#LoveArmy : Où es-tu Jérôme ? – l’avis d’Oxfam France

Le journaliste Charles Villa retrace, à travers son documentaire “#LoveArmy : Où es-tu Jérôme?”, le parcours de Jérôme Jarre. Cet influenceur aux millions d’abonnés sur le réseau social Vine avait à cœur, à la fin des années 2010, de venir en aide aux plus vulnérables dans le cadre de projets humanitaires. Pourtant après avoir levé des millions d’euros pour différentes crises, ses projets humanitaires se sont révélés défaillants. Le documentaire repose alors une question centrale : Comment venir en aide aux victimes de crises humanitaires de manière efficace ?

De quoi parle le documentaire ?

La série documentaire « #LoveArmy – où es-tu Jérôme? » retrace l’histoire du premier influenceur à mobiliser les réseaux sociaux à une échelle mondiale pour des crises humanitaires. Jérôme Jarre, célèbre pour ses vidéos de six secondes sur Vine, a marqué l’ère des médias sociaux en comprenant tôt leur potentiel pour mobiliser des millions de personnes. La série explore son ascension fulgurante, son engagement humanitaire en Somalie et au Bangladesh, mais aussi les revers et controverses rencontrés en cours de route, offrant un regard rétrospectif sur l’impact des réseaux sociaux et de l’influence.

Mobiliser internet pour les crises oubliées : un défi réussi par Jérôme Jarre

Jérôme Jarre avait réussi ce que nous, ONG, avons énormément de difficultés à faire : mobiliser le grand public pour les crises oubliées.

En 2017, Jérôme Jarre alertait sur la situation en Somalie. A l’époque, une famine terrible s’abattait sur le pays. La sécheresse venait s’ajouter aux conflits et à une épidémie de choléra. Le bilan était catastrophique. Sur la seule année de 2017, on dénombre plus de 260 000 victimes de cette famine. Alors que les médias s’intéressaient peu à la situation sur place, Jerôme Jarre diffuse une vidéo sur ses réseaux sociaux pour avertir du drame humanitaire qui se joue dans la Corne de l’Afrique et lever des fonds. Le jeune influenceur réussit ce défi presque impossible d’attirer l’attention médiatique sur la Somalie car sa vidéo fait le tour du monde, est partagée par un grand nombre de célébrités internationales et permet de collecter plus de 2 millions d’euros.

Aujourd’hui la situation en Somalie est encore plus terrible qu’en 2017. C’est une grande partie de la Corne de l’Afrique et de l’Afrique de l’Est qui est touchée par une terrible crise de la faim après 6 années consécutives avec des pluies insuffisantes voire inexistantes. On estime que dans cette région du monde, 26,8 millions de personnes font face à une crise alimentaire sans précédent. Entre mars 2022 et septembre 2023, Oxfam est venue en aide à 1,8 millions de personnes via des programmes d’eau, assainissement et Hygiène, de Sécurité alimentaire et moyens de subsistance et enfin de protection. Sauf qu’aujourd’hui, pas de Jerome Jarre, ni aucun influenceur ou média pour alerter autant sur cette situation dramatique. Nos collègues sur le terrain sont alors témoins du manque de moyen sur place pour répondre à la crise humanitaire et nous faisons face à l’indifférence des médias et de nos dirigeants pour alerter l’opinion publique.

Le travail humanitaire ne s’improvise pas

Le documentaire « #LoveArmy – où es-tu Jérôme? » met en lumière que l’action humanitaire doit être bien structurée, toujours adaptée aux populations auprès desquelles nous souhaitons intervenir et surtout réfléchir avec eux. Le travail humanitaire est un exercice particulier qui requiert des compétences spécifiques et beaucoup de vigilance pour ne jamais nuire aux populations qui seront impactées. Reconnue dans le monde entier pour son expertise humanitaire, chaque année la confédération Oxfam soutient des millions de personnes dont la vie est menacée. Toutes nos interventions sont toujours réfléchies en amont, basées sur notre plus value et systématiquement construites et menées avec des partenaires locaux.

S’assurer de notre utilité avant chaque intervention

Qu’il s’agisse d’une catastrophe naturelle, d’un conflit ou d’une crise de long terme, notre premier objectif est de nous assurer d’être le plus efficace possible afin d’apporter un réel soutien aux populations affectées. Dans les premières heures ou les premiers jours, nous commençons donc par évaluer l’ampleur de la crise et nos capacités pour y répondre de manière pertinente. Par exemple, Oxfam est-elle déjà présente dans le pays ou la région impactée ? Si oui, quels programmes menons-nous et donc quels équipements avons-nous déjà à disposition ? Il faut aussi s’assurer de notre plus-value pour y répondre.

Notre action au Pakistan

Oxfam est présente au Pakistan depuis 1973, par conséquent lorsque les inondations sans précédent ont frappé le pays en 2022 nous avons pu mettre en œuvre une réponse d’urgence adaptée y compris en se servant d’équipements et projets préexistants dès les premières heures.

La confédération Oxfam est reconnue pour son expertise particulière sur les questions d’accès à l’eau, d’assainissement et d’hygiène. Dès les premières heures d’une crise, l’enjeu de l’accès à une eau propre en quantité suffisante est primordial pour les personnes impactées. L’eau contaminée et le manque d’assainissement exposent les personnes à des risques sanitaires qui sont pourtant évitables, comme le choléra. C’est pourquoi nous nous concentrons le plus souvent sur la fourniture d’eau propre, mais aussi des outils nécessaires pour s’assurer que l’eau encore à disposition ne soient pas contaminée et éviter la propagation de maladies : distribution de kits d’hygiène, installation de latrines, de stations de lavage des mains etc.

