VoxFemmes : Les inégalités économiques dans le couple hétéro

VoxFemmes, c’est le podcast made in Oxfam France créé par les bénévoles du groupe local de Paris afin de sensibiliser aux inégalités socio-économiques liées au genre. Dans le douzième épisode, les bénévoles partent à la rencontre de Lucile Quillet. Lucile est journaliste et autrice. Dans son premier essai paru en 2021, « Le prix à payer, ce que le couple coûte aux femmes », elle décrypte la manière dont les femmes sont bien souvent lésées financièrement dans le couple hétérosexuel. Membre de l’Observatoire de l’émancipation économique de la Fondation des femmes, elle a aussi co-écrit une note intitulée « La dépendance économique des femmes, une affaire d’Etat ? »

 Le couple hétérosexuel, racines des inégalités économiques

Dans VoxFemmes, Lucile Quillet revient sur les causes structurelles des inégalités économiques qui se creusent au sein du couple. Les inégalités commencent avec la gestion du budget qui est de 50/50 dans la plupart des couples. Or, dans 75% des cas, la femme a un revenu inférieur à celui de son conjoint. Ainsi un tel fonctionnement alimente les inégalités. La répartition des dépenses est elle aussi révélatrice des inégalités dans le couple comme le démontre la métaphore « Monsieur voiture et Mme PQ » utilisée par Lucile. Alors que les femmes assurent les dépenses périssables (courses…) le reste des dépenses (prêts…) reviennent à Monsieur.

VOX FEMMES

 « Quand on aime, on compte »

Lucile Quillet

Lucile Quillet met également en avant le « travail gratuit » des femmes, qui assurent 74% des tâches domestiques et parentales à la maison. Une réalité liée au manque de places en crèche, qui contraint 1 parent sur 5 à garder l’enfant à la maison, et donc à passer en temps partiel, voire à s’arrêter de travailler. Un sacrifice dans la carrière (et le salaire) consenti dans la majorité des cas par les femmes.

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 La séparation du couple : le lever de rideau sur les inégalités

Ces inégalités coûtent cher aux femmes au moment de faire les comptes lors d’une séparation : elles sont les principales perdantes au regard de tout ce à quoi elles ont contribué pendant la durée du couple. Un chiffre éclairant pour illustrer ce phénomène : le niveau de vie des femmes baisse en moyenne de 20% après la séparation, contre 3% pour les hommes, d’après la note de la Fondation des Femmes.

Mais au-delà des inégalités qui ont lieu dans le domaine privé, Lucile Quillet va plus loin en évoquant la responsabilité de l’Etat, dont le système familialiste a été construit au moment de l’après-guerre, et semble dater d’une autre ère. Il découle d’une génération où l’homme prenait en charge son foyer en travaillant, et les divorces étaient beaucoup moins fréquents. La journaliste décrit la façon dont l’Etat crée de la dépendance économique chez les femmes dans le couple, notamment à travers la façon dont les aides sociales sont distribuées. Elles dépendent pour la plupart de la solidarité conjugale ; le principe selon lequel des personnes vivant ensemble mettent leur argent en commun. Les APL par exemple sont déterminées sur la base des revenus du foyer, et non pas uniquement de la personne qui en fait la demande. Dans le cas d’une femme divorcée qui se remet en couple, elle pourra perdre ses aides au logement si son nouveau conjoint gagne suffisamment aux yeux de l’Etat.

La journaliste et autrice revient aussi sur les préjugés liés à la pension alimentaire, qui serait utilisée à des fins personnelles pour les femmes. Or, elle est bien souvent insuffisante pour subvenir aux besoins des enfants, lorsqu’elle est versée. De plus, elle est considérée comme un revenu supplémentaire, et donc soumise à l’impôt sur le revenu pour les femmes, mais défiscalisée pour les hommes.

 

Face à ces inégalités, comment agir ?

Des solutions individuelles

Lucile Quillet nous invite à réfléchir aux solutions individuelles et collectives possibles pour tendre davantage vers l’égalité économique entre les hommes et les femmes. Cela commence au sein du couple, en n’hésitant pas à parler d’argent, et naturellement à répartir plus équitablement les dépenses. Il s’agit de reconnaître aussi la juste valeur du travail de chacun, qu’il soit rémunéré ou non. Le travail domestique est un véritable travail qui demande beaucoup de temps et d’énergie.

 « Il s’agit de créer des débats dans la société, et de le rendre visible car toute la société a une dette envers les femmes »

Lucile Quillet

Des solutions politiques

Mais au-delà de la sphère privée, l’Etat a aussi son rôle à jouer, en modifiant par exemple le modèle politique qui repose encore beaucoup sur le mariage, qui n’est plus forcément le modèle idéal pour la nouvelle génération. Différentes mesures peuvent être prises pour tendre à plus d’égalité comme la déconjugalisation des aides, encore trop souvent soumises aux revenus du foyer, et non de la personne qui en fait la demande. L’allongement du congé paternité est une autre piste qui permettrait de faire baisser mécaniquement la discrimination à l’embauche pour les femmes, et les écarts dans les tâches domestiques et parentales.

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