Évasion fiscale : la Commission européenne renonce à mettre le paquet

Mercredi 17 juin 2015 – Le commissaire européen aux affaires économiques Pierre Moscovici a présenté aujourd’hui son plan d’action visant à rendre la fiscalité des entreprises plus juste et plus efficace au sein de l’Union européenne.

Il s’agit d’une des réponses promises par la Commission suite au scandale du Luxleaks qui avait mis en évidence en novembre dernier le caractère industriel de l’évasion fiscale des entreprises au niveau européen. Les organisations membres de la Plateforme Paradis Fiscaux et Judiciaires déplorent le manque d’ambition de ce plan d’action, qui n’est pas à la hauteur des attentes des citoyens et qui ne permettra pas de récupérer les centaines de milliards perdus chaque année en Europe à cause des pratiques des entreprises multinationales.

 « Après le scandale du Luxleaks, la Commission européenne a gâché une opportunité unique de faire des propositions concrètes pour lutter contre l’évasion fiscale des grandes entreprises. Le résultat est un plan d’action timide, qui manque de consistance. Combien de scandales faudra-t-il encore avant de réformer vraiment les règles fiscales au sein de l’Union européenne ? », indique Manon Aubry, responsable de plaidoyer Justice fiscale au sein d’Oxfam France.

« Le plan de la Commission européenne est tellement vague qu’il est difficile de s’imaginer comment il pourrait venir renforcer la lutte contre l’évasion fiscale des grandes entreprises. Tout laisse à penser que les entreprises pourront continuer à jouer avec les différentes législations des pays européens et enregistrer leurs profits dans des pays à fiscalité faible pour ne payer qu’un minimum d’impôt. Ce n’est pas un gage de crédibilité dans la réforme pour une fiscalité plus juste ».

 « Alors que les citoyens européens réclament plus de transparence, les avancées sur cette question sont extrêmement timides. Pour s’assurer que les entreprises payent des impôts qui correspondent à la réalité de leur activité dans un pays donné, il faut commencer par savoir où les entreprises réalisent leur chiffre d’affaires et emploient des salariés et où elles payent des impôts. Alors que cette mesure est déjà en place pour les banques européennes, les hésitations de la Commission à l’étendre à toutes les entreprises est incompréhensible », ajoute Lucie Watrinet du CCFD-Terre Solidaire et coordinatrice de la Plateforme Paradis Fiscaux et Judiciaires

Sur l’assiette commune consolidée de l’impôt sur les sociétés (ACCIS)

 « Nous saluons la décision de la Commission européenne de planifier une nouvelle proposition sur la mise en place d’une assiette commune consolidée pour l’impôt des sociétés (ACCIS) obligatoire au plus vite. Cependant, nous regrettons que la Commission suggère de reporter la phase de consolidation à plus tard alors même qu’il s’agit de l’aspect le plus important. Sans consolidation, les entreprises resteront libres de jouer au niveau de leurs filiales avec les différentes législations des pays européens et enregistrer leurs profits dans des pays à fiscalité faible pour ne payer qu’un minimum d’impôt. Pire encore, la Commission souhaite réfléchir à un mécanisme temporaire qui pourrait permettre aux entreprises de déduire leurs pertes mais sans consolider leurs bénéfices », déclare Manon Aubry d’Oxfam France.

Sur la liste des paradis fiscaux annexée à la communication

 « La nouvelle liste de paradis fiscaux proposée par l’Union européenne ne recense évidemment pas ceux comme le Luxembourg ou les Pays Bas, situés en son sein. Elle vient une nouvelle fois démontrer les limites de l’approche des listes, toujours incomplètes, toujours politiques. L’enjeu est de faire en sorte que les entreprises ne les utilisent pas à des fins d’évasion fiscale, ce à quoi ne répond pas suffisamment ce plan d’action », conclut Lucie Watrinet du CCFD-Terre Solidaire et coordinatrice de la Plateforme Paradis Fiscaux et Judiciaires.

Membres de la Plateforme Paradis fiscaux et judiciaires : Les Amis de la Terre –  Anticor – Attac France – CADTM France  – CCFD-Terre Solidaire – CFDT – CGT – CRID  – Droit pour la justice –Observatoire citoyen pour la transparence Financière Internationale – Oxfam France – Justice et Paix – Réseau Foi et Justice AfriqueEurope – Secours catholique Caritas France – Sherpa – Survie – Syndicat de la magistrature – Solidaires Finances Publiques-Transparency International France(www.stopparadisfiscaux.fr)

Contact

Marion Cosperec
Chargée des relations média
mcosperec@oxfamfrance.org
06 30 46 66 04

Notes aux rédactions

Note aux rédactions :

Le plan d’action publié aujourd’hui fait suite à un premier "paquet" développé par la Commission européenne à la suite des révélations du scandale Luxleaks. Ces « paquets » visent à réformer de manière équitable le système de taxation des grandes entreprises. Le premier paquet sur la Transparence fiscale a été publié le 8 mars 2015.

Le Luxembourg, au cœur du scandale Luxleaks prendra la présidence de l’Union européenne en juillet et a promis de faire de la fiscalité une priorité. Le pays est touché par une enquête menée par la Commission européenne pour des rescrits fiscaux concernant Fiat et Amazon, de même aux Pays-Bas (Starbucks), en Irlande (Apple) et en Belgique. La Commission envisage aussi d’ouvrir une enquête sur les pratiques fiscales de Mc Donalds au Luxembourg.

Ce communiqué a été produit avec le soutien financier de la Commission européenne. Son contenu relève de la seule responsabilité d'Oxfam France et ne reflète pas nécessairement les positions de la Commission européenne et de ses services.