Histoires d'aide : Majeda Begum Shiru, femme de parole

L’aide publique au développement est un catalyseur de changement, qui permet d’améliorer les vies de millions de personnes à travers le monde. Oxfam se bat pour que les pays riches tiennent leurs promesses et fournissent une aide importante et efficace aux populations les plus vulnérables. Parce que la pertinence des programmes d’aide est parfois questionnée, Oxfam America a publié des histoires de vies qui ont été durablement changées grâce à l’aide. Voici celle de Majeda Begum Shiru, qui uvre à améliorer la santé et l'éducation dans la région de Chittagong, au Bangladesh.

Avez-vous l'estomac qui se noue quand vous vous levez pour prendre la parole devant une assemblée ? Transpirez-vous, avez-vous la bouche sèche, et le cur qui s'emballe ? C'est le cas pour beaucoup de personnes, à travers le monde entier.
Imaginez maintenant que vous êtes une femme, élevée dans l'obéissance aux décisions de la famille et évoluant dans un cercle restreint. Une famille pauvre, qui vous considère peut-être comme un fardeau, mais vous avez pourtant la charge. Imaginez à présent que vous avez pris votre courage à deux mains pour parler devant une assemblée d'élus locaux, tous plus âgés que vous, tous de sexe masculin, et peut-être d'une autre caste et d'une autre classe sociale. Que diriez-vous ?

Des femmes qui parlent

Majeda Begum Shiru raconte que dans sa communauté de Patiya, dans le district de Chittagong au sud-est du Bangladesh, ses concitoyen-ne-s n'ont pas peur d'exprimer leurs idées. "Les femmes disent : "Je ne peux pas envoyer mes enfants à l'école. Quelle solution proposez-vous ?" Parce qu'on leur pose des questions de ce genre, les élus doivent répondre directement au public."

Il n'en a pas toujours été ainsi. Majeda Begum Shiru elle-même fréquentait peu les administrations. "Même quand je le faisais, je ne me sentais pas à l'aise", explique-t-elle. Une ONG locale, Bangladesh Nari Progati Sangha (BNPS), soutenue par l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), l'a formée ainsi que beaucoup d'autres femmes, à la prise de parole en public et à l'exercice de responsabilités, renforçant ainsi leur confiance en elles-mêmes et leur capacité à prendre des positions publiques.

Aujourd'hui Majeda Begum Shiru est devenue l'une de ces élues locales qu'elle craignait tant autrefois. Elle est l'une des responsables du Forum de politique publique du district (FPPD), au sein duquel des citoyens et des groupes de la société civile rencontrent des membres du Parlement, des représentants des ministères de l'Education et de la Santé, et les élus locaux pour discuter de questions importantes pour la communauté.

Dialogue direct avec les parlementaires

Au Bangladesh ces forums bénéficient du soutien d'USAID et de la Asia Foundation à travers un projet intitulé "Promotion des institutions et pratiques démocratiques" (Promoting Democratic Institutions and Practices), et, dans le district de Patiya, du partenaire local d'USAID, BNPS.

La tenue régulière de forums comme celui-là permet aux citoyens d'être plus conscients et mieux informés des responsabilités du gouvernement. Grâce à ses forums, les parlementaires sont confrontés directement aux problèmes auxquels la communauté doit faire face quotidiennement, ce qui peut avoir pour résultat de réduire la corruption ou la mauvaise utilisation des fonds gouvernementaux. "Maintenant les femmes peuvent s'exprimer et exposer leurs problèmes directement. Le député promet à la communauté que leurs préoccupations seront discutées au parlement" explique Majeda Begum Shiru.

Des femmes déterminées comme Majeda Begum Shiru utilisent les forums pour s'attaquer à des problèmes comme le taux élevé de mortalité maternelle ou celui de l'absentéisme à l'école primaire dans leur région. Récemment, lors d'une réunion du FPPD à Patiya, le groupe que pilote Majeda Begum Shiru pour soutenir l'hôpital local a réussi, entre autres, à obtenir un médecin supplémentaire pour le service de gynécologie. En réponse aux demandes d'améliorations du système scolaire formulées par Majeda Begum Shiru et la communauté, l'école locale va bientôt fournir, pendant une période test, le petit-déjeuner et le repas de midi aux enfants afin d'encourager une meilleure assiduité.

Donner plus de pouvoir aux femmes

"Dès qu'il y a une réunion à l'école, ou n'importe quel type de réunion dans la région, il y a beaucoup de femmes. Nous prenons la parole pour exposer les problèmes urgents, raconte Majeda Begum Shiru. Ce n'est qu'après avoir rejoint la FPPD que j'ai trouvé de nouveaux moyens de donner plus de pouvoir aux femmes. J'ai vu que pour obtenir des fonds, il fallait vraiment faire pression sur le gouvernement."

Le projet "Promotion des institutions et pratiques démocratiques" est un projet sur le long terme, qui vise à donner les moyens aux femmes de s'exprimer dans des réunions publiques et de faire connaître leurs problèmes et leurs idées sur les besoins de santé et d'éducation, pour elles et leur famille, y compris dans le futur. Au Forum de politique publique du district de Patiya en juillet 2012, le président, Pankaj Chakroborti, a déclaré : "En tant que citoyennes, elles sont conscientes de leurs droits et peuvent donc exiger d'être mieux traitées. Ainsi la situation change peu à peu. Les autorités à tous les niveaux, dans tous les secteurs, deviennent plus proactives."

Majeda Begum Shiru pense que cela va continuer. "BNPS nous a ouvert les yeux sur nos droits et notre place dans la communauté, nous avons appris à défendre nos intérêts, affirme-elle. Nous continuerons à le faire bien après la fin de ce projet."

Aller plus loin

Ces dernières années, le gouvernement américain a réformé son aide au développement pour être plus capable de rendre des comptes aux citoyens américains ainsi qu'aux responsables locaux comme Majeda Begum Shiru.
L'aide est plus efficace lorsqu'elle soutient les acteurs sur le terrain pour leur permettre d'agir sur les circonstances qui les maintiennent, eux et leurs concitoyens, dans la pauvreté : en les aidant à réaliser un rêve, construire un projet, soutenir leur famille ou aider leur communauté.
C'est pourquoi Oxfam se bat pour rendre l'aide au développement des pays riches plus efficace. Par exemple en donnant plus d'argent directement à des gens comme Majeda Begum Shiru.