Dans une note inédite, Oxfam a passé en revue la structure de la rémunération des PDG du CAC 40 sur l’année 2019. Ce mardi matin, le journal Libération dévoile les résultats détaillés de cette étude.

Oxfam révèle ainsi comment ces grands patrons sont majoritairement rétribués sur des critères d’ordre financiers incitant au court terme plutôt que sur des critères climatiques et sociaux, quasi inexistants, et appelle à des mesures de régulation.

Lire la note Oxfam France « Salaires des PDG du CAC 40 : la bourse ou le climat ? »

En 2019, en moyenne, 67 % de la rémunération des PDG du CAC 40 sont liés à des résultats financiers à court-terme de l’entreprise. A contrario, moins de 10 % de leur rémunération moyenne étaient liés à des critères non-financiers et stratégiques de long-terme. Par ailleurs, la plupart des objectifs non financiers restent vagues, à peine la moitié de ces critères étaient dotées de cibles spécifiques et mesurables. Les 24 % restants sont de la rémunération fixe.

Autres révélations du rapport :

  • Au sein de la part financière, en moyenne 27 % de la rémunération des PDG sont indexés sur la satisfaction des actionnaires. Dit autrement, plus d’1 euro sur 4 de la rémunération des PDG du CAC 40 dépend directement de la satisfaction des actionnaires.
  • Les 3 entreprises avec la plus grosse variable financière sont Dassault (92 % de la rémunération totale) ; Sanofi (84 % de la rémunération totale) et Téléperformance (78 % de la rémunération totale).

En mars 2021, Oxfam révélait que les entreprises du CAC 40 sont sur une trajectoire nous conduisant vers un réchauffement climatique de +3,5°C d’ici 2100 [1]. Une partie de l’explication de performance climatique catastrophique se cache dans la structure des rémunérations des PDG du CAC40 :

  • Seules 13 entreprises du CAC 40 possèdent un critère spécifiquement dédié au climat au sein de la rémunération du PDG. Au sein de ces entreprises, le critère climat pèse pour à peine 3,5 % de la rémunération du PDG.
  • Alors que Total a une trajectoire climat associée à un réchauffement de 4,5°C, seule 2 % de la rémunération de son PDG, Patrick Pouyanné, sont indexés à des critères climat dans sa rémunération de 2019.
  • Le Crédit Agricole a une empreinte carbone supérieure à la France. Pourtant, cette entreprise ne possède aucun objectif spécifique dédié au climat dans la rémunération de son PDG.

Par ailleurs, Oxfam a aussi analysé les critères de parité femmes-hommes influençant la part variable des PDG du CAC40, et seules 5 entreprises possèdent un critère mesurable en la matière au sein de leurs instances managériales.

Pour Quentin Parrinello, responsable de plaidoyer d’Oxfam France : « Si ces entreprises perpétuent un modèle climaticide et inégalitaire, c’est en grande partie parce que les personnes qui les dirigent sont incitées financièrement à privilégier le court-terme et en particulier l’intérêt des actionnaires plutôt que la gestion durable et long-terme de l’entreprise ».

« Pour remettre du long-terme au sein de l’entreprise, il est absolument crucial de mettre un terme à ce pacte entre PDG et actionnaires qui est mortifère pour l’entreprise et pour la société car n’a qu’une visée : celle de la rentabilité à court terme. Des solutions existent pour changer la donne. Une priorité devrait être de limiter la part de rémunération des PDG indexée sur des critères financiers, pour qu’elle ne représente pas plus de la moitié de la rémunération totale. »

« C’est tout l’enjeu d’une directive européenne sur la gouvernance durable des entreprises qui sera discutée dans les prochains mois au Parlement européen. Nous attendons de la France qu’elle porte la vision d’une ‘entreprise de demain’ qui soit plus juste, plus durable et ainsi plus résiliente face aux prochaines crises ».

Contact presse

Pauline Leclère pleclere@oxfamfrance.org 07 69 17 49 63

Notes aux rédactions

[1] Rapport Oxfam France « Climat : CAC degré de trop », mars 2021. https://www.oxfamfrance.org/rapports/climat-cac-degres-de-trop/

Oxfam France appelle le gouvernement ainsi que les instances européennes qui vont très prochainement examiner une directive très attendue sur la gouvernance durable des grandes entreprises, à adopter les mesures suivantes :

  1. Réduire la part variable des rémunérations, pour réduire les écarts de salaires, y compris en imposant un écart de salaire maximum de 1 à 20 entre la rémunération du PDG et le salaire médian au sein de l’entreprise.
  2. Limiter la part de rémunération des PDG et des cadres dirigeants indexée sur des critères financiers, pour qu’elle ne représente pas plus que la moitié de la rémunération totale. Supprimer les critères de rémunérations indexés sur la satisfaction des actionnaires.
  3. Réguler les critères non-financiers utilisés pour la rémunération des PDG et des cadres dirigeants : ces critères doivent être spécifiques, mesurables, atteignables, pertinent et limités dans le temps.
  4. Diversifier les compétences et profils au sein des Conseils afin de prendre en compte les intérêts de l’ensemble des parties prenantes de l’entreprise (action-naires mais aussi clients, salariés, fournisseurs etc.).
  5. Encadrer la part des bénéfices distribués aux actionnaires. Les fonds non distribués doivent abonder une réserve d’entreprise finançant la transition écologique et sociale.