A la veille du Forum économique mondial de Davos qui rassemble le gotha du monde politique et économique, Oxfam révèle dans son rapport « Services publics ou fortunes privées » qu’en 2018 la fortune des milliardaires de la planète a augmenté de 12 % représentant un gain quotidien cumulé de 2,2 milliards d’euros, tandis que la richesse de la moitié la plus pauvre de la population mondiale – soit 3,8 milliards de personnes – a chuté de 11 %.

Pour Pauline Leclère, porte-parole d’Oxfam France : « Après les Etats-Unis, la France est le pays qui a connu la plus forte progression de millionnaires en 2018. Aujourd’hui, en France, 8 milliardaires français possèdent autant que les 30% les plus pauvres, suivant une tendance qu’a empruntée nombre de pays riches avant nous. La responsabilité des gouvernements est sans équivoque : loin de s’attaquer aux inégalités, ils les aggravent d’un côté en allégeant allègrement la taxation des entreprises et des plus fortunés, et en renonçant à combattre l’évasion fiscale tandis que de l’autre, ils sous-financent les services publics, au détriment des plus pauvres et des femmes notamment. »

Oxfam indique que le fossé entre les plus riches et les plus pauvres a continué de se creuser en 2018, compromettant par là-même, globalement, la lutte contre la pauvreté : en Afrique subsaharienne, l’extrême pauvreté a ainsi augmenté, et à ce jour, encore 3,4 milliards de personnes survivent avec moins de 5 € (5,5 $) par jour.

Ainsi :

  • En France, en 2018, les 5% les plus riches détenaient 40% des richesses nationales. Et les 1% les plus riches en détenaient 20,6 %.
  • Depuis la crise financière, le nombre de milliardaires a presque doublé : ils étaient 1 125 en 2008, et 2 208 en 2018.
  • Le rythme de la réduction de la pauvreté dans le monde a été divisé par 2 depuis 2013. La pauvreté repart même à la hausse en Afrique subsaharienne.
  • Le taux nominal maximum moyen de l’impôt sur le revenu des particuliers dans les pays riches est passé de 62% en 1970 à seulement 38% en 2013.
  • Dans certains pays comme le Brésil et le Royaume Uni, les 10% les plus pauvres payent une proportion plus élevée de leur revenu en impôts que les 10% les plus riches.
  • Les grandes fortunes dissimulent 7 600 milliards de dollars aux autorités fiscale et l’évasion fiscale des multinationales privent les pays en développement de 100 milliards de dollars chaque année.
  • Les hommes possèdent aujourd’hui 50% de richesses de plus que les femmes. Aux Etats-Unis, un homme blanc célibataire a un patrimoine 100 fois plus important que celui d’une femme hispanique célibataire.

Au-delà de l’impact économique, le désengagement des gouvernements dans l’éducation ou la santé a un coût humain très élevé. En réduisant les moyens alloués aux services publics qui bénéficient d’abord aux plus pauvres, et aux femmes et aux jeunes filles, les gouvernements renforcent encore les inégalités de genre, pénalisant les femmes, qui compensent  le manque de services publics par davantage de travail domestique non-rémunéré.

« Le sentiment d’injustice est très fort aujourd’hui et il repose sur une réalité économique et sociale particulièrement grave. La fiscalité a été détournée de l’un de ses objectifs nobles et principaux : celui d’aider à construire une société inclusive, à rendre l’économie plus humaine. Emmanuel Macron ne manque pas une occasion de déplorer l’ampleur des inégalités et en a fait le thème central du G7 dont il prend la présidence cette année. Il est temps qu’il se mette à l’écoute des 99 % des Français et non des 1 % les plus riches et qu’il mette en œuvre des réformes fiscales en ce sens ! »

« Pour s’attaquer véritablement aux inégalités en France et dans le monde, les gouvernements doivent obliger les plus aisés et les grandes entreprises à payer leur juste part d’impôt et à contribuer davantage à l’effort commun. Les recettes fiscales investies dans des services de santé et d’éducation de qualité sont une clé pour réduire les inégalités en corrigeant des inégalités de départ. Enfin, les grandes entreprises ont également un rôle crucial à jouer en commençant par réduire les écarts de salaires indécents en leur sein. »

Pour répondre à la crise des inégalités et au sentiment d’injustice fiscale, Oxfam demande aux gouvernements – à commencer par Emmanuel Macron qui préside le G7 cette année – de promouvoir et d’adopter des mesures ambitieuses :

  • Mettre en place des fiscalités progressives pour financer des services publics de qualité, en demandant aux plus aisés – particuliers et grandes entreprises – d’être davantage mis à contribution pour l’intérêt général. Cela commence en France par le rétablissement d’un impôt sur la fortune.
  • Lutter efficacement contre l’évasion fiscale en dressant une liste crédible des paradis fiscaux et en exigeant des multinationales qu’elles paient des impôts correspondant à leurs activités réelles.
  • Adopter et promouvoir des politiques d’aide au développement qui investissent prioritairement dans les services essentiels (éducation, santé, agriculture, protection sociale).
  • Réduire les écarts de salaires dans les grandes entreprises, en fixant un écart maximum entre les plus hauts salaires et le salaire médian et dès maintenant en obligeant les grandes entreprises à publier les écarts de salaire par quartile en leur sein.
  • Faire de l’égalité entre les femmes et les hommes et la lutte contre toutes les discriminations fondées sur le genre, un axe transversal de toutes les politiques publiques.

Contacts presse :

Julia Zahreddine 07 69 22 41 71 jzahreddine@oxfamfrance.org

Pauline Leclère 07 69 17 49 63 pleclere@oxfamfrance.org