La spécificité d’Oxfam lors des réponses aux crises:

Oxfam n’est pas qu’une organisation humanitaire, c’est aussi une organisation de développement. Nos réponses d’urgence sont toujours réfléchies dans la perspective d’une sortie de crise sur le long terme, en menant des actions qui doivent permettre, autant que possible, d’éviter que cette situation se reproduise.

Notre action en Somalie

En Somalie, dans le district Kal Sheikh, au nord du pays, Oxfam agit dans le cadre du “Programme de Résilience en Somalie” (SomReP). Il a pour objectif de veiller à la consolidation des acquis en résilience du pays.
L’objectif est d’accroître la résilience des personnes en situation de vulnérabilité chronique face aux urgences climatiques et autres risques associés affectant le pastoralisme, l’agropastoralisme et d’autres moyens de subsistance.
Par exemple, dans ce district après la sécheresse de 2017, les éleveurs ont perdu une grande partie de leurs animaux. Grâce à la formation et au soutien d’Oxfam via des systèmes d’irrigation, des puits, serres, formations sur les bonnes périodes de semences… Ces éleveurs ont pu se tourner vers l’agriculture en adaptant leurs terres. De plus, les puits que Oxfam ont aménagés, permettent de fournir de l’eau à d’autres membres des communautés où sont implantés ces projets.

Ensuite, Oxfam tente d’avoir une expertise toujours adaptée aux zones dans lesquelles elle intervient. Les contextes locaux sont évidemment très différents d’une crise à l’autre. Or, dans toutes les régions où nous intervenons, nous travaillons main dans la main avec des partenaires locaux qui connaissent évidemment à la perfection le contexte concerné, ce qui nous aide à développer la réponse la plus adaptée.

Notre action en Turquie

En Turquie par exemple, avant les séismes de février 2023, nos projets se concentraient sur la justice de genre. Après les séismes, nous avons collaboré avec les associations de femmes avec qui nous travaillions depuis des années afin de nous assurer d’une réponse spécifique à destination des femmes, qui font souvent face à des impacts exacerbés en situation de crise. Avec ces coopératives de femmes, nous avons pu mettre en œuvre des réponses dans toutes les zones touchées, en distribuant notamment des kits d’hygiène, des couvertures, de la nourriture ou de quoi cuisiner auprès de milliers de familles qui se sont retrouvées sans abris.

Une question centrale : Comment aider ?

Dans le cadre de nos réponses, nous nous attachons particulièrement à respecter certaines bonnes pratiques.

Les réponses aux crises humanitaires nécessitent des experts

Oxfam n’envoie pas de volontaires dans le cadre de ses interventions humanitaires. Apporter une aide dans le cadre d’une crise humanitaire est extrêmement complexe et requiert des compétences spécifiques. La réponse doit toujours être mise en place en priorité par des professionnel·le·s du pays ou de la région. C’est pourquoi nous nous opposons au concept de “volontourisme” par exemple. Dans la mesure du possible, Oxfam va au contraire acheter des articles localement ou dans des pays de la région touchée, et donc dans la même optique nous faisons appel à des partenaires ou des entreprises locales. Cela stimule l’économie locale et a un impact environnemental moindre.

C’est pourquoi faire un don en espèces est l’un des moyens les plus efficaces de soutenir le travail d’urgence d’Oxfam et non pas partir sur le terrain afin de soutenir tel ou tel projet. Le “volontoursime” qui est un voyage proposé par des organismes qui font payer à des touristes des séjours humanitaires a donc in fine des impacts positifs bien plus limités voire nuls. Pour illustrer, il est logiquement plus intéressant de faire construire une école au Tchad par des entreprises locales que par des touristes occidentaux. De même, il est important de rappeler que dans le cadre de réponses humanitaires, les modes d’actions doivent être construits par des expert·e·s et des professionnel·le·s. Oxfam en tant qu’organisation spécialisée sur les questions d’eau sait que dans le cadre d’un séisme détruisant les infrastructures, la rénovation des systèmes d’assainissement doit être réalisée par des professionnel·le·s.

L’expertise nécessaire est toujours présente dans les zones impactée

Nous en sommes persuadés, ce sont nos partenaires locaux qui sont les plus à même d’apporter des réponses aux crises dans leur propre pays. Leur connaissance du terrain et des populations leurs permettent d’identifier au mieux les besoins des personnes les plus vulnérables et d’apporter une aide adaptée. Ces partenaires locaux nous permettent également d’accéder aux zones les plus isolées au cœur de certaines crises.

Tenir compte des inégalités déjà préexistantes

Les crises mettent toujours en exergue les injustices préexistantes et les accentuent. Ainsi, il est essentiel de tenir compte des inégalités structurantes des régions dans lesquelles nous agissons. Par exemple, en Ukraine, notre réponse s’est principalement concentrée sur les femmes. Un conflit comme celui-ci impacte l’ensemble de l’économie, cette situation a pour conséquence de pousser un nombre croissant de femmes dans le secteur informel et vers des emplois souvent sans droit ni protection, que l’on peut rapidement assimiler à du trafic d’être humain. Dans cette optique, les violences basées sur le genre ont augmenté de façon dramatique et cette tendance devrait se poursuivre durant tout le conflit.

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