A trois semaines du Sommet pour un Nouveau Pacte Financier mondial organisé par Emmanuel Macron pour “bâtir un système financier international plus solidaire”, Oxfam dénonce la surévaluation systématique des financements climatiques des pays riches envers les pays du Sud.

 

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Résumé en français du rapport “2023 : Les vrais chiffres des financements climatiques” d’Oxfam.
Le rapport complet en anglais.

 

Alors que les émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter et que le changement climatique fait des ravages chez les populations qui en sont les moins responsables, les pays riches et polluants ont déjà trois ans de retard sur leur promesse de mobiliser 100 milliards de dollars annuels pour financer la lutte contre le changement climatique dans les pays à faible et moyen revenu.

Pire encore : leur soutien réel est bien inférieur à ce que les chiffres officiels laissent penser. Le rapport “2023 : Les vrais chiffres des financements climatiques” publié aujourd’hui par Oxfam montre en effet que si les pays donateurs affirment avoir mobilisé 83,3 milliards de dollars en 2020, la valeur réelle de leurs dépenses s’élève tout au plus à 24,5 milliards de dollars.

La somme de 83,3 milliards de dollars est surestimée car elle inclut des projets dont la part climatique a été surévaluée, ou des prêts qui sont par définition à rembourser.

Pour Guillaume Compain, chargé de campagne climat chez Oxfam France : “Non seulement les pays riches n’honorent pas leurs engagements envers les pays du Sud, mais en se comportant ainsi ils abîment la confiance internationale et les chances de succès des négociations climatiques”.

 

La France, bonnet d’âne en matière de dons

Bien qu’elle fournisse des montants relativement élevés en valeur absolue, la France est le pire élève concernant sa part de dons dans ses financements bilatéraux, avec seulement 7% de ses financements fournis sous forme de dons.

En étant accordés très majoritairement sous forme de prêts à rembourser, ces financements risquent de nuire davantage aux populations locales que de les aider car ils alourdissent encore plus le fardeau de la dette dans des pays déjà lourdement endettés et impactés par la hausse des taux d’intérêt.

Pour Guillaume Compain : “La France a le bonnet d’âne des pays riches concernant la part de dons qu’elle fournit aux pays du Sud en matière climatique. A l’heure où le Président Macron s’apprête à accueillir les 22 et 23 juin une conférence internationale pour élaborer un “nouveau pacte financier” avec les pays du Sud, il en va de la crédibilité de la France de corriger le tir”.

 

Des financements climatiques problématiques à de nombreux égards

Le rapport d’Oxfam révèle aussi que les pays donateurs repeignent en vert jusqu’à un tiers de leur aide publique au développement au lieu de proposer des fonds additionnels.

De même, ces financements tiennent très peu compte des inégalités femmes-hommes alors que les femmes sont plus impactées par le changement climatique. Seuls 2,9 % de l’ensemble des financements ont identifié l’égalité des sexes comme une priorité.

Par ailleurs, la volonté de mobiliser massivement la finance privée ne s’est pas concrétisée, puisque seuls 14 milliards de dollars sont investis annuellement par des acteurs privés dans le cadre de projets climatiques liés à l’aide au développement.

Enfin, le soutien financier à l’adaptation est largement insuffisant. Comme le souligne Guillaume Compain : “Les 11,5 milliards de dollars annuels fournis pour aider les pays du Sud à s’adapter aux ouragans, sécheresses et autres catastrophes causées par le changement climatique sont dérisoires. Les Américains dépensent quatre fois plus que ça pour nourrir leurs chats et leurs chiens”.

 

L’urgence d’augmenter et d’améliorer les financements climatiques

Pour Guillaume Compain : “Les négociations en cours dans le cadre des COP pour définir un nouvel objectif mondial de financements climatiques sont l’occasion de rétablir la confiance entre les pays riches et les pays à faible et moyen revenu. Mais si les manquements du passé ne sont pas corrigés, ce processus aura échoué avant même d’avoir commencé”.

A court terme, Oxfam suit activement la mise en place du fonds pour le financement des « pertes et dommages » – les impacts irréversibles du dérèglement climatique – adopté à la COP27. Celui-ci doit être opérationnalisé le plus vite possible et largement abondé financièrement. Les besoins de financement des pertes et dommages sont urgents, les estimations indiquant que les pays à faible et moyen revenu pourraient faire face à des coûts allant jusqu’à 580 milliards de dollars par an d’ici 2030.

Contact presse

Guillaume Compain | gcompain@oxfamfrance.org | 0685260108

Notes aux rédactions

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Rien qu’en Afrique de l’Est, la sécheresse et les conflits ont laissé un nombre record de 36 millions de personnes confrontées à la faim extrême, soit presque l’équivalent de la population du Canada. Oxfam estime que jusqu’à deux personnes meurent de faim chaque minute en Éthiopie, au Kenya, en Somalie et au Sud-Soudan.

En avril dernier, Oxfam évaluait à 27 000 milliards de dollars les besoins des pays du Sud en matière de réponse au changement climatique et de financement du développement.

Selon Anil Markandya et Mikel González-Eguino (2018), les coûts des pertes et dommages dans les pays à revenu faible et intermédiaire pourraient atteindre entre 290 et 580 milliards de dollars par an d’ici 2030.