Paradis fiscal : définition et liste des pays

Les paradis fiscaux sont les premiers maillons de la chaîne de l’évasion fiscale. ils offrent des solutions à des grandes entreprises et des riches particuliers pour éviter l’impôt. Ce sont des pays ou des territoires à fiscalité réduite ou nulle qui sont au cœur des scandales d’évasion fiscale. Y mettre un terme est indispensable pour lutter contre les inégalités et arrêter l’hémorragie fiscale qui prive les États d’une grande partie de leurs recettes publiques vitales pour financer les services publics essentiels.

Qu’est-ce qu’un paradis fiscal ? Pourquoi existent-ils ? Quels impacts ont-ils sur l’économie et sur notre quotidien ? Comment lutter contre les paradis fiscaux ? On vous explique tout !

Qu’est-ce qu’un paradis fiscal ?

Un paradis fiscal est défini par un ensemble de critères qui démontrent que ce pays ou territoire a délibérément adopté des lois et des politiques fiscales permettant à des particuliers ou à des entreprises de réduire au maximum leurs impôts dans les pays où ils sont réellement actifs. Les paradis fiscaux ont ainsi souvent pour caractéristiques communes de proposer :

  • Des avantages fiscaux à des particuliers ou à des entreprises, sans exiger une réelle activité sur place.
  • Un taux d’imposition très faible, voire nul.
  • L’absence de transparence : ces pays ont adopté des lois ou des pratiques administratives qui empêchent l’échange automatique d’informations, notamment dans le cadre de procédures fiscales avec d’autres Etats.
  • Des dispositions légales, administratives ou judiciaires qui assurent le secret sur l’identité des détenteurs réels des entreprises, trust, etc… ou sur celle des propriétaires d’actifs ou de droits.

Un paradis fiscal n’est pas forcément un Etat riche. Si ces pays privent les autres Etats de recettes fiscales essentielles, l’argent qui y est placé ne leur bénéficie pas pour autant. Par exemple au Panama, mis en lumière par le scandale des Panama Papers, en 2015, 32 % des habitant-e-s de ce paradis fiscal vivaient sous le seuil de pauvreté.

Quel danger représentent les paradis fiscaux ?

Une augmentation des inégalités

Nous vivons une crise mondiale des inégalités. Sept personnes sur dix vivent dans un pays dans lequel les inégalités ont augmenté ces trente dernières années. En 2019, les 1 % les plus riches du monde possédaient  plus du double de la richesse de 6,9 milliards de personnes. La pandémie de Covid-19 a creusé encore davantage l’écart entre les plus plus riches et les plus pauvres, comme le révèle notre rapport de mai 2022 « Quand la souffrance rapporte gros ».   La fortune des milliardaires a augmenté davantage en deux ans de pandémie que lors des 23 dernières années.

Les paradis fiscaux participent à l’aggravation des inégalités en favorisant l’évasion fiscale grandes entreprises et aux grandes fortunes. Lorsque ces derniers ne payent pas leur juste part d’impôt cela prive les Etats de ressources essentielles pour financer les services publics indispensables pour lutter contre la pauvreté et les inégalités, comme les soins de santé et l’éducation. Le coût humain touche l’ensemble des individus et il est particulièrement important pour les plus vulnérables pour qui les services publics ont un rôle décisif.

 

Des Etats privés de ressources économiques

Lorsque l’imposition des grandes entreprises et des grandes fortunes est réduite, deux solutions s’offrent aux Etats pour combler le manque à gagner, qui vont à contre-sens de la lutte contre la pauvreté et les inégalités :

  • Réduire les dépenses publiques, pourtant indispensables pour lutter contre les inégalités et la pauvreté.
  • Augmenter d’autres impôts, touchant des tranches moins aisées de la société, tels que la TVA, qui représente l’un des impôts les plus injustes car très lourdement payé par les ménages les plus pauvres.

Du fait de l’opacité du système, le montant de l’évasion fiscale est très difficile à chiffrer. Des rapports publics permettent néanmoins d’obtenir des ordres de grandeur qui font aujourd’hui référence :

    • L’évasion fiscale en France (particuliers + entreprises) : de 80 à 100 milliards d’euros par an, selon, le rapport du syndicat Solidaire-finances publiques. Cela représente un montant supérieur au budget de l’Education nationale (52 milliards d’euros), l’un des postes les plus important de l’Etat.
    • L’évasion fiscale dans le monde (particuliers + entreprises) : 427 milliards de dollars par an (360 milliards d’euros) selon la dernière étude du réseau international Tax Justice Network (novembre 2020)

Si on s’intéresse uniquement à l’évasion fiscale des multinationales : elles transfèrent artificiellement jusqu’à 40 % de leurs bénéfices réalisés à l’étranger dans des paradis fiscaux. Selon l’économiste Gabriel Zucman le manque à gagner pour les Etats se chiffre à 350 milliards d’euros par an, dont 120 milliards pour l’Union européenne et 20 milliards pour la France. Les pays en développement eux perdraient eux plus de 86 milliards d’euros par an.

Quelle est la liste des paradis fiscaux ?

La liste de noire de l’Union européenne, une liste insuffisante

L’Union européenne établit depuis 2017 une liste noire des paradis fiscaux. Malheureusement cette liste n’est pas crédible car elle ne contient pas l’ensemble des paradis fiscaux les plus notoires.

L’enquête #OpenLux publiée en février 2021 est une nouvelle illustration du scandale de l’évasion fiscale qui se déroule sous nos yeux, au cœur de l’Europe. L’investigation, menée par Le Monde et 16 médias partenaires pendant 1 an, montre comment grandes entreprises et milliardaires du monde entier font affaire avec le Luxembourg, paradis fiscal cœur de l’Union européenne, pour échapper à l’impôt via des sociétés écrans.

Dans sa dernière mise à jour (février 2022), la liste noire européenne compte seulement 12 pays : Anguilla, la Dominique, les Fidji, Guam, les Palaos, le Panama, les Seychelles, le Samoa, les Samoa américaines, Trinidad et Tobago, les îles Vierges américaines et le Vanuatu. Les îles Caimans, les Bahamas, les Bermudes, Hong Kong ou encore Singapour sont absents de la liste, tout comme les paradis fiscaux européens : Chypre, l’Irlande, le Luxembourg, Malte et les Pays-Bas. En effet, l’Union européene se refuse à examiner la situation de ses Etats membres.

Oxfam a élaboré sa propre liste en utilisant toutes les informations crédibles disponibles pour identifier un territoire en tant que paradis fiscal : au total une liste de 58 pays qui couvre des critères établis par les organisations de la société civile et les institutions internationales de référence comme le Fonds monétaire international (FMI), la Banque des règlements internationaux, la Commission européenne, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Les pires paradis fiscaux selon Oxfam France

Dans son rapport « La bataille des paradis fiscaux », publié en décembre 2016, Oxfam a classé les 15 principaux paradis fiscaux auxquels les entreprises ont aujourd’hui recours.

Par ordre de nocivité de leurs politiques fiscales : (1) Bermudes (2) Îles Caïmans (3) Pays-Bas (4) Suisse (5) Singapour (6) Irlande (7) Luxembourg (8) Curaçao (9) Hong Kong (10) Chypre (11) Bahamas (12) Jersey (13) Barbade, (14) Maurice et (15) Îles Vierges britanniques. Quatre de ces territoires se trouvent sous la couronne britannique.

 

Comment lutter contre les paradis fiscaux et l’évasion fiscale ?

Oxfam défend cinq mesures concrètes qui permettraient de combattre efficacement ce problème.

  1. Etablir une liste noire mondiale des paradis fiscaux dans chaque pays avec des sanctions. Cette liste doit être fondée sur des critères objectifs et crédibles, et les pays qui y figurent doivent être sanctionnés. Les gouvernements, européens notamment, doivent faire preuve de courage politique en agissant avec fermeté contre les paradis fiscaux situés à l’intérieur de l’Union européenne (le Luxembourg, l’Irlande, les Pays-Bas, Malte et Chypre).
  2. Mettre en place au niveau international un taux d’imposition mondial sur les sociétés : cet impôt ne doit pas être trop faible et doit être appliqué pays par pays sans exception. Cela permettrait de taxer les entreprises là où elles ont une activité économique réelle, sans qu’elles puissent délocaliser artificiellement leurs bénéfices dans des paradis fiscaux.
  3. Mettre fin au secret fiscal des entreprises en veillant à ce que toutes les multinationales publient des rapports financiers publics pour chaque pays où elles exercent leurs activités.
  4. Renégocier les droits d’imposition, en particulier pour les pays en développement. De nombreuses conventions fiscales ont pour conséquence de permettre à des multinationales de ne pas payer d’impôts, et ce dans aucun pays où elles ont une activité.
  5. Créer un organisme fiscal international où chaque pays pourrait participer et contribuer sur un pied d’égalité pour faire en sorte d’établir un régime fiscal efficace pour tous.
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