Les négociations climatiques : une opération de communication ?

C’est en tout cas ce que semble penser le Pérou, pays hôte de la 20e conférence internationale sur le climat (COP20) !

La présidence péruvienne a plus que profité de son statut pour apparaitre dans les medias et sur les réseaux sociaux, prêchant la bonne parole auprès de la communauté internationale sur les enjeux du changement climatique et ses conséquences.

Jusque-là tout va bien. Pourtant après quelques jours passés à Lima, et de nombreux échanges avec nos collègues et partenaires locaux, je me rends très vite compte que la réalité locale est tout autre.

De la poudre aux yeux ! Derrière les belles paroles…

L’économie du Pérou est fortement basée sur l’extraction des matières premières : or, argent, cuivre, zinc, mais aussi pétrole et gaz. Le secteur minier représente à lui seul 70% des exportations !  Le pays voit les conflits se multiplier avec les communautés locales vivant dans les zones minières mais également en Amazonie en raison d’une déforestation à grande échelle. Le Pérou perd un hectare de forêt amazonienne toutes les trois minutes en raison des activités minières et agricoles !

En 2011, le président Humala avait affirmé : «  la vie est plus importante que l’or et nous ne pouvons pas permettre que l’on continue à polluer l’environnement ». Et puis la crise est arrivée et la nécessité de relancer l’économie a très vite fait primer le profit sur l’environnement. Le gouvernement a persisté dans son approche : encouragement de larges investissements privés dans les secteurs miniers et agricoles, remise en cause des régulations environnementales et sociales  existantes, soudainement présentées comme des freins à l’économie et à la croissance, et baisse des budgets des agences environnementales.

La COP20 se tient aujourd’hui dans un pays qui n’a pas de législation sur le climat. Une loi cadre sur le changement climatique avait été promise en début de COP mais est toujours en discussion au Congrès !

Pourtant le Pérou est l’un des 10 pays les plus vulnérables au changement climatique : plus de 80% de la production de maïs, patates, bananes ou de riz subit les conséquences du changement climatique. La société péruvienne attend de son gouvernement des avancées en matière environnementale. Aujourd’hui des milliers de défenseurs de l'environnement manifesteront dans les rues de Lima dans le cadre de la Marche des peuples pour le climat pour réclamer des solutions réelles face aux changements climatiques.

Le tableau est donc plutôt sombre pour un pays qui souhaite sa présidence exemplaire. Note pour la France : en 2015, il faudra choisir entre opération de communication et réelle action.

Romain Benicchio, porte-parole d'Oxfam France à Lima.