Crise des politiques migratoires en Grèce : l’urgence d’une réponse européenne

Suite à l’annonce de l’ouverture des frontières turques par le président Erdogan, des milliers de personnes fuyant la guerre et la violence arrivent en Grèce en quête de protection. Prises aux pièges des frontières européennes, ces personnes s’entassent dans des conditions dramatiques, notamment sur l’île de Lesbos. Tandis que la situation se dégrade, les violences envers les populations migrantes et les travailleurs humanitaires présents sur place augmentent. Ce contexte intenable exige des actes forts et concrets de l’Union Européenne, qui doit répondre aux demandes de protection et prendre ses responsabilités dans cette crise des politiques migratoires.

 

Plus de 13 000 personnes bloquées aux frontières de l’Europe

Selon l’Organisation internationale pour les migrations, plus de 13 000 personnes sont désormais amassées à la frontière terrestre gréco-turque. Parmi elles, de jeunes enfants, femmes et hommes vulnérables, forcés de passer la nuit dehors, sans accès à la nourriture, à des toilettes et douches fonctionnelles, ou à des soins médicaux.

A Lesbos, 20 000 réfugié.e.s survivent dans et autour du camp de Moria, alors que sa capacité d’accueil initiale n’est que de 3000 personnes. Près de la moitié sont des enfants, pris au piège dans des conditions dangereuses et insalubres, parfois depuis plusieurs années.

A Lesbos et sur les autres îles grecques, des protestations menées par des locaux se sont amplifiées au cours des dernières semaines, provoquant une escalade de la violence. La situation a notamment dégénéré lors d’affrontements entre de petits groupes d’habitants et la police armée sur place, faisant plusieurs blessés. Des employés d’ONG et des journalistes ont également été attaqués. Ces protestations font suite aux plans annoncés par le gouvernement, visant à remplacer les camps existants, gravement surpeuplés, par des centres – de facto – de détention.

Des populations migrantes qui font face à la violence

L’absence de solution et d’engagement de la part de l’Union Européenne alimente chaque jour un peu plus les tensions, laissant la situation entre les mains de groupes extrémistes et xénophobes. Plusieurs embarcations, à bord desquelles se trouvaient de nombreux enfants, ont ainsi été empêchées d’accoster.

Selon les informations des médias et travailleurs humanitaires présents sur place, les garde-côtes grecs ont également usé de la violence pour tenter de repousser les populations migrantes, allant même jusqu’à faire usage de leurs armes à feu.

Conséquences directes de cette violence et en raison des menaces qui pèsent sur les personnes apportant leur aide, des centres communautaires pour les réfugié.e.s et migrant.e.s ferment leurs portes et les assistances juridiques sont stoppées. Actuellement, la majorité des organisations humanitaires ont été contraintes de suspendre leurs activités ou de réduire leur volume.

L’Union Européenne doit prendre ses responsabilités dans la crise grecque et mettre en place une politique migratoire juste et humaine

Les menaces et les attaques contre les demandeurs d’asile et les travailleurs humanitaires sont inacceptables. Cette détérioration des conditions de sécurité doit être au plus vite enrayée, par un changement de cap urgent du gouvernement grec et de la communauté européenne.

L’accord UE-Turquie a imposé une restriction géographique contre laquelle nous avons toujours plaidé. La surpopulation dans les îles grecques, que la situation à Lesbos illustre tristement, et la dégradation des conditions de vie sont aujourd’hui le résultat de cette restriction. Il est grand temps que l’Union Européenne cesse d’utiliser ces personnes fuyant violence et persécution comme les pions d’un jeu politique. Les responsabilités des Etats membres doivent être prises par chacun, et les obligations humanitaires et juridiques respectées.

De toute urgence, les enfants et les autres personnes en situation vulnérable doivent être réinstallés dans des lieux sûrs, vers d’autres États Européens, afin de leur garantir des conditions de vie humaines et répondre à leur demande d’asile. Parallèlement, la capacité d’accueil et d’hébergement à long terme en Grèce doit être augmentée en renforçant, entre autres, la capacité des programmes d’hébergement parrainés par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

La Grèce et ses partenaires de l’Union Européenne, y compris la France, doivent remettre les droits humains au premier plan et offrir une protection aux personnes en quête de sécurité sur son territoire. La promotion des valeurs européennes ne peut passer que par la défense de ces droits fondamentaux.

Les partenaires d’Oxfam aux côtés des migrants et réfugiés, un travail essentiel menacé par les violences

Présente sur l’île de Lesbos depuis 2015, Oxfam soutient notamment financièrement les activités de notre partenaire local, GCR (Conseil Grec pour les Réfugiés), permettant d’assurer un accompagnement juridique aux personnes dans leur demande d’asile.

Suite aux attaques contre les travailleurs humanitaires, GCR a temporairement fermé ses bureaux dans les îles grecques. Ils restent toutefois ouverts pour les services d’urgence. Le personnel de GCR à Evros continue de visiter les centres de détention et d’assister juridiquement les demandeurs d’asile, dans le cadre du programme d’aide financé par Oxfam.

Notre autre partenaire, Europe Lawyers in Lesvos (ELIL), également confronté aux troubles sur place, continue de soutenir autant que possible ses clients par téléphone, malgré une suspension de leurs activités.