Yahya : la cuisine comme moteur d’intégration

Fuir les conflits, la violence et la persécution de leur pays, c’est le cas de 70,8 millions de personnes qui sont aujourd’hui forcées de fuir. La majorité d’entre eux, 41,3 millions, sont déplacés à l’intérieur de leur pays. D’autres essayent de trouver refuge dans les pays limitrophes, certains s’aventurent même sur la route qui mène à l’Europe.

 

Avec le durcissement du contrôle aux frontières, les alternatives pour fuir leurs pays d’origines engagent les migrants à effleurer la mort, parfois à y succomber. Une fois le pied posé sur les pays d’accueil, rien n’est facile, d’autres obstacles se dressent devant eux : impossibilité d’obtenir des papiers, difficultés pour s’intégrer,… Pourtant, malgré les obstructions constantes auxquels font face les personnes déracinées, de belles histoires émergent et frayent un passage à une lueur d’espoir. Voici l’histoire de Yayha.

 

Yahya, un jeune Gambien, est l’incarnation de ces parcours depuis qu’il a rejoint l’Italie en 2013.

« J’ai décidé de quitter la Lybie à cause de la guerre »

Yahya a quitté la Gambie lorsqu’il avait seize ans. Il a traversé le continent en passant par le Sénégal, le Mali, le Burkina Faso et le Niger pour arriver jusqu’en Lybie. Après plusieurs mois, les combats constants l’ont poussé à fuir la Lybie. L’insécurité qui y règne et les contrôles policiers permanents font peser une atmosphère anxiogène.

« C’est très compliqué de rester en Lybie. Il y a des combats, des milices, la police – mais c’est une police corrompue. Elle peut vous arrêter sans raison et vous mettre en prison. Pour en sortir, vous devez payer. »

Mettre sa vie en péril pour la sauver

Rejoindre l’Europe n’est pas à la portée de tous. Les passeurs profitent du désespoir de ceux qui fuient la mort en imposant un prix exorbitant à un trajet qui sera effectué dans des conditions précaires et dangereuses. Le nombre de passages par la Lybie a considérablement augmenté depuis la fermeture de la route menant de la Turquie à la Grèce, obligeant ainsi Syriens et Iraquiens à changer de trajet.

« Nous avons passé deux jours sur le bateau, nous étions 130 dessus » raconte Yahya. C’était la première fois qu’il voyait la mer. Il a pris l’éprouvant risque d’atteindre l’Italie sur un bateau gonflable dont la capacité d’accueil était largement outrepassée. Le bateau s’est retrouvé en mauvaise posture et a été secouru par les garde-côtes italiens, qui les ont emmenés en Sicile.

Un monde de camps

« Quand je suis arrivé en Italie, je suis resté cinq jours à Augusta (dans la côte orientale de Sicile) et ils m’ont ensuite emmené dans un camp. Il y avait une centaine de personnes. J’y suis resté sept mois. Puis je suis allé à Catane dans un autre camp. J’y ai rencontré beaucoup de gens, il y avait beaucoup de Gambiens »

Les migrants assignés à un camp n’ont aucune vue sur leur futur. La durée qu’ils vont passer dans l’un d’eux est indéterminée en même temps que le nombre de « résidents » augmente sans cesse. Oxfam travaille pour que les droits des migrants soient respectés, surtout quand ils manquent de connaissance à ce propos, et que les conditions d’accueil soient améliorées.

Les citoyens se mobilisent pour changer des destins

Yahya aurait pu être un de ces déracinés anonymes et exploités qui habitent des camps de fortune et des bâtiments abandonnés en marge de la vie italienne. Mais quelques mois après son arrivée, une avocate s’est consternée des conditions dans lesquelles se trouvaient les centres de réceptions de migrants et a élaboré une stratégie pour que des familles puissent être tutrices légales de migrants mineurs non accompagnés. Elles peuvent ainsi les accompagner à démarrer une nouvelle vie.

« J’ai rencontré une dame, Barbara. Elle est devenue ma tutrice, m’a aidé avec mes papiers et à trouver du travail, ici, à Catane »

Barbara a participé à l’ouverture du restaurant 11Eleven qui a donné l’opportunité à Yahya et à trois autres jeunes hommes d’apprendre à cuisiner et à gagner leur vie.

La cuisine comme salvation

« La première fois que j’ai cuisiné ici c’était avec un chef italien. Sa cuisine est excellente ! Un jour, il m’apprenait à cuisiner un plat et le lendemain je devais le faire moi-même. J’ai appris à faire des lasagnes et bien d’autres ! Je crois que ce que je préfère cuisiner c’est le riz… J’adore ça ! »

Oxfam et ses partenaires soutiennent ainsi des jeunes mineurs migrants et réfugiés pour qu’ils puissent recevoir le support d’un tuteur légal. Il agit comme un guide et un conseiller auprès du mineur, facilitant son processus d’inclusion et d’intégration au sein du pays d’accueil. Le but est de renforcer et de reproduire ce modèle de protection des mineurs fort de succès.

Une deuxième vie

« Je pense que j’ai eu deux différentes vies. Celle d’avant, dans mon pays, et celle-ci, en Sicile. J’ai appris à apprendre une nouvelle vie. D’où je viens, les enfants de six ans doivent travailler. Ici je peux travailler et aller à l’école. C’est génial ! »

Le restaurant 11ELEVEN est le premier restaurant Afro-sicilien d’Europe. Sa naissance est le fruit d’une rencontre, celle de la communauté locale et des déracinés en quête de foyer. La fusion mêlant ainsi différentes cultures aux arômes variées donnent lieu à une cuisine nouvelle. Le restaurant a pour recette phare un banku revisité, plat d’origine Ghanéenne. A la base maïs et manioc est ajoutée de la tomate et de la mozzarella, combinant ainsi saveurs africaines et italiennes.

Oxfam et ses partenaires mettent en place des programmes en Italie, Grèce ou encore Serbie pour venir en soutien des migrants, réfugiés et communautés hôtes.

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