Oxfam, une même tradition de mobilisation citoyenne, des deux côtés de la Manche

En 1988, les fondateurs et fondatrices de l’association Agir ici – qui deviendra en 2006 Oxfam France – sont allé·e·s rencontrer les acteurs de la mobilisation citoyenne et du plaidoyer dans les pays voisins. De l’autre côté de la Manche, une organisation se faisait déjà remarquer pour sa capacité à faire peser le pouvoir citoyen dans le débat politique : Oxfam. Un ADN commun qui préfigurait peut-être déjà l’adhésion, quelques années plus tard, d’Agir ici à la confédération.

Janvier 1942. Alors que les puissances de l’Axe occupent presque toute l’Europe, la Grèce fait face à un blocage naval des forces alliées que refuse de lever Winston Churchill, malgré la famine qui tue 2 000 personnes chaque jour. A Oxford, un petit groupe de personnes décide de former le « Oxford Committee for Famine Relief ». En multipliant les comités dans toute la Grande-Bretagne, mais également grâce aux soutiens obtenus jusqu’au Canada et aux Etats-Unis, ils font céder le gouvernement de Churchill.

Défier les plus puissants de ce monde. Dire ce qui doit être dit. Se mobiliser pour ce qui est juste. Ainsi est née Oxfam, forte de cet esprit citoyen non-violent.
En 1966, Lynda distribue les courriers d'Oxfam dans son village.
En 1966, Lynda distribue les courriers d’Oxfam dans son village.

Dans les années 1960, l’organisation développe des méthodes de mobilisation, désormais courantes. Des annonces poignantes dans les journaux aux mobilisations sur Trafalgar Square aux côtés des Beatles et des Stones, Oxfam mobilisa des dizaines de milliers de citoyen.ne.s pour interpeller directement les députés britanniques.

Des grandes victoires obtenues contre la pauvreté

En 1985, Oxfam annonça sa décision d’arrêter son contrat avec la banque Barclays, du fait du soutien de celle-ci à l’Apartheid en Afrique du Sud, et fut suivi par de nombreuses organisations en Grande-Bretagne. Une année plus tard, la Barclays quitta l’Afrique du Sud, alors que la banque était jusque-là présente dans toutes les grandes rues du pays.

Affiche historique de la campagne d'Oxfam contre la BarclaysDans les années 1990, Oxfam – et dans le même temps Agir ici en France – tourna son regard vers la Banque mondiale et le Fonds Monétaire International, remettant en question leurs politiques d’ajustements structurels. Lors de leurs réunions annuelles, des paquets de pilules furent envoyés à ces deux institutions pour leur rappeler que « à mauvais diagnostic, mauvais traitement ». Une réalité qui persiste au regard de l’actualité.

Dans le même temps, de nombreuses organisations, dont Oxfam, se mobilisèrent pour exiger l’annulation de la dette des pays les moins avancés (PMA), de même qu’Agir ici de l’autre côté de la Manche. Une fois encore, de nombreux « experts » se posèrent en opposition à l’organisation, déclarée irréaliste, si ce n’est naïve. Dix ans plus tard, 100 milliards de dette furent annulés.

Une des plus grandes victoires d’Oxfam fut son implication, aux côtés d’autres, dans la campagne contre les géants pharmaceutiques, afin d’assurer l’accès à des traitements génériques du VIH. Cette victoire permit de donner accès à des traitements gratuits à 8 millions de personnes, et d’améliorer autant de vies.

Une vision qui demeure

Le monde actuel, s’il a bien sûr évolué, est toujours aussi complexe que ce qu’il était au moment de la fondation d’Oxfam. Les combats doivent être portés au sein même des pays en développement, autant que dans les relations dites « Nord – Sud ». Il est vrai que certain-e-s des responsables politiques et économiques ciblé-e-s par Oxfam ont renforcé leurs actions contre la pauvreté. D’autres se sont seulement concentré-e-s sur leur façon de se présenter.

Dans un monde où explosent les inégalités extrêmes, rester fidèle à la vision première d’Oxfam est peut-être une responsabilité plus importante que jamais.

 

Forte d’un mouvement désormais mondial, Oxfam a le pouvoir de défendre sa vision globale, citoyenne, solidaire.