“La moyenne nationale des auxiliaires de vie, c’est 800€ par mois”

Marie-Basile Mbarga est auxiliaire de vie chez Logivitae. Elle est également déléguée du personnel et se bat au quotidien pour une juste reconnaissance de son métier, dévalorisé et pourtant considéré comme « essentiel » durant la pandémie.

Quel est votre rapport à votre métier et quelles sont les choses qui vous animent au quotidien ? 

Le travail d’auxiliaire de vie c’est de venir en aide aux personnes en difficultés en général. C’est un travail que j’aime depuis toute petite et que j’aimerai toujours. J’aime venir en aide aux gens et quand j’ai fini mon travail le soir, je me sens libre. Beaucoup de personnes ne connaissent pas bien ce travail d’auxiliaire de vie. On s’occupe des personnes âgées, des personnes en difficultés et ça c’est quelque chose de spécial. Il y a cette complicité, avec la confiance des personnes. Pour gagner leur confiance c’est difficile, mais à partir du moment où on la gagne, notre métier devient indispensable. Le travail que nous faisons, il faut avoir du cœur pour le faire. Le travail d’auxiliaire de vie c’est avant tout de l’amour. L’amour des personnes chez qui tu interviens. 

Quels sont les impacts de la crise sanitaire sur votre quotidien professionnel ? Ces derniers mois ont-ils fait évoluer votre perception de l’avenir de la profession ? 

Dans le travail d’auxiliaire de vie, la période du Covid a bousculé beaucoup de choses. Beaucoup de femmes ont perdu leur emploi. Mais moi je partais au travail tous les jours pendant le premier confinement qui était très dur. J’avais la peur au ventre, mais ça faisait du bien. Durant la période du Covid, la majorité des personnes que je voyais aller au travail étaient des femmes. Quand je prenais les transports en commun je voyais plus de femmes que d’hommes. Pour le travail d’auxiliaire de vie, je vois que des hommes commencent à le faire, mais c’est vraiment plus féminin.

Avez-vous des exemples concrets qui montrent en quoi le secteur du soin, pourtant essentiel, n’est pas reconnu à sa juste valeur (salaire, reconnaissance, conditions de travail…?) La structure de Logivitae fait-elle exception dans ce secteur ?

Dafna Mouchenik, directrice de Logivitae : Les départements en charge du financement du soutien à domicile souhaitent payer les auxiliaires de vie avec un système de badge. Chez Logivitae nous avons refusé de faire ça. Il n’y a aucun autre professionnel du monde médico-social qui est traité de cette manière. Ça en dit long sur la manière dont on perçoit le métier. On ne ferait pas ça à des médecins. 

Ce qui est aussi très difficile dans ce métier, c’est le temps partiel subi. On fait en sorte chez Logivitae qu’elles ne le subissent pas trop, on a à coeur de faire des temps pleins. Sinon, les personnes travaillent 4-5h dans la journée avec des coupures très longues entre chaque, faute de financement public adapté. C’est compliqué d’avoir un autre travail pour compléter les revenus. La moyenne nationale des auxiliaires de vie, c’est 800€ par mois.

Quelles sont, selon vous, les revendications cruciales qui permettraient de revaloriser et de mettre en lumière ces métiers dits “essentiels” ? 

Ça passerait déjà par revaloriser nos salaires auxiliaires de vie et ceux des femmes en général. C’est ce que je dis à tous les journalistes, revaloriser nos salaires ça nous ferait tellement plaisir. On m’a demandé aussi pourquoi ce ne sont que des femmes qui exercent le métier d’auxiliaire de vie. Mais c’est parce que nous sommes formatées pour ça. Les hommes pensent que s’occuper des enfants c’est la femme, faire le ménage c’est la femme. 

Dafna Mouchenik : Tous les métiers du soin, infirmières, aide-soignante, auxiliaire de vie… leurs conditions de travail et de rémunération sont complètement liées aux politiques publiques de financement. Les personnes auprès desquelles Marie-Basile intervient ont pour la plupart des financements publics et ne peuvent pas aller au-delà de l’aide qui leur a été octroyée. Cette politique a le mérite d’exister. Dans pleins de pays on laisserait ces personnes sans assistance. Malgré tout, je pense que si ça avait été des métiers occupés par des hommes, il y aurait eu beaucoup plus de râleurs. Les hommes n’auraient pas accepté de travailler comme ça pendant des décennies dans ces conditions de travail. Le temps de transmission, le temps de coordination n’est pas toujours pris en compte. On compte beaucoup sur le bénévolat de chacun finalement. 

Pour un plan de relance féministe

Pour que les femmes et les générations futures ne voient pas leur situation se dégrader mais bien progresser, nous demandons à la France, à l’occasion du Forum Génération Égalité et dans les mois qui suivent, d’adopter un plan de relance féministe.

Je signe !