Les inégalités entre les femmes et les hommes sont les plus universelles et les plus structurantes de nos sociétés. Oxfam a rappelé dans son rapport annuel que les hommes détiennent 50 % de richesses en plus que les femmes. En France, au Nigéria, au Brésil, au Japon… partout dans le monde, les femmes sont en première ligne des inégalités à cause d’un système économique injuste et sexiste qui les cantonne dans des pans de l’économie les plus dévalorisés et les plus précaires. Sans parler des discriminations et des violences subies dans la sphère professionnelle et privée.
Pour en finir avec ces injustices qui sont défavorables à tou-te-s, Oxfam défend des solutions au niveau international. En France, nous défendons trois mesures prioritaires en amont de la loi d’autonomisation économique des femmes portée par Marlène Schiappa et Bruno Le Maire, qui sera présentée et débattue au Parlement cette année.
Les femmes en 1ère ligne des inégalités sur le marché du travail
La France n’est pas épargnée par les différences de salaires femmes-hommes
Même constat en France ! Les hommes gagnent 28,5% de plus que les femmes selon une récente étude de l’INSEE (juin 2020). A poste et compétences égales, l’écart de salaire est de 9%. Ces inégalités s’expliquent principalement par la place des femmes dans le marché de l’emploi : les femmes sont concentrées dans 12 familles professionnelles, dévalorisées financièrement et socialement, où les qualifications et la pénibilité ne sont pas reconnues. Les assistant-e-s maternelles, les employé-e-s de maisons, aides à domicile et aides ménagères, les secrétaires et secrétaires de direction demeurent à plus de 95 % des femmes. Ce sont aussi des secteurs où les emplois sont précaires : les chiffres parlent d’eux-mêmes ! 78 % des emplois à temps partiel sont occupés par des femmes, et 70 % pour les CDD et les intérims.
Les femmes majoritaires dans le secteur du soin
Ce secteur du soin, qui regroupe les métiers de la santé, de l’éducation, de l’aide à la personne, du travail social ou encore de la propreté, est très majoritairement féminin. Ce sont souvent des métiers pénibles qui affectent profondément les conditions de vie des femmes. Les difficultés de l’articulation entre vie professionnelle et vie de famille sont accrues par les horaires atypiques. Par exemple, dans les services de nettoyage, les femmes ont souvent des horaires courts où distendus et combinent plusieurs employeur-euse-s ou plusieurs lieux de travail. 9 salarié-e-s du nettoyage sur 10, comme pour l’ensemble des non-qualifié-e-s, sont exposé-e-s à au moins un risque physique.
Peu de femmes PDG ou ingénieurs
Les femmes sont aujourd’hui encore sous-représentées parmi les ingénieur-e-s et les cadres de l’industrie (25%), dans la construction et les travaux publics (19%) et dans l’armée, la police, les pompiers (14%). Les femmes sont aussi moins présentes sur des postes à responsabilités : seulement 40% des cadres, 29% des PDG. Elles ne sont que 18,4 % à siéger dans les comités exécutifs des 120 plus grandes entreprises françaises, notamment dans les instances de décision des entreprises du CAC40, dont les femmes sont les grandes absentes.
Les retraites : un miroir grossissant des inégalités
On retrouve logiquement les mêmes inégalités une fois l’heure de la retraite arrivée. Le système de retraite actuel agit comme miroir grossissant des inégalités qu’ont subies les femmes tout au long de leur vie professionnelle et forme des trappes de pauvreté pour les travailleuses les plus précaires. Aujourd’hui, les femmes touchent en moyenne des pensions inférieures de 42 % à celles des hommes, 26 % si on prend en compte la pension de réversion.
La réforme des retraites actuellement en discussion ne propose pas de corriger les choses, au contraire ! En allongeant la durée du travail pour toucher une retraite à taux plein ou en imposant une décote pour carrière incomplète, la réforme pourrait pénaliser les carrières hachées qui concernent le plus souvent des femmes. Il faut savoir que les femmes de 39 ans à 49 ans qui n’ont pas connu d’interruption de carrière gagnent en moyenne 23% de plus que celles qui ont temporairement cessé de travailler pour des raisons familiales.
Partage des tâches domestiques et de soin : le compte n’y est pas
Conséquence ? Elles ont beaucoup moins de temps disponible pour avoir une activité rémunérée, se former, participer à la vie politique ou associative… 42 % des femmes disent qu’elles ne peuvent avoir un travail rémunéré en raison de la charge trop importante du travail de soin qu’on leur fait porter dans le cadre familial.
Lire notre décryptage sur le Post Partum et la nécessité d’allonger le congé paternité
Un travail domestique dévalorisé et pourtant essentiel à nos sociétés
Non seulement ce travail de soin n’est pas partagé équitablement mais il n’est pas valorisé par notre société. S’occuper des enfants, d’une personne malade, des repas, de la maison, des courses, des rendez-vous médicaux… tout ceci a une valeur au sein de notre économie. D’ailleurs l’Organisation internationale du Travail (OIT) a mesuré la valorisation économique de toutes ces tâches réalisées : cela équivaut à 14,8 % du PIB de la France. Et à l’échelle du monde, la valeur du travail domestique non rémunéré des femmes contribuerait au moins à 10 000 milliards de dollars par an, soit 3 fois l’industrie du numérique !
Les 3 mesures prioritaires comme solutions
Allonger significativement la durée du congé paternité
La France, avec un congé paternité de 11 jours calendaires actuellement, figure parmi les mauvais élèves européens. Après une annonce du président de la République en septembre 2020, le congé paternité devrait être allongé à 28 jours à compter du 1er juillet 2021, mais avec seulement 7 jours obligatoires. Si ce premier pas est le bienvenu, il reste encore insuffisant. La France reste très loin du peloton de tête au sein de l’Union Européenne : l’Espagne a un congé paternité de 12 semaines et devrait passer à 16 semaines – la même durée que la mère biologique – en 2021. La Finlande a un congé paternité de 9 semaines et souhaite allonger à 7 mois les congés parentaux à partir de 2021. Le Portugal n’est qu’à 25 jours mais avec 20 jours obligatoires.
Lire notre décryptage sur le Post Partum et la nécessité d’allonger le congé paternité
Renforcer l’égalité professionnelle dans les entreprises
59% des entreprises de plus de 50 salarié.e.s ne respectent pas la loi sur l’égalité professionnelle et n’ont ni accord ni plan d‘action sur l’égalité professionnelle, et seulement 0,2% d’entre elles ont été sanctionnées.
- Renforcer les mécanismes de suivi des écarts de salaire, notamment l’index d’égalité professionnelle, et fixer une obligation de publication des écarts de rémunérations pour les grands groupes par quartile, par pays et par genre.
- Instaurer la parité dans les instances de décisions, y compris les comités exécutifs, et des postes d’encadrement dans les entreprises dans les grandes entreprises.