Les populations les plus vulnérables payent le prix d’une aide en baisse

Dans un monde de plus en plus inégalitaire, où 10% des personnes les plus riches de la planète détiennent 85% du patrimoine mondial, l’aide publique au développement (APD) est une politique cruciale et un important levier pour réduire cet écart et lutter contre la pauvreté dans le monde.

Or, en France, l’APD subit une baisse importante depuis la crise financière, avec des conséquences considérables pour les pays pauvres. Cette baisse intervient alors que 68% des Français privilégient l’augmentation ou le maintien de la part du budget consacré à l’APD.

Une baisse prévue jusqu’en 2017…

Le 1er octobre dernier, le budget de l’Etat pour 2015 était présenté à l’Assemblée Nationale, prévoyant une baisse de 3% de l’APD, qui fait suite à celle de 6% l’année dernière.

Cette annonce inquiétante intervient la même année où la France enregistre l’une des plus forte baisse des pays membres de l’OCDE, reculant pour la troisième année consécutive. La courbe mondiale de l’aide repart elle fortement à la hausse, avec une augmentation de 6,1%, grâce à des pays tout autant touchés par la crise comme le Royaume-Uni qui a rempli ses engagements de consacrer 0,7% de son RNB au développement.

Plus inquiétant encore, les prévisions indiquées jusqu'en 2017 révèlent une baisse de près de 20% sur l’ensemble du mandat de François Hollande. Sur 5 ans, Les crédits d’APD seront 10 fois plus impactés que le budget global de l’Etat. 

Lors de l’examen des crédits APD en Commission élargie, les rapporteurs (UMP), les député-e-s socialistes et communistes ont marqué leur réprobation devant ces arbitrages au regard des enjeux actuels en soumettant Annick Girardin et Michel Sapin à de nombreuses questions. Ils ont également déposé un amendement de redéploiement de 35 millions d’euros vers les pays les plus pauvres (dont la Guinée, où sévit actuellement l'épidémie d'Ebola).

Grâce à l’action de plusieurs ONG dont Oxfam, cet amendement a été adopté à la majorité lors du vote de budget en séance plénière à l’Assemblée nationale. A travers des rendez-vous, l’envoi de brochure, une mobilisation sur les réseaux sociaux et même d’un dispositif d’affichage grande format autour de l’Assemblée nationale, nous avons sensibilisé les parlementaires sur l’importance de l’APD et l’urgence de la sauvegarder.
 L’adoption de cet amendement est un signe encourageant qui montre que les parlementaires ont véritablement conscience de l’enjeu que représente l’aide publique au développement. C’est maintenant au tour du Sénat de confirmer cet engagement dans les prochaines semaines.

Baisser les crédits d’aide au développement revient à renoncer aux engagements de la France, et à priver les populations des pays les plus pauvres d’accès à l’éducation, à la santé et au développement économique. Ce sont aussi de nouveaux reculs sur le front de la lutte contre la pauvreté, les inégalités et le changement climatique.

Malgré la multiplication des enjeux

Epidémie Ebola, crise syrienne, violences en Centrafrique, crise alimentaire au Soudan du Sud… Cette baisse intervient dans un contexte mondial "multi-crises" où l’aide au développement est essentielle à la reconstruction des pays et la création de cadres de développement stable.

De plus, des efforts importants doivent encore être réalisés pour améliorer la transparence de l’utilisation des fonds mobilisés au titre de l’APD. Malgré les engagements présidentiels sur la transparence de l’aide pris à l’occasion du G8 de juin 2013, la France peine à publier ses données en matière d’aide publique au développement au standard international. Selon les données de l’Index sur la Transparence de l’aide publiées par Publish What You Fund, l’Agence Française de Développement (AFD) et le Ministères de l’Economie et des Finances se classent respectivement 44ème et 58ème sur 68 ; seul le Ministère des Affaires étrangères a progressé, passant du 52ème  au 28ème rang. Un classement surprenant compte tenu de la volonté de la Secrétaire d’Etat au développement Annick Girardin de faire de la transparence un axe fort de sa politique.

Pourtant, l’amélioration de la qualité et de l’efficacité de l’aide est évidemment indispensable pour atteindre les grands objectifs de développement.

L’année 2015 sera cruciale pour l’aide au développement : fin des Objectifs du Millénaire pour le Développement décidés en 2000,  conférence internationale sur le financement du développement, Conférence sur le climat à Paris. La France s’éloigne de plus en plus de ses promesses et se doit d’être particulièrement exemplaire en cette année d’échéances internationales majeures pour le développement.

Alors que les enjeux sont considérables, à l’heure des débats et du vote du budget,  les député-e-s français-es se doivent de défendre une politique ambitieuse de développement, une exigence pour la France, 5ème puissance économique mondiale. 68% des Français-es soutiennent l’augmentation ou le maintien de la part du budget national consacré à l’APD.

Parce que l’aide lorsqu’elle est réellement efficace contribue à la construction d’une mondialisation solidaire et garantie l’amélioration des conditions de vie des populations les plus vulnérables.

Nourou de l’ONG CeRADIS au Bénin, Nohad de l’association Nabaa au Liban et l’association CARI au Maghreb sont des exemples de projets financés par l’aide française. Découvrez leurs histoires ci-dessous.