Le Rapport mondial sur les crises alimentaires sorti aujourd’hui – et produit par l’ONU avec 16 organisations partenaires dont Oxfam – révèle que plus de 193 millions de personnes à travers 53 pays ont connu des épisodes de faim aiguë en 2021 et ont besoin d’une aide urgente pour l’accès à la nourriture et la préservation de leurs moyens de subsistance.

Guillaume Compain, chargé de campagne agriculture et sécurité alimentaire chez Oxfam France, déclare : « Il est profondément inquiétant de constater que la faim extrême augmente à une échelle jamais vue auparavant. 40 millions de personnes supplémentaires ont été amenées dans une situation de faim aigüe l’an passé, soit une hausse de près de 25 % en un an et de 80 % depuis 2016 ».

Tous les signaux sont là pour que des pays tels que l’Éthiopie, le Soudan du Sud et le Yémen soient confrontés à des conditions de famine dans les semaines qui viennent. Quant à l’Afrique de l’Ouest, 27 millions de personnes s’y trouvent déjà dans une situation de crise alimentaire majeure et ils pourraient atteindre 38 millions d’ici l’été si rien n’est fait.

Alors même que toutes les sonnettes d’alarme ont été tirées et que la communauté internationale dispose des outils qui auraient permis d’anticiper cette aggravation de la faim, les gouvernements du monde entier ne se sont pas suffisamment donné les moyens de lutter pour résoudre ce fléau. Les gouvernements du G7 et de l’Union européenne se sont par exemple engagés à verser 2,6 milliards de dollars dans le cadre des appels humanitaires lancés par l’ONU, mais cette somme n’est rien en comparaison des 8,5 milliards de dollars promis l’année dernière pour mettre fin à la famine.

« Pour ne rien arranger, la guerre en Ukraine est venue ajouter son lot de difficultés. Les denrées alimentaires ont atteint des prix inégalés, tandis que certains pays riches ont réduit une partie de leur aide humanitaire vers des pays confrontés à la faim et à la malnutrition, comme le Mali ou la Syrie, pour la réorienter en direction de l’Ukraine. Cependant, quand les crises s’additionnent, les budgets doivent l’être aussi ».

Les causes structurelles de la faim, telles que les conflits armés et les effets du changement climatique, ont été aggravées par les turbulences du COVID-19 et par la guerre en Ukraine, faisant grimper les prix des denrées alimentaires à un niveau record en mars 2022 – en hausse de 12,6 % par rapport à février – ce qui rend la nourriture de plus en plus inaccessible pour des millions de personnes. Le panier moyen des denrées alimentaires, mesuré par la FAO, a atteint son plus haut niveau historique cette année.

« Il est du devoir de la communauté internationale de s’attaquer aux causes et effets de cette crise mondiale en régulant mieux les marchés internationaux et en déployant des mécanismes de solidarité. Les pays les plus riches doivent également assumer leurs responsabilités dans la crise climatique en réduisant leurs émissions de gaz à effets de serre. Ils doivent aider financièrement les pays à faibles revenus pour les pertes et les dommages qu’ils subissent et aider les petits exploitants agricoles – en particulier les femmes – à s’adapter au changement climatique. Il ne s’agit pas d’une question de charité mais de justice. »

 

Contact presse :

Guillaume Compain : +33 (0)6 85 26 01 08 – gcompain@oxfamfrance.org

 

Notes aux rédactions :

– Le Rapport mondial sur les crises alimentaires est un rapport annuel publié par le Réseau mondial sur les crises alimentaires, une alliance internationale regroupant les Nations unies, l’Union européenne et des agences gouvernementales et non gouvernementales qui s’efforcent de lutter ensemble contre les crises alimentaires.

– Les nouvelles données de l’OCDE montrent que les dépenses globales d’aide humanitaire des 30 membres de l’OCDE se sont élevées à 179 milliards de dollars en 2021. Les pays riches n’ont consacré que 0,33 % de leur revenu national brut (RNB) à l’aide au développement, soit autant qu’en 2020 et bien moins que les 0,7 % promis en 1970. En 2021, seuls 5 pays – le Luxembourg, la Norvège, l’Allemagne, la Suède et le Danemark – auront tenu cette promesse.

– Récemment, Oxfam a exprimé son inquiétude quant au fait que certains gouvernements donateurs déplacent déjà les budgets d’aide humanitaire pour financer l’assistance à l’Ukraine et les coûts d’accueil de plus de 4,5 millions de personnes qui ont fui le pays récemment. Par rapport à 2020, l’aide pour l’accueil des réfugiés n’a pas changé et se stabilise à 5,2 % depuis son pic en 2016 où elle représentait 11 % de l’aide. Les statistiques actuelles ne tiennent pas compte de l’aide de 2022 qui a vu cette tendance au détournement de l’aide.

– Selon les analyses du Cadre harmonisé pour l’Afrique de l’Ouest de mars 2022, la région connaît sa pire crise alimentaire depuis une décennie, avec 27 millions de personnes qui souffrent de la faim. Ce nombre pourrait grimper à 38 millions de personnes d’ici juin si des mesures ne sont pas prises de manière urgente.

– Plus de 260 millions de personnes supplémentaires risquent de basculer dans la pauvreté extrême en 2022 à cause de la COVID-19, de l’accroissement des inégalités mondiales et du choc de la hausse des prix alimentaires, amplifié par la guerre en Ukraine, dénonce Oxfam dans un nouveau rapport publié en avril. Téléchargez le rapport d’Oxfam « D’abord la crise, puis la catastrophe » (en anglais).

– Oxfam a publié une analyse des conséquences de la guerre en Ukraine sur les crises alimentaires mondiales. Nous appelons notamment les gouvernements à répondre aux appels du Programme Alimentaire Mondial, à ne pas redirige l’aide promise, à éviter les restrictions aux exportations, à mettre en œuvre de nouvelles régulations pour empêcher la spéculation, à soutenir l’autonomie alimentaire des pays vulnérables (agriculture paysanne, agroécologie…), à promouvoir des politiques commerciales plus équitables ou encore à développer une protection sociale universelle.