Nouveau rapport au Parlement sur les exportations d’armement de la France en 2007 : un retour à l’opacité?

Alors que le Ministère de la Défense transmet cette semaine au Parlement le rapport sur les exportations d’armement de la France en 2007, {{les membres de la plate-forme française «[ Contrôlez les armes->http://www.controlarms.org/] » se montrent vivement préoccupés par le manque de transparence que représente ce nouvel exercice dans la pratique de la France.}} La plate-forme appelle les députés français à prendre leurs responsabilités.

Après plusieurs années d’amélioration dans son contenu, les ONG soulignent un retour à l’opacité, dans un contexte où la France affiche sa volonté de relancer ses exportations et d’assouplir les procédures à l’export pour ses entreprises.

La plate-forme appelle les députés français à prendre leurs responsabilités et exiger plus de transparence de la part du gouvernement sur les matériels effectivement exportés et sur les garanties prises pour éviter que ces armes ne portent atteinte aux droits humains, au droit international humanitaire ou au développement durable. Sans attendre un rapport annuel systématiquement partiel et tardif, les députés devraient auditionner régulièrement les membres de la Commission interministérielle pour l’étude des exportations de matériel de guerre (CIEEMG), ainsi que les services du Premier Ministre qui délivrent in fine les autorisations d’exportation.

« Le Parlement doit enfin jouer son rôle de contrôle. Dès les prochains jours, les députés doivent demander des comptes au gouvernement sur ces exportations, notamment celles qui ont été effectuées dans des contextes de conflits ouverts ou à destination des pays coupables de graves violations des droits humains et dont les dépenses militaires attisent les conflits, au détriment de l’accès des populations à l’éducation ou à la santé » a déclaré Nicolas Vercken, responsable de plaidoyer à Oxfam France.

La Plate-forme française de la campagne mondiale « Contrôlez les armes » s’inquiète de la poursuite des exportations à des pays violant les droits humains. De fait, la France reconnaît avoir exporté en 2007 des armes à de nombreux pays identifiés comme particulièrement instables ou responsables de graves violations des droits humains et du droit international humanitaire, comme la Colombie, la Chine, Israël, ou encore le Tchad.

Les ONG sont vivement préoccupées par les risques d’utilisation des matériels exportés, pouvant entraîner des violations des droits humains et du droit international humanitaire ou nuire au développement durable, que ce soit de façon directe ou indirecte, par le biais des réexportations.

« A l’heure où la France est particulièrement engagée en faveur de l’adoption d’un Traité international sur le commerce des armes (TCA), lequel permettrait d’interdire les transferts d’armes qui alimentent les conflits, la pauvreté et les atteintes graves aux droits humains, celle-ci doit se mettre en conformité avec ses engagements . Elle se doit donc d’appliquer une politique d’exportation en accord avec ses discours et engagements internationaux, mais également cesser de bloquer toute avancée au niveau européen et faire en sorte que le « Code de Conduite de l’Union européenne en matière de contrôle des exportations d’armement » soit enfin adopté en « Position Commune », devenant ainsi véritablement juridiquement contraignant» a déclaré Benoît Muracciole responsable de campagne auprès de la Commission armes à Amnesty International.

« Il est grand temps que le Parlement prenne ses responsabilités et se saisisse de sa fonction de contrôle démocratique : une question aussi sensible que les exportations d’armes ne doit pas être laissée aux seules mains de du gouvernement ! » ajoute Didier Destremau du Secours catholique

NOTES AUX REDACTIONS

Dans ses diverses annexes, le rapport donne les informations suivantes en ce qui concerne les exportations vers les pays ci-dessous :
Tchad : 5 agréments préalables acceptés et 4 autorisations d’exportation de matériels de guerre délivrées en 2007 (3.506.969 euros) + 1 cession onéreuse de 64.447,20 euros. Prise de commandes 5,0 ML4* ; 6,3 ML6* ; 45 mitrailleuses livrées en 2007
Colombie : 12 agréments préalables et 17 autorisations d’exportation de matériels de guerre (2.345.347 euros) Prises de commandes 0,3 ML10*
Chine : 112 agréments préalables et 136 autorisations d’exportation de matériels de guerre (193.297.131 euros) 56,3 ML5* ; 14,6 ML10* ; 5,6 ML11* ; 0,6 ML13* ; 9,3 ML* 15 ; 0,2 ML20*
Israël : 118 agréments préalables et 112 autorisations d’exportation de matériels de guerre (126.271.263 euros) 1,1 ML4* ; 5,7 ML5* ; 1,4 ML7* ; 1,3 ML9* ; 5,9 ML10* ; 2,5 ML11* ; 3,2 ML 19*

Au niveau européen, le Code de conduite de l’Union européenne en matière d’exportation d’armements conventionnels est l’un des instruments régionaux les plus aboutis en matière de contrôle des transferts d’armes. Il définit huit critères que les Etats européens doivent prendre en compte pour refuser ou autoriser une demande d’exportation d’armes, faisant notamment référence au respect des droits humains, au droit international humanitaire et au développement durable. Cependant, ce Code de conduite n’a qu’une valeur incitative et reste facultatif.
Pourtant, dès 2005, les Etats membres de l’Union européenne (UE) se sont mis d’accord pour l’adopter en Position commune et le rendre ainsi juridiquement contraignant, de sorte que son application devienne obligatoire. Mais la France bloque toute avancée sur ce dossier.
Cette situation d’attente place l’Union européenne dans une position délicate quant à l’adoption d’un futur Traité international sur le commerce des armes (TCA), actuellement négocié aux Nations unies.

* Liste communes des équipements militaires de l’Union européenne
Parue au Journal officiel de l’Union européenne du 25.5.2005
– ML4 Bombes, torpilles, roquettes, missiles, autres dispositifs et charges explosifs et équipement et accessoires connexes, spécialement conçus pour l’usage militaire.
– ML5 Matériel de conduite de tir et matériel d’alerte et d’avertissement connexe, et systèmes et matériel d’essai, d’alignement et de contre-mesure connexes, spécialement conçus pour l’usage militaire, et leurs composants et accessoires spécialement conçus.
– ML6 Véhicules terrestres et leurs composants.
– ML7 Agents chimiques ou biologiques toxiques, «agents antiémeutes», substances radioactives, matériels composants et substances connexes.
– ML9 Navires de guerre, matériel naval spécialisé et accessoires, et leurs composants, spécialement conçus pour l’usage militaire.
– ML10 «Aéronefs», «véhicules plus légers que l’air», véhicules aériens non habités, moteurs et matériel «d’aéronef», matériel connexe et composants, spécialement conçus ou modifiés pour l’usage militaire.
– ML11 Matériel électronique et composants spécialement conçus non visés par ailleurs dans la liste commune des équipements militaires de l’UE.
– ML13 Matériel et constructions blindés ou de protection et leurs composants.
– ML15 Matériel d’imagerie ou de contre-mesures, spécialement conçu pour l’usage militaire et ses composants et accessoires spécialement conçus.
– ML19 Systèmes d’armes à énergie dirigée, matériel connexe ou de contre-mesure et modèles d’essai, et leurs composants spécialement conçus.
– ML20 Matériel cryogénique et «supraconducteur», et ses composants et accessoires spécialement conçus.

Contact

Contact presse :

– Secours catholique – Caritas France nne Bonnefon : 01 45 49 73 36

– Amnesty International France : urélie Chatelar : 01 53 38 65 77

– OXFAM France : agali RUBIN : 01 56 98 24 45 – 06 30 46 66 04

Notes aux rédactions