Dakota Access Pipeline : les banques françaises complices de violations des droits humains

Les Amis de la Terre France, Oxfam France, en partenariat avec Fair Finance France, appellent les banques françaises à cesser tout nouveau versement au projet de pipeline « Dakota Access » (DAPL), dans le Dakota du Nord. Face aux violations des droits des communautés indigènes mises en lumières par la tribu des Sioux de Standing Rock, ce projet doit être mis à l’arrêt tant que leurs revendications continuent de ne pas être prises en compte par les entreprises en charge du projet.

Quelques mois après l’adoption de l’Accord de Paris par 195 pays réunis à la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique (COP21) en décembre 2015, 17 banques internationales signaient un prêt de 2,5 milliards de dollars au DAPL – un projet d’oléoduc souterrain devant traverser quatre États américains et acheminer chaque jour un demi-million de barils de pétrole extrait dans le Dakota du Nord, à la frontière canadienne, jusque dans l’Illinois, plus au sud([1]).

Parmi elles, les 4 plus importantes banques françaises : BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale et Natixis, pour un apport respectif d’environ 120 millions de dollars.

Un projet déjà responsable de lourdes violations de droits humains

La construction du pipeline à travers la réserve Sioux de Standing Rock constitue une menace pour l’approvisionnement en eau potable, les services médicaux et sociaux et d’importantes ressources culturelles des communautés y habitant. Le pipeline traverserait en effet des terres non cédées et des territoires sacrés ; déjà des cimetières et autres sites culturels de haute importance pour les communautés ont été profanés.

Initialement, le pipeline devait traverser la rivière Missouri à proximité des villes de Bismarck et Mandan. Suite à l’opposition des conseils municipaux, liées notamment aux risques de contamination des réserves d’eau potable, le pipeline a été détourné vers la réserve Sioux de Standing Rock. Là se trouve le cœur du problème : l’absence de consultation, en opposition totale avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des communautés autochtones, dont notamment celui à l'autodétermination et au consentement libre, préalable et éclairé concernant l’usage de leurs terres traditionnelles. Aucune enquête quant aux impacts possibles du projet sur les ressources culturelles et l’environnement n’ont été menées.

Contesté depuis ses débuts en juillet 2014 par les Sioux de Standing Rock, et malgré les recours juridiques, la construction du DAPL a débuté en mai 2016. Le projet catalyse aujourd’hui les luttes des communautés indigènes pour leurs droits et leur auto-détermination, avec plus de 280 tribus du monde entier ayant apporté leur soutien[2].

La réponse de la compagnie et des autorités locales a été similaires à ce qui peut être observé ailleurs dans le monde : des tentatives pour criminaliser la protestation et la limitation de l’accès au terrain pour évaluer la situation. Le conflit a dégénéré ces derniers mois lorsque plus de 100 officiers anti-émeutes, équipés de fusils automatiques, équipements blindés et bulldozer ont répondu par l’usage de la force à une occupation pacifiste des lieux de construction. Plusieurs protestants non-violents et journalistes font aujourd’hui l’objet de poursuites judiciaires.

Pour que les violations cessent, les banques doivent retirer leurs soutiens au projet

Au-delà des impacts sur le climat, c’est donc en solidarité avec la tribu des Sioux de Standing Rock et pour le respect des droits des communautés indigènes que nous appelons les banques à se retirer immédiatement de ce projet. Ce qui se passe aujourd’hui dans le Dakota du Nord pourrait très bien se dérouler n’importe où ailleurs dans le monde, lorsque les intérêts économiques des entreprises extractives s’opposent aux droits des communautés autochtones et leur refusent leur droit de participer réellement aux décisions qui affectent leurs vies et leur environnement.

Ces multiples violations des droits humains sont inacceptables et les banques françaises ne sauraient maintenir leur soutien à ce projet sans renier leurs engagements en faveur du respect des droits de l’homme. BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale et Natixis ont toutes signé les Principes de l’Equateur qui établissent des règles de conduite propres au respect des droits des communautés autochtones. 

La première erreur des banques françaises fut de soutenir ce projet alors que ces risques étaient, dès le début, incontestables. Ne pas suspendre aujourd’hui leur participation au projet tant que les demandes de la tribu des Sioux de Standing Rock ne sont pas respectées serait se rendre complice des violations des droits des communautés autochtones et des opposants non-violents.

Plusieurs organisations, dont les Amis de la Terre France, appelaient déjà il y a une semaine les banques françaises et les 9 autres institutions financières impliquées dans le projet, bien qu’ayant adopté les Principes de l’Equateur, à ne pas participer aux prochains versements du prêt prévu et à exiger de ses promoteurs qu’ils suspendent la construction du pipeline tant que les droits de la tribu des Sioux de Standing Rock ne sont pas respectées. La banque norvégienne DNB répondait immédiatement vouloir reconsidérer sa participation au projet[3], quand la banque néerlandaise ING indiquait qu’elle userait de son influence pour trouver une solution à cette situation[4]. Les banques françaises sont quant à elles restées silencieuses.

Nous réitérons aujourd’hui notre appel aux banques françaises à ne plus allouer de nouveaux versements au projet, en solidarité avec la tribu des Sioux de Standing Rock, et alors que des dizaines d’actions à travers le monde sont organisées aujourd’hui pour demander l’arrêt du projet[5].

De telles violations étant malheureusement habituelles dans ce type de projet, et considérant l’urgence climatique actuelle, nous demandons également aux banques françaises l’arrêt de leurs financements de projets à de nouvelles infrastructures d’énergies fossiles[6].