Interpeller sa collectivité pour qu’elle devienne un territoire féministe !

Les inégalités femme-homme, grande cause petit bilan

En 2023, les inégalités femme- homme demeurent toujours une réalité dans le monde. Elles se sont d’autant plus aggravées ces dernières années, du fait de la pandémie du covid, la crise économique, ou encore de la montée des conservatismes à l’échelle mondiale. Le résultat : les femmes devront encore attendre plus de 130 ans avant de connaître un monde égalitaire ! A l’échelle mondiale plus de 60% des pauvres sont des femmes, soit 435 millions de femmes vivant avec moins de 1,9$ par jour. 47 millions de femmes ont basculé dans l’extrême pauvreté à cause de la pandémie de covid-19. Une femme sur trois a été victime de violence sexiste et sexuelle au cours de sa vie, sachant qu’une femme est tuée par son conjoint ou membre de sa famille toutes les 11 minutes.

Face à ces réalités mondiales, il est indispensable d’agir pour permettre une réelle égalité femme- hommes. Or en France, la “ grande cause nationale du quinquennat” affichée par le gouvernement peine à se concrétiser.  Le budget alloué à l’égalité femmes-homme ne représente que 1% du budget de l’Etat, 0,018 % du budget concernant l’action du ministère des Droits des femmes…

Et ce faible investissement politique a un résultat concret: 53% des pauvres en France sont des femmes, soit 4,9 millions de femmes vivant sous le seuil de pauvreté. Les femmes gagnent toujours 15,8% de moins que les hommes à salaire égal. Le Haut conseil à l’égalité( HCE) , alerte aussi sur la persistance du sexisme en France, avec un homme sur quatre de 24 à 34 ans estimant qu’il faut parfois être violent pour se faire respecter, et 40% des hommes qui considèrent qu’il est normal qu’une femme s’arrête de travailler pour s’occuper de leurs enfants. 

 

Ces inégalités s’incarnent à toutes les échelles au sein de nos territoires. Communes, métropoles, départements, et régions, peuvent donc jouer un rôle fondamental dans la reproduction ou la lutte contre ces inégalités. Les collectivités peuvent choisir de devenir des territoires féministes ! Car, si le débat politique et médiatique a tendance à se concentrer au niveau national, notamment sur le gouvernement et le Parlement, il ne faut pas oublier que les collectivités locales constituent une part essentielle de l’action et de la dépense publique. Elles sont donc des échelons pertinents de la lutte contre les inégalités !

Les collectivités peuvent être féministes !

L’action des collectivités locales, communes, intercommunalités, départements et régions est au cœur du quotidien des Français·e·s. Troisième poste de dépense de l’Etat et employeuses d’un tiers des fonctionnaires, les collectivités représentent une part conséquente des politiques publiques. Elles assurent ou contribuent à des compétences essentielles telles que la vie scolaire, la petite enfance, l’urbanisme, les transports, l’action sociale, la sûreté, la culture, les sports ou même la vie associative. L’échelle locale est donc incontournable pour mettre en place des politiques de réduction des inégalités entre les femmes et les hommes.

Au fait, c’est quoi une collectivité territoriale ?

Une collectivité territoriale ou locale est une entité administrative décentralisée qui exerce des compétences sur un territoire donné, indépendamment de l’État. Les collectivités locales se déclinent à différents niveaux : régions, départements, Établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et communes. Ces collectivités ont leurs propres élu-e-s et institutions, et prennent leurs décisions indépendamment de l’Etat. Elles ont des compétences diverses, dans des domaines tels que l’éducation, l’action sociale, la culture, citoyenneté, logement, transport, voire dans le domaine de l’insertion professionnelle. Les collectivités locales constituent une part essentielle de l’action et  de la dépense publique( 3e poste de dépense de l’État en 2022, avec 115 milliards d’euros). C’est donc l’incarnation d’une véritable démocratie locale  au plus près de chez soi ! Les collectivités territoriales sont ainsi un levier majeur de l’action publique, et sont incontournables pour répondre aux défis du changement climatique et de la croissance des inégalités.

Quel est le réel pouvoir des collectivités territoriales pour favoriser l’égalité entre les femmes et les hommes ?

Pour transformer la façon dont les politiques publiques sont menées dans vos collectivités des outils-clés existent. Parmi eux :

  • La budgétisation sensible au genre. Pendant longtemps, les politiques publiques ont été élaborées par et pour les hommes, sans se préoccuper de l’impact potentiellement négatif sur les femmes. Avec la budgétisation sensible au genre, il s’agit d’évaluer si les femmes bénéficient à l’égal des hommes des politiques publiques.
  • Les éga-conditionnalités, qui consistent à conditionner l’attribution des financements publics ou des autorisations administratives au respect des principes et pratiques égalitaires entre les femmes et les hommes, sont également un levier essentiel.

La budgétisation sensible au genre

Un budget public, notamment un budget local, n’est jamais neutre. Il illustre des priorités et des choix politiques ainsi que des investissements à court, moyen et long termes dans les domaines de l’économie, du social, de l’environnement, ou encore de la sureté. Les choix de dépenses et les modalités de collecte des ressources ont également un impact sur la réduction des inégalités femmes-hommes. Financer telle ou telle infrastructure sportive ou culturelle, réformer la protection sociale en repoussant par exemple l’âge de départ à la retraite, modifier les installations des éclairages publics, toute dépense publique nationale ou locale peut avoir un impact différencié entre les femmes et les hommes et in fine accentuer les inégalités, alors même que les personnes qui prennent la décision n’ont pas l’intention consciente de favoriser un genre spécifique. C’est quand le genre est un impensé que l’on reproduit ou aggrave les inégalités.

Pour éviter les politiques publiques « aveugles au genre » et accélérer les efforts en matière de réduction des inégalités, il faut enlever ces œillères et adopter un prisme d’analyse genré ! C’est-à-dire cesser de croire que l’action publique est neutre pour prendre en compte les inégalités de genre.

L’outil financier adéquat pour le faire s’appelle la budgétisation sensible au genre. La démarche est  simple : il s’agit d’évaluer si les femmes bénéficient au même niveau que les hommes des politiques publiques. Et pour réduire les inégalités, il faut les connaître et donc les compter. La budgétisation sensible au genre constitue notamment l’un des principes de la Charte européenne pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale, afin  d’intégrer la perspective de genre dans toutes les activités des collectivités.

L’éga-conditionnalité, qu’est ce que c’est ?

L’éga-conditionnalité consiste à imposer des conditions de respect à l’égalité femme- homme dans les décisions d’attribution des financements publics ou des autorisations administratives. Ici, il ne s’agit plus seulement de corriger les inégalités en aval, mais également en amont.C’est par exemple des clauses en faveur de l’égalité pour la délivrance des marchés publics, des partenariats public- privés, des subventions ou des prêts garantis par l’État ou des points sur l’égalité femmes-hommes dans les contrats d’objectifs que l’État signe avec différents partenaires.

 Les collectivités peuvent donc rajouter des conditions favorables à l’égalité femme-homme dans leurs appels à projet, et autorisations administratives. Une collectivité qui instaure des éga-conditionnalités fait preuve d’une véritable volonté politique en faveur de l’égalité, car elle influence les comportements des prestataires et bénéficiaires de l’action publique des collectivités. 

 Néanmoins beaucoup reste à faire pour renforcer le champ des éga-conditionnalités. Plusieurs pistes sont envisageables :  intégrer des analyses  de genre avant tout projet local,  exclure les entreprises ayant un mauvais score en matière d’égalité salariale ou encore intégrer directement des objectifs et indicateurs de genre ou des exigences de parité dans l’ensemble des subventions et contrats passés par les collectivités.

Les collectivités agissent déjà !

Partout en France, des initiatives innovantes et féministes ont émergé ces dernières années : décortiquer les budgets locaux pour évaluer leur impact en faveur de l’égalité, ouvrir des centres de prise en charge des femmes victimes de violences, ou même repenser une cour d’école et des équipements urbains pour que l’espace public ne soit plus accaparé par les hommes et les garçons au détriment des femmes et filles. Autant d’exemples concrets pour faire avancer le combat en faveur de l’égalité femmes-hommes en France.

 

 Et les résultats sont là : 8 000 places en crèche créées à Paris en près de 10 ans, 3 nouvelles femmes victimes de violences accueillies chaque jour par un centre ouvert à Nantes, un rééquilibrage des subventions de la ville de Lyon aux tournois sportifs féminins et masculins, une cour d’école aux Lilas repensée pour permettre aux jeunes filles et jeunes garçons de mieux partager l’espace public, 50 femmes sarcelloises éloignées de la vie publique qui deviennent de réelles actrices de leur ville.

Ces exemples sont le fruit d’un engagement local pour faire avancer les droits des femmes, et doivent alimenter le débat national. Des outils clés tels que la budgétisation féministe et les éga-conditionnalités peuvent donc transformer véritablement la façon dont les politiques publiques sont menées. Cependant, les moyens mobilisés restent insuffisants pour mettre en œuvre une réelle politique féministe, à la hauteur “de la grande cause du quinquennat”. 51 élus ont ainsi signé notre appel, plébiscitant en faveur d’une véritable politique féministe dans leurs territoires, afin d’appeler à une réelle amélioration à l’échelle nationale !

Carte des villes et territoires qui se sont déjà engagé-e-s !

Mobiliser votre collectivité, et l’interpeller pour les inciter à signer cet appel, c’est possible ! Pour ce faire, il suffit simplement de vous inscrire sur le formulaire ci-dessous, afin de recevoir le kit d’interpellation de votre collectivité .

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