ne les empêche d'y œuvrer : on appelle cela la coopération renforcée. Il faut un minimum de neuf pays pour lancer ce processus, or onze se sont engagés en faveur de la taxe.

Combien pourra rapporter cette taxe ?

La taxe pourrait générer jusqu'à 37 milliards d'euros par an, une somme rondelette qui peut faire une grande différence.

Quelles sont les prochaines étapes ?

Le 23 octobre 2012, la Commission européenne a confirmé que toutes les conditions légales étaient réunies pour permettre aux pays de travailler à la mise en œuvre du système. La Commission européenne a également indiqué qu'une part des recettes devrait servir à "soutenir la croissance ou à honorer les engagements pris en matière d'aide au développement". Et ensuite ? Il faut encore franchir deux obstacles avant que la taxe ne puisse être adoptée : le vote du Conseil européen et l'approbation du Parlement européen. Les États européens en faveur de la taxe devront ensuite se mettre d'accord sur la conception de la taxe.

Les fonds iront-ils à la lutte contre la pauvreté et contre le changement climatique ?

C'est une question majeure : s'agira-t-il simplement d'une nouvelle taxe ou portera-t-elle dignement le nom de Robin des Bois et permettra-t-elle de lutter contre la pauvreté et le changement climatique ? Il appartiendra à chaque pays d'en décider. Certain-e-s dirigeant-e-s ont d'ores et déjà enfilé leurs collants verts de Robin des Bois et affirmé que c'est possible.

Une taxe Robin des Bois à la française ?

Des pays ne perdent pas de temps. La France a déjà lancé sa propre taxe sur les transactions financières qui devrait générer 1,6 milliard d'euros par an. Au début de l'automne, le président François Hollande s'est engagé à affecter 10% des recettes à la solidarité internationale. Cette promesse risque toutefois de rester lettre morte au vu du budget français. En effet, celui-ci prévoit de ne consacrer, en 2013, que 60 millions des recettes de la TTF (soit 3,7%) au développement, et plus particulièrement au financement de la lutte contre le VIH/sida et à des projets en eau et assainissement. Certes le budget stipule que l'objectif des 10% sera atteint en 2015 et qu'une partie sera attribuée au Fonds pour le climat en 2014. Oxfam France n'en maintiendra pas moins la pression sur François Hollande pour s'assurer que la taxe française sur les transactions financières sera vraiment une taxe Robin des Bois. Une évolution de bon augure. Alors que la faisabilité technique et politique ne fait plus aucun doute, la grande question porte sur la destination des recettes générées par la taxe. Nous ferons campagne afin de nous assurer que l'Europe utilisera ces fonds pour non pas seulement combler les déficits des budgets nationaux, mais bien pour aider les populations pauvres qui ont été le plus durement touchées par la crise économique et le changement climatique